Tomboy au coeur d’une polémique d’un autre âge

Posté par redaction, le 24 décembre 2013

tomboyTomboy, le film de Céline Sciamma, est au coeur d'une polémique aussi stérile que stupide. Ce joli film qui raconte l'histoire d'une petite fille de 10 ans qui se fait passer pour un garçon est inscrit dans le dispositif « Ecole et cinéma » soutenu par le ministère de l'Education nationale et par le ministère de la Culture et de la Communication. Depuis la rentrée 2012, des enseignants peuvent donc montrer cette excellente oeuvre à leurs élèves dans le cadre de cours de culture cinématographique, pendant le temps scolaire.

Ce joli succès en salles (350 000 spectateurs) a été montré à 47 000 élèves jusqu'à présent. Mais avec les débats sur le mariage pour tous, la PMA, la théorie du genre, la France a vécu une année passionnée. Tomboy en fait les frais.

Pétition et réaction

Le Monde a ainsi rapporté qu'un titre de la PQR, Le Courrier de l'Ouest, a titré le 9 décembre « Tomboy a-t-il sa place à l'école ? », à partir d'une lettre qu'une mère avait envoyée à l'instituteur de son enfant en classe de CM1. Elle estime « tout à fait dangereux de laisser penser à des enfants de 9 ans que l'on peut changer de sexe, qui plus est sans dommage ». Ce n'était pas la première fois que dans le Centre-Ouest de la france, politiquement modéré mais encore très ancré dans une culture catholique, la presse relayait ce genre de doutes et de critiques.

Une pétition sur CitizenGO « contre la diffusion de Tomboy dans les écoles » affichait 18 320 signatures aujourd'hui. Et le nombre de médias nationaux qui en parlent devraient accélérer le nombre de signataires.

Dans un communiqué, la Société des réalisateurs de films a décidé de répliquer : "Nous souhaitons rappeler à cette occasion que notre liberté de création ne peut être entravée, non plus que la liberté pédagogique des enseignants qui, chaque jour, étudient des œuvres de fiction dans leurs classes comme dans les dispositifs d'éducation artistique. Nous demandons aux ministres de l'Éducation nationale et de la Culture de mettre rapidement et fermement un terme à cette polémique. Et nous assurons de notre soutien total Céline Sciamma ainsi que le réseau École et cinéma et les enseignants qui doivent pouvoir continuer de diffuser son film dans un climat apaisé au plus vite."

Il serait temps. Le ton se durcit depuis cet automne. Beaucoup de parents ne comprennent pas ce qu'est réellement la théorie du genre, mais nombreux sont ceux qui y voient une attaque à la famille et un prosélytisme homosexuel (ce qui, dans les deux cas, est faux). La droite conservatrice fait de ce film sur un garçon manqué un symbole idéologique. Le corps enseignant essaie de les convaincre qu'il s'agit d'expliquer comment on devient un homme, une femme, au-delà des stéréotypes véhiculés par la société (qui contribuent d'ailleurs aux inégalités hommes/femmes).

Education

Seulement 15 écoles (sur 450) se sont désinscrites de la projection de Tomboy à Paris. C'est peu. Les enseignants plébiscitent le film puisque 79% d'entre eux le trouvent très intéressant. Seul Peau d'âne fait mieux (pourtant une fable sur l'inceste, ce qui ne semble pas choquer les familles). Rappelons que les lycéens ont le droit de voir Elephant de Gus Van Sant (pourtant une tuerie dans un lycée).

Reste que la représentation de l'homosexualité à l'écran devant des enfants semble toujours poser problème. C'est pourtant grâce à l'éducation et à l'image qu'on peut résoudre d'autres problèmes : homophobie, homosexualité refoulée, rapport aux autres, tolérance... Nier l'homosexualité, que des parents considèrent toujours comme un péché, ou nier l'identité sexuelle, qui est souvent caricaturée dans les films, publicités et émissions de télévision, est sans doute plus grave que de montrer une fille qui aspire à être un garçon embrassant une autre fille.

Toujours dans Le Monde, une enseignante explique : « Grâce à ce débat sur Tomboy, dit-elle, j'ai ressenti que l'on peut encore sortir du processus de fanatisation. Le cinéma peut ouvrir les consciences, et l'école est là pour enlever les carcans moraux. »

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Cahier de notes / dossier pédagogique sur Tomboy (source CNC)

Serge Toubiana, nouveau Président de l’Avance sur recettes

Posté par vincy, le 24 décembre 2013

Frédérique Bredin, présidente du CNC a nommé, en accord avec la ministre de la culture et de la communication, Aurélie Filippetti, Serge Toubiana à la présidence de la commission d’avance sur recettes, pour une durée d’un an (renouvelable une fois) à compter du 1er janvier 2014.

Il remplace l'éditeur Paul Otchakovski-Laurens dont le mandat commencé en 2011 arrivait à échéance. Dans son communiqué, Frédérique Bredin "se réjouit que Serge Toubiana ait accepté de lui succéder et d’assumer désormais cette responsabilité à un moment crucial pour l’avenir du cinéma français."

Serge Toubiana a été le rédacteur en chef de la revue Les Cahiers du cinéma avant de devenir le directeur de la Cinémathèque française en 2003.

Dans une tribune publiée dans Le Monde aujourd'hui, Paul Otchakovski-Laurens rappelle les vertus de l'Avance sur recettes alors qu'elle semble critiquée par des professionnels comme par des élus ou haut-fonctionnaires : "nous choisissons, et donc excluons par la force des choses, ce qui explique bien des amertumes, c'est dans la plus grande transparence et avec le souci jamais démenti de l'ouverture et de la diversité de nos choix. Curieusement, cette diversité et cette ouverture sont également critiquées. Un film à gros budget est-il soutenu, nous sommes accusés de voler au secours du succès. Un film d'auteur, comme on dit étrangement ? On nous reproche alors de ne pas tenir compte des goûts supposés du public. Mais il faut savoir que des films ne se feraient pas sans l'Avance sur recettes. Et s'il arrive qu'elle soutienne des films qui se feraient sans elle c'est avec cette conviction qu'ils se feront mieux avec elle."

La commission d’avance sur recettes est composée de trois collèges siégeant séparément, de trois vice-présidents et de 25 membres titulaires. Le président est commun aux trois collèges. Le premier collège examine les demandes d’avance avant réalisation présentées pour une première œuvre cinématographique de longue durée d’un réalisateur. Le deuxième collège étudie les demandes d’avance avant réalisation pour des œuvres de réalisateurs ayant réalisé déjà au moins un long métrage. Le troisième collège est compétent pour examiner les demandes d’avance après réalisation.

Cinéaste, scénariste, producteur, danseur, écrivain, éditeur, techniciens du cinéma plasticien, critique, vidéaste : les collèges fédèrent des passionnés de cinéma venus de tous les horizons. Dans cette commission 2014, on retrouve Marie Darrieussecq, Delphine Gleize, Alain Attal, Olivier Assayas, Jérémie Elkaïm, Hervé de Luze, Xavier Leherpeur ou encore Rebecca Zlotowski.

L’avance sur recettes sur scénario (avant réalisation) a soutenu en 2013, 55 projets de long métrage, sur 647 demandes.

Leonardo DiCaprio : un loup à Hollywood

Posté par geoffroy, le 24 décembre 2013

martin scorsese leonardo dicaprio

Le loup de Wall Street est la cinquième collaboration entre l’acteur Leonardo DiCaprio et le réalisateur Martin Scorsese depuis leur première rencontre (la fresque historique Gangs of New-York) sorti il y a 11 ans.

La date, comme le film, est charnière, puisqu’elle annonce, dans la fureur et le sang, l’explosion artistique d’un acteur encore "bouffé" par son statut d’icône à midinettes suite au succès planétaire de Titanic (1997). Au-delà de la notion même de fidélité entre deux hommes nourris d’une même passion, Gangs of New-York révèle au grand jour les ambitions, forcément hautes, d’un acteur passionné comme obnubilé par l’expertise de son travail autour du jeu. Las d’être sans cesse renvoyé au Jack Dawson de Titanic, DiCaprio va prendre son destin en main pour se construire une carrière brillante, en tout point exigeante, parsemée de choix presque toujours judicieux. Soit l’exact opposé des sirènes entonnées par les studios hollywoodiens. Pour autant, il ne sortira pas du système, ni s’empêchera d’apparaître dans de superbes productions réalisées par les plus grands réalisateurs américains. Sacrifice nécessaire – celle d’une gloire planétaire pas toujours désirée par l’intéressé –, pour obtenir la liberté artistique dans une industrie tellement normée.

Un tel paradoxe est rare, et reflète les raisons de l’amour du public américain envers celui qui aura su, mieux que quiconque, incarner dans ses différents rôles la complexité d’une Amérique à la fascination intacte. Et les figures ne manquent pas pour celui qui a eu très tôt la reconnaissance de ses pairs (même si, paradoxalement, il attend toujours son Oscar). Les figures auront été historiques (Howard Hughes dans Aviator, Hoover dans J. Edgar), littéraires (Jay Gatsby dans Gatsby le magnifique) ou témoins d’une époque (Amsterdam Vallon dans Gangs of New-York, Franck Abagnale Jr. dans Arrête-moi si tu peux, Franck Wheeler dans les Noces rebelles, Calvin Cardie dans Django Unchained, Jordan Belfort dans le Loup de Wall Street). Le reste de sa filmographie ne résiste pas à la notion du rôle dans sa dimension humaine, psychologique, en réaction avec l’environnement dans lequel il se confronte. Il illustre une Amérique tourmentée, fondée sur la violence, les subterfuges, mensonges et autres manipulations, une civilisation du chaos, intime et global, où le génie est toujours valorisée, mais mène souvent à sa propre destruction, où le cerveau est un ennemi intérieur et les pulsions des amies indomptables. Il est la folie américaine, centrée sur sa propre gloire, sonnée par sa chute inévitable, capable de se relever ou de s'amender.

Car, oui, il est presque toujours question avec DiCaprio de combat, de confrontation, d’interaction, de challenge, de perte de contrôle ou de survie. Inception, les Infiltrés, Mensonges d’état, Blood Diamond et, bien évidemment, Shutter Island, ont ceci en commun qu’ils n’enferment jamais l’acteur/personnage dans une case.

leonardo dicaprioL'héritier des géants hollywoodiens, de Cooper à Stewart

DiCaprio se débat alors comme un damné avec son/ses rôles (s) pour le (s) faire exister au-delà du genre ou des codes qui vont avec. Son exigence plaît. Son implication aussi. Sa façon de donner corps à un personnage, à coup sûr. Au point d’en faire parfois de trop, de flirter avec la caricature de l'excès. Néanmoins, il possède ce talent rare, presque magnétique, d’immortaliser après son passage les personnages qu’il aura incarné. En cela il perpétue le mythe propre aux géants d’un âge d’or du cinéma devenu intemporel. Il n’y a pas à sourciller, DiCaprio est une légende vivante, un acteur à part entière reconnaissable entre mille que le public veut voir. Il revendique, par son implication toute particulière, à la liberté du rôle. Peu importe où cela le mène. Une chose est sûre, vous ne l’avez jamais vu sauver le monde dans un blockbuster quelconque ou bien faire rire aux éclats la ménagère de plus de cinquante ans dans une comédie ordinaire. Par peur, évidemment, de devenir l’esclave d’un genre ou d’un rôle (il n’a jamais joué deux fois le même personnage), forcé qu’il serait de se plier aux codes hollywoodiens pour le moins avilissants. Pas étonnant alors que Scorsese en ait fait son égérie, tandis que son ancienne muse, De Niro, diluait son talent, jusqu'à industrialiser son jeu et s'autoparodier, dans des films médiocres.

Un duo très rentable

Le succès de Leonardo, qui dure depuis quinze ans, fait de lui une "bête" du box-office capable de monter un film sur son seul nom. Cette année, il enchaîne les hits, capable de passer de Tarantino à Luhrman en séduisant le plus grand nombre. Rien que dans les années 2000, il a été tête d'affiche de 8 films qui ont passé le cap des 100 millions de $ en Amérique du nord (en recettes ajustées à l'inflation de 2013), dont 4 d'entre eux qui ont rapporté plus de 300 millions de $ dans le monde. Et on comprend mieux le pacte Scorsese/DiCaprio à la lecture des box offices : tous les films du cinéaste avec l'acteur ont été des succès. 4 des 7 plus gros hits du réalusateur sont donc des films avec DiCaprio, Les Infiltrés en tête, puisque c'est le film de Scorsese le plus populaire en Amérique du nord. Le duo cumule ainsi 1 milliard de recettes dans le monde avec 4 films qui ont coûté moins de 400 millions de $.

leonardo dicaprioQuestion de maturité, de choix de carrière, d’exigence artistique. Adoré des studios, il s’est offert une liberté bien plus grande. En effet, si sa filmographie force le respect aussi bien dans son adhésion populaire que dans sa tenue qualitative, il le doit en grande partie aux réalisateurs qui l’ont fait tourner, Scorsese en tête. Avec Christopher Nolan, Clint Eastwood, Danny Boyle, James Cameron, Ridley Scott, Steven Spielberg, Quentin Tarantino, Sam Mendès, Baz Lurhmann ou encore Woody Allen, les conditions de son ambition émancipatrice sont réunies. Au même titre que l’empreinte qu’il est en train de laisser au cinéma comme, jadis, les Brando, Newman, McQueen, DeNiro et plus loin encore Peck, Stewart, Cooper...

En cela; il n'est pas étonnant qu'année après année, DiCaprio soit devenu à chaque fois l'acteur qui comptait, la star qu'on aimait, le futur monument qu'on devinait. Il a transcendé les générations et les publics. Il symbolise ce cinéma hollywoodien d'auteur qu'on apprécie tant. Il est à la fois une marque et un talent. Un monstre sacré et l'acteur d'une époque. Pas étonnant que Le Loup de Wall Street

Il a imposé son visage, ni beau comme un jeune premier, ni gueule comme un acteur mature, juste celui des grands hommes, comme des plus petits, et qui, par leur courage, habileté, petitesse, doute, passion ou désespoir, représentent, chacun à leur manière, une Amérique des possibles constamment torturée par sa propre histoire.

Disney qui rit, Pixar qui pleure

Posté par vincy, le 23 décembre 2013

monstres academy la reine des neiges pixar walt disney

Dimanche soir, deux chaînes de télévision françaises ont programmé deux grands classiques de l'animation. TF1 diffusait Ratatouille, réalisé en 2007 en plein âge d'or du studio Pixar. M6 avait opté pour La petite sirène, 28e long métrage de Walt Disney, réalisé en 1989, et qui amorçait la renaissance du studio d'animation après plus de 15 ans de "classiques" médiocres.

Nous sommes en 2013. Il était encore impensable il y a trois ans d'imaginer qu'aujourd'hui Pixar allait entrer dans la première crise de sa jeune histoire tandis que Disney allait flamboyer de nouveau. Dans les deux cas, il n'y a qu'un seul responsable, John Lasseter.

Rappel des faits.
Il y a un mois, Pixar Animation Studios licenciait 67 de ses employés (soit 5% de sa masse salariale composée de 1200 personnes) et décalait son prochain film d'animation The Good Dinosaur de juin 2014 à Novembre 2015. Aussi, en 2014, pour la première fois depuis 2005, Pixar ne devait pas avoir de film dans le calendrier de l'année. Et en 2013 sa place de leader annuel dans le secteur, lui échappe puisque Monstres Academy est largement battu par Moi, moche et méchant 2 (150 millions de $ de différence au BO mondial). On peut enfin convenir qu'hormis Rebelle (2012), les trois films de Pixar sortis depuis l'excellent Toy Story 3 - Cars 2, Monstres Academy et Planes - ont tous été des déceptions pour la critique, signant la fin de l'aura de Pixar qui avait aligné 9 grands films d'animation durant la première décennie des années 2000. 6 films de Pixar avait été oscarisés (dont Rebelle l'an dernier). Mais déjà en 2012, le studio avait été snobé par l'Académie des Oscars sans être nominé (une première). En 2014, les Oscars devraient de nouveau oublier Pixar : les Golden Globes n'ont pas nominés un film du studio et les Annie Awards ont préféré les films des concurrents, y compris des films d'auteurs étrangers.

Côté Walt Disney Animation Studios, tout va bien. La Reine des neiges est son plus beau film depuis des lustres, le plus sombre aussi. Cela faisait même 20 ans qu'un film d'animation du studio n'avait pas été aussi séduisant. Carton au box office (le film est assuré d'entrer dans le Top 10 annuel aux Etats-Unis comme en France), favori américain des Oscars (face au Vent se lève de Miyazaki, distribué ironiquement par Disney), La Reine des neiges pourrait même être le premier film du studio nommé dans la catégorie du meilleur film d'animation (créée en 2002) à l'emporter.
Son autre film de l'année, Planes fut peut-être une déception au box office (90 millions de $ en Amérique du nord, et 2 fois plus dans le monde) mais il a gagné la bataille de la rentabilité, coûtant deux à trois fois moins cher que ses concurrents (écrasant au passage le rival DreamWorks, Turbo. Ce qui est étrange, c'est d'avoir transférer ce spin-off de Cars ( produit Pixar), écrit et et produit par John Lasseter, vers le studio Disney.

the good dinosaur pixar

Un homme, deux stratégies

Derrière ces deux destins croisés, un seul homme John Lasseter, co-fondateur du studio Pixar et directeur artistique de Pixar comme de Walt Disney Animation Studios. Il a orienté Pixar dans une stratégie de déclinaisons : des suites comme Cars 2 ou Monstres Academy ou des dérivés comme Planes (univers de Cars) ou Le monde de Dory (spin-off du Monde de Nemo). Ces films s'adressent aux enfants alors que Pixar avait l'avantage de toucher aussi les ados et les adultes dans les films précédents. Pixar se rapproche alors de la stratégie de DreamWorks Animation avec des produits plus formatés.
A l'inverse, chez Disney, il préfère produire des films originaux comme Les mondes de Ralph, La Reine des neiges, Raiponce.... en prenant soin dans les deux cas de séduire garçons et filles, et surtout toute la famille. Et Disney occupe le marché avec divers produits très segmentés comme Planes ou La fée Clochette.

En faisant perdre sa "touch" créative à Pixar et en pariant sur une renaissance créative chez Disney - en panne depuis des années, incapable de rivaliser avec Pixar -, Lasseter a négligé son propre studio au profit du géant. Il se mêle de tout, des produits dérivés au potentiel dans les parcs d'attraction. Transformant ainsi Pixar en machine à cash et Disney en "marque" de luxe et label de confiance.

En 2006, Pixar entre dans le giron de Disney. Une acquisition de 7,4 milliards de dollars à l'époque. Depuis, Lasseter passe plus de temps chez Walt Disney, au grand désespoir des équipes de Pixar qui se sentent flouées et même abandonnées. Il a vite compris le danger cette année. En préférant retarder The Good Dinosaur et en annonçant l'ambitieux Inside Out (voir notre actualité du 22 août 2011) ou l'intriguant Day of the Dead, Lasseter a remis Pixar dans ses priorités.

Pendant ce temps Disney prévoit une suite pur Planes, une énième Clochette, un film d'animation Marvel, Big Hero 6, l'an prochain, et Zootopia en 2016, en plus de classiques de l'animation refaits en films de prises de vues réelles (Le livre de la jungle, Cendrillon, la belle au bois dormant). Mais surtout le studio profite des méthodes que Lasseter a éprouvé chez Pixar : des réunions stratégiques et décisives lors des blocages dans une production, des réalisateurs "maison" qu'on accompagne au fil des films...

Marché juteux et convoité

Le creux de vague de Pixar est sans aucun doute une étape nécessaire dans l'existence d'un si jeune studio. Et les actionnaires sont rassurés par la stratégie des suites et des spin-offs : ce qui est familier rassure. Le risque est moindre.

Cependant, sans crier au feu, la qualité est un élément indispensable pour se distinguer d'une concurrence de plus en plus vive mais surtout plus perfectionniste. D'Europe ou d'Asie, les films d'animation ont atteint un niveau qui fait mouche lors des palmarès de fin d'année et s'exportent bien. A Hollywood, Universal, DreamWorks, la Fox, et dans une moindre mesure Sony et Warner Bros, ont déjà conquis le public dans le monde entier (et récolté quelques gros prix) pour montrer à Lasseter qu'il n'était plus invincible. Disney et Pixar sont toujours les rois de l'animation. En 2013, l'animation devrait rapporter plus de 1,5 milliard de dollars de recettes dans le monde, rien que pour l'exploitation dans les salles de cinéma.

Mais le duo Disney/Pixar ne gagne plus toutes les batailles de cette guerre qui se chiffre en milliards de dollars chaque année. Et 2014 devrait même réserver quelques surprises dans la hiérarchie de l'animation. Pour la première fois, l'Empire Disney ne devrait pas dominer le marché.

Le jour le plus court 2013 : Inupiluk de Sébastien Betbeder, exemple de création spontanée

Posté par MpM, le 22 décembre 2013

sbetbederA l'occasion de la 3e édition du Jour le plus court, nous avions proposé au réalisateur Sébastien Betbeder, aussi à l'aise dans le format court (La vie lointaine, Nu devant un fantôme...) que dans le long (Nuage, Les nuits avec Théodore, 2 automnes, 3 hivers...), d'être notre invité d'honneur.

Pour clore cette carte blanche, il a accepté de nous parler de son nouveau court métrage, Inupiluk, réalisé dans des conditions extrêmement modestes.

Ecran Noir : Depuis 2 automnes, 3 hivers, vous avez déjà tourné un nouveau court métrage... A quel stade en est-il ?

Sébastien Betbeder : Il est en fin de post-production. Il est quasi fini et on a eu la bonne nouvelle d’apprendre qu’on est sélectionné à Clermont Ferrand. C’est un film qui est un peu tombé du ciel, un projet que je n’avais pas prévu à l’avance. Il a fallu trouver de l’argent très vite, donc on l’a financé avec des appels à dons sur le site ulule.fr. Je n’avais jamais fait ça ! Mais on a réuni 5000 euros et on a fait le film avec 5000 euros. Après, on a eu l’aide à la post-production de la Seine Saint-Denis et on a pu le finir dans des conditions plutôt normales. C’est chouette!

EN : Comment est né ce projet ?

SB : Le film s’appelle Inupiluk, c’est un terme inuit. Le projet est assez particulier : c’est Nicolas Dubreuil, le frère de mon producteur [Frédéric Dubreuil], qui est guide au Groenland. Il vit là-bas la moitié de l’année depuis 20 ans, dans un des villages les plus reculés.

Ca faisait longtemps qu’il avait envie de faire venir en France des chasseurs inuits, qui eux n’avaient jamais quitté le village, et il a enfin réussi à trouver des financements pour organiser le voyage. Il avait envie de garder une trace de ce séjour mais il n’avait pas envie de faire appel à une équipe de télé, il voulait plutôt travailler avec des gens proches.

Je lui ai dit "pourquoi pas, mais je ne me sens pas du tout de faire un documentaire". Je ne me sentais pas la légitimité de ça. Ce n’est pas une écriture que j’ai travaillée, ni dans laquelle je me sens capable de me lancer. J’ai réfléchi deux jours et je lui ai proposé d’écrire une fiction à partir de cette situation-là. Ca s’est passé comme ça, et les deux Inuits arrivaient quinze jours après.

EN : Comment s'est passée l'écriture ?

SB : J’ai écrit un pseudo scénario inupiluket j’ai demandé à deux comédiens, Thomas Blanchard (qui joue Yann dans 2 automnes, 3 hivers) et Thomas Scimeca, d’être les comédiens de ce film qui était à moitié écrit.

J’ai créé une sorte de condition à la fiction qui était que le père du personnage de Thomas Blanchard vive au Groenland et doive faire venir ses amis en France. Mais ce père a eu un accident de chasse et s’est blessé à la jambe. Donc il propose à son fils d’accueillir ses deux amis. A partir de ce postulat de départ, j’ai créé des situations.

On se voyait tous les jours avec les comédiens pour imaginer ensemble comment on pouvait créer de la fiction avec la venue de ces deux Inuits et on s’est greffé sur le parcours prévu par Nicolas, le frère de Frédéric. Dans ce programme-là, moi j’ai fabriqué des scènes entre les deux Thomas et les deux Inuits. Le film raconte leur semaine passée en France.

EN : Comment s'est déroulée cette semaine ?

SB : Ce qui était beau, une des raisons qui ont fait que j’étais motivé par ce projet, c’est quand j’ai demandé à Nicolas ce que les deux Inuits voulaient faire. Il y avait trois choses : voir des animaux (parce qu’ils n’avaient jamais vu en vrai d’autres animaux que des phoques et des ours), marcher dans une forêt (parce qu’ils n’avaient jamais vu d’arbres) et se baigner dans la mer. Le programme du film, c’est ça, les amener dans ces endroits-là. On a capté des choses qui sont vraiment des moments de première fois.

C’est un film que j’aime beaucoup, dont je suis très fier. Il n’aurait pu se fabriquer que comme ça. Ca me tentait depuis longtemps de partir dans quelque chose de trèsz léger, d'assez peu écrit. Et puis là, ce qui était bien dans cette occasion-là, c’est qu’il n’y avait pas d’enjeux. Personne ne nous attendait. C'est un film qu'on a fait entre nous. Il y avait un chef op’, un ingénieur du son qui perchait aussi, un assistant, quelqu’un à la régie et moi. Nous étions cinq : c'était très léger et très agréable d'un point de vue de travail.

A découvrir, un extrait de la première rencontre de travail entre Nicolas Dubreuil et les deux comédiens du film :

A noter que le dernier long métrage de Sébastien Betbeder, Deux automnes, 3 hivers, sort sur les écrans le 25 décembre. Deux avant-premières ont lieu le 23 décembre à Paris, au MK2 Beaubourg à 20h et au MK2 Hautefeuille à 19h30.

Les réalisateurs de Little Miss Sunshine s’engagent sur deux adaptations

Posté par vincy, le 22 décembre 2013

Après Little Miss Sunshine et Elle s'appelle Ruby, Jonathan Dayton et Valerie Faris vont faire de nouveau équipe. Il avaient annoncé qu'ils voulaient réaliser I'm Proud of You, adaptation des Mémoires du journaliste Tim Madigan. Le projet a été annoncé en septembre dernier. Il s'agit de l'histoire d'un homme très distrait, à côté de la plaque côté familial, dont la vie change quand on lui propose d'écrire une pièce sur Fred Rogers, célèbre animateur de télévision (son programme pour enfants durant près de 40 ans).

Mais ils sont également en négociations pour réaliser The Good Luck of Right Now, projet porté par DreamWorks. Il s'agit de l'adaptation du roman de Matthew Quick, qui sera publié en février prochain. L'auteur est connu pour avoir écrit The Silver Linings Playbook, l'histoire d'Happiness Therapy. L'histoire est celle d'un homme qui a toujours vécu avec sa mère, jusqu'au décès de celle-ci. Une lettre de Richard Gere va bousculer sa vie et le conduire à travers le Canada pour retrouver son père biologique.

Le jour le plus court 2013 : Sauve-toi de Jean-Marc Fabre, choisi par Sébastien Betbeder

Posté par MpM, le 21 décembre 2013

sbetbederInvité par Ecran Noir à sélectionner trois courts métrages qui l’ont particulièrement marqué au cours de sa vie, le réalisateur Sébastien Betbeder (notre parrain pour cette 3e édition du Jour le plus court) a choisi (après Mon enfance de Bill Douglas et Scènes de chasse au sanglier de Claudio Pazienza) le moyen métrage Sauve-toi de Jean-Marc Fabre.

Jean-Marc Fabre est connu pour son travail de chef opérateur sur les films de Noémie Lvovsky, Danièle Thompson ou encore Nicole Garcia. On lui doit également la photographie d'Un héros très discret de Jacques Audiard et de Lemming de Dominik Moll. Après Sauve-toi (1992), il a signé son premier long métrage (Beluga) en 2007.

Sébastien Betbeder a découvert Sauve-toi avant de devenir réalisateur mais n'a jamais oublié l'ambiance singulière du film. Il nous explique les raisons de ce troisième et dernier choix.

« Là, c’est plus un souvenir de jeunesse. C’est un film que je n’ai jamais revu. J’ai juste regardé un extrait sur internet, qui m’a donné très envie de le revoir. C’est un film français qui s’appelle Sauve-toi de Jean Marc Fabre. Je l’ai découvert, je me souviens très bien, une nuit sur France 2, dans la case des courts métrages. C’est un film qui date de 92 et auquel je pense très souvent. Je l’avais trouvé incroyable. C’est un film qui diffuse une ambiance très singulière de mystère, à la Lynch, à la Twin Peaks.

L'acteur principal est Emmanuel Salinger. Je le trouve fascinant dans ses premiers rôles, et c’était peut-être une des raisons pour lesquelles j’ai voulu regarder ce film. Son personnage commet un hold-up dans une pharmacie mais s’y prend de manière un peu maladroite. Je ne sais plus comment ça se passe mais il braque quelqu’un, il prend peur, il fuit et il va chez quelqu’un en lui expliquant la situation. Ce quelqu’un lui propose de se cacher dans une maison de campagne en attendant que ça se calme. Il s’installe tout seul dans cette maison et on lui dit de rester enfermé.

Il observe un voisin qui a un comportement très étrange. Il y a une fameuse scène où il est derrière sa fenêtre et il regarde le voisin en pensant ne pas être vu. Mais l’autre le voit, et il y a un échange de regards. Celui qui pense être en situation d’observateur devient l’observé. C’est assez beau comme relation. Et il y a une scène fabuleuse que j’ai revue puisqu’on la trouve en ligne, où le type tond sa pelouse, en costume, il fait une première ligne et ensuite il réfléchit au chemin que va pouvoir emprunter son deuxième passage de tondeuse. C’est très beau, pas absurde, mais lynchéen, sur une attitude presque burlesque et en même temps très inquiétante.

Et il y a une histoire de complots. Alors ce sont vraiment des souvenirs puisque je n’ai jamais revu le film, mais le personnage a l’impression qu’il y a un complot autour de lui, donc il est là pour être protégé et en même temps, par sa position de voyeur, il entre dans une espèce de schizophrénie très étrange et très belle. »

Découvrir un extrait du film :

Le jour le plus court 2013 : Scènes de chasse au sanglier de Claudio Pazienza, choisi par Sébastien Betbeder

Posté par MpM, le 21 décembre 2013

sbetbederInvité par Ecran Noir à sélectionner trois courts métrages qui l’ont particulièrement marqué au cours de sa vie, le réalisateur Sébastien Betbeder (notre parrain pour cette 3e édition du Jour le plus court) a choisi (après Mon enfance de Bill Douglas) le moyen métrage Scènes de chasse au sanglier de Claudio Pazienza.

Ce documentaire à la première personne a remporté de nombreux prix, notamment le Prix de la Création à Clermont Ferrand et le Prix spécial du jury à Nyon - Visions du Réel.

C'est lors d'une projection hors compétition au Festival de Pantin, où il lui fit une forte impression, que Sébastien betbeder l'a découvert. Il revient sur les raisons de ce deuxième choix.

« Claudio Pazienzia est un Suisse italien qui a fait plusieurs films entre documentaire et essai. Celui que j’adore, qui m’a vraiment bouleversé pour le coup, s’appelle Scènes de chasse au sanglier. C’est un film qui doit durer 45 minutes, et c’est une sorte d’essai poétique et cinématographique sur le deuil et la question très générale de ce qu’on filme et de comment on le filme. Il l’a tourné au moment de la mort de son père. Le film mélange du 16mm, de la vidéo numérique et des plans pris avec un téléphone portable.

Il y a une scène en particulier où il filme avec son portable le visage de son père mort. Avec une déclamation chuchotée de réflexions sur la nature des images, le questionnement sur ce qu’est une image. Ca n’a pas l’air, comme ça, mais c’est un film qui est très ludique aussi. Plein d’humour.

Il appelle ça Scènes de chasse au sanglier car à un moment il se promène dans une forêt avec un des amis de son père et il installe un dispositif de plusieurs caméras au cœur de la forêt. Ils sont dans l’attente du sanglier, et il y a un sanglier en animation qui arrive dans le champ. Il y a quelque chose de très poétique entre la trivialité de la chasse et cette idée de fabriquer des images. C’est un film très très beau, plein d’invention, un mélange des genres très détonnant.

Et ce que je n’ai pas dit, c’est qu’il s’auto-filme. Par exemple, quand il est avec ce vieux monsieur, c’est lui qui se filme, et parfois il s’adresse à la caméra dans un dispositif très documentaire. Il y a un côté work in progress dans son cinéma qui est très beau. »

Découvrir deux extraits du film :

Le jour le plus court 2013 : Mon enfance de Bill Douglas, choisi par Sébastien Betbeder

Posté par MpM, le 21 décembre 2013

sbetbederInvité par Ecran Noir à sélectionner trois courts métrages qui l’ont particulièrement marqué au cours de sa vie, le réalisateur Sébastien Betbeder (notre parrain pour cette 3e édition du Jour le plus court) a tout d'abord choisi le moyen métrage Mon enfance de Bill Douglas.

Il s'agit du premier volet de la trilogie inédite du cinéaste britannique qui est sortie en version restaurée pendant l’été. Encore sous le charme, le cinéaste explique les raisons de ce premier choix.

« J'ai découvert Bill Douglas, un peu comme tout le monde, au moment de la rétrospective qui a eu lieu cet été, initiée par mon distributeur UFO. Mon enfance est un film en partie autobiographique sur la relation entre un petit garçon et un militaire allemand, en Irlande, après-guerre. Ce petit garçon n’a pas de parents et est élevé par sa grand-mère.

Ca arrive assez rarement, mais de découvrir ce film qui est le premier de la trilogie, c’était comme une bouffée d’air. Découvrir au auteur dont je n’avais jamais vu aucun film et découvrir une forme de cinéma très novatrice, très pure, dans un rapport à la mise en cène, au découpage, au jeu des non-comédiens qui est absolument bouleversant…

La publicité parlait de diamant brut, et c’est exactement ça. Pour moi, c’est une des découvertes de l’année les plus fortes, tous formats confondus. »

Découvrir le trailer de la trilogie :

Renoir et Le Passé éliminés de la course aux Oscars

Posté par vincy, le 20 décembre 2013

La liste des films en lice pour l'Oscar du meilleur film en langue étrangère ne comporte plus que 9 titres sur les 76 qui ont été soumis au comité de l'Académie.

La France n'a pas été retenue avec son film Renoir de Gilles Bourdos. Le passé comme le film saoudien Wadjda, considérés comme favoris, ont aussi été snobés.

Des 9 films qu'il reste, il n'y en aura que 5 dans la liste finale, essentiellement des films présentés en avant-première à Berlin et à Cannes.

Alabama Monroe (Belgique) de Felix van Groeningen

La femme du ferrailleur (Bosnie-Herzégovine) de Danis Tanovic

L'image manquante (Cambodge) de Rithy Panh

La chasse (Danemark) de Thomas Vinterberg

D'une vie à l'autre (Allemagne) de Georg Mass

The Grandmaster (Hong Kong) de Wong Kar-wai

Le grand cahier (Hongrie) de Janos Szasz

La grande bellezza (Italie) de Paolo Sorrentino

Omar (Palestine) d'Hany Abu-assas