Mon film de l’année 2015 : La chambre interdite de Guy Maddin

Posté par MpM, le 28 décembre 2015

la chambre interdite

S’il ne faut retenir qu’un seul film de l’année 2015, c’est forcément le film-somme de Guy Maddin (coréalisé avec Evan Johnson), cette Chambre interdite qui convoque rien de moins que les fantômes des films perdus des grands cinéastes du passé, de Murnau à Hitchcock en passant par Ford ou Lang. A la fois romanesque et irrévérencieux, fantastique et baroque, gonflé et sublime, il emporte le spectateur dans un foisonnement d’histoires emboîtées les unes dans les autres et dont les échos se répondent de séquence en séquence. Une baignoire prête pour le bain nous amène dans un sous-marin où l’apparition soudaine d’un Forestier nous fait basculer dans une forêt où des brigands ont enlevé une jeune femme qui…

On se perd avec bonheur dans ce labyrinthe aux dédales à la fois déroutants et d’une grande cohérence qui propose un voyage dans le cinéma des origines dont il emprunte une partie de l’esthétisme : images déformées et tremblantes, lumières vacillantes, inserts et cartons dignes du cinéma muet, expressionnisme, surimpressions, clair-obscur, auréoles noires autour de l’image, bords flous, couleurs saturées… C’est une splendeur visuelle constamment renouvelée, aux confins de l’expérimentation radicale et de la réinvention inspirée.

Avec cette boulimie gourmande à la fois scénaristique et visuelle, Guy Maddin et Evan Johnson touchent à l’essence même du cinéma qui est de raconter des histoires, imaginer des situations, animer des personnages, créer des interactions, faire des clins d’œil au spectateur et multiplier les niveaux de lecture comme autant de poupées russes. Ce qui se joue, c’est au-delà d’un simple un film, une véritable prise de position artistique, presque un manifeste pour réaffirmer ce qu’est le cinéma et d’où il vient.

Voilà pourquoi notre année 2015 gardera l’empreinte de ce voyage onirique et sensoriel, mais aussi spectral, aux multiples clefs et interprétations, qui revient à un principe fondamental : le plaisir brut du cinéma.

Mais bien sûr, d'autres films auront fait à leur manière cette année cinéma. Côté documentaires, on retiendra trois styles complètement différents pour évoquer les traumatismes du passé : The look of silence de Joshua Oppenheimer, L'image manquante de Rithy Panh et Une jeunesse allemande de Jean-gabriel Périot. Côté cinéma français, ce sont les premiers films qui ont fait la différence : Le grand jeu de Nicolas Pariser, Ni le ciel ni la terre de Clément Cogitore et Mustang de Deniz Gamze Ergüven. Côté cinéma européen, on a fait le grand écart entre Le fils de Saul de Lazlo nemes, qui a ouvert un nouveau chapitre du cinéma sur la Shoah, et Les milles et une nuits, projet fou de Miguel Gomes qui parle si bien de notre époque. Le cinéma latino-américain nous aura gâté avec L'étreinte du serpent de Ciro Guerra et Le bouton de nacre de Patricio Guzman. Et le cinéma asiatique avec Cemetery of splendor de Apichatpong Weerasethakul et Taxi Téhéran de Jafar Panahi. C'est dire si, une fois de plus, on aura voyagé, rêvé, réfléchi et traversé des quantités d'émotions complexes par la simple magie d'un écran éclairé dans une salle obscure.

Mon film de l’année 2015 : Star Wars, épisode VII: Le réveil de la force de J.J. Abrams

Posté par wyzman, le 27 décembre 2015

star wars le réveil de la force épisode 7 han solo harrison ford

Dix ans après La Revanche des Sith, La Force a à nouveau frappé dans les salles de cinéma. Et il faut reconnaître que cet acte marquera l'histoire du cinéma pendant au moins une décennie. En effet, s'il ne faut retenir qu'un seul film de toute cette année 2015, c'est sur Le Réveil de la Force que mon choix se porte. Premier volet d'une nouvelle trilogie, le film réalisé, scénarisé et produit pas J. J. Abrams est une véritable pépite de space opera, un genre que George Lucas himself a popularisé et auquel il a donné ses lettres de noblesse. C'était en 1977 avec le premier Star Wars, désormais intitulé épisode IV: Un Nouvel espoir.

Trente-huit ans plus tard, c'est avec un certain aplomb que J. J. Abrams s'est engouffré dans l'univers qui l'a bercé pour livrer un film intense, attendu et épique. Intense car, que l'on soit fan ou pas de la saga, l'évocation de Star Wars suscite de vives réactions, bonnes ou mauvaises. Attendu car Star Wars figure aujourd'hui encore parmi les 3 sagas les plus rentables de l'histoire et que son influence dans la pop culture n'est plus à démontrer. Épique car pendant 135 minutes, le réalisateur de Super 8 nous envoie bien au-delà du septième ciel : aux confins de l'espace grâce à des scènes d'action franchement brillantes.

Les détracteurs du film (et de la saga) évoquent un marketing abject, du fan service à peine masqué et une pâle copie de l'épisode 4. Certes, il y a un peu de vrai dans tout cela. Mais c'est également là que l'on retrouve le génie du jeune Abrams. Plus que conscient de la valeur de la saga pour l'industrie du spectacle, celui-ci a repris les étapes clés de la première trilogie pour les déconstruire, les arranger à sa sauce et faire un film qui parle aux plus anciens, aux novices et aux fans de demain. Avec son casting multigénérationnel et où la diversité se voit, Le Réveil de la Force n'est pas un simple blockbuster made in Disney mais bien un événement auquel personne n'a pu échapper.

Entre cette héroïne qui émerge, cet acolyte noir et en vie, ce boy-scout pas si présent que ça et ces parents qui se remettent en question, Star Wars 7 fait preuve d'une modernité déconcertante voire attendrissante. Doté d'une philosophie bien à lui, où la limite entre bien et mal est moins christique que par le passé, Le Réveil de la Force est un énorme divertissement et un gigantesque spectacle dans lequel la magie opère. Les dialogues semblent d'un autre temps mais le tout est visuellement futuriste. Et c'est une chose que l'on ne peut pas enlever au bébé de J. J. Abrams ! C'est d'ailleurs parce qu'il ne réalisera pas les deux prochains volets que l'on peut décemment dire que cet épisode VII est le film de sa vie, l'œuvre dont le public se souviendra à jamais. Plus encore, c'est un bijou visuel qui renferme tout l'univers créé par George Lucas, le père spirituel de J. J. Abrams, et la pâte de ce dernier.

Que l'on ait aimé ou simplement eu envie de voir ce Star Wars 7, il n'en demeure pas moins le film de l'année, celui qui a dynamité comme jamais le box office et remis au goût du jour une saga que l'on trouvait jusqu'à il y a peu vieille et ringarde. Drôle, fantastique et empli d'une nostalgie et d'une volonté de faire plaisir assumées et revendiquées, Le Réveil de la Force clôt avec brio une année 2015 inoubliable.

Mon film de l’année 2015: 99 Homes de Ramin Bahrani

Posté par cynthia, le 26 décembre 2015

Dans un épisode de la série Ally McBeal de David E Kelley, un personnage dit à Ally que "si nous repensons à l'année qui s'achève sans rire ni pleurer, c'est qu'il s'agit d'une année perdue!" Tant de rire et (surtout) tant de larmes que laisse 2015 en guise de souvenir. Notre pays a été ébranlé de part et d'autres, nous touchant en plein cœur mais aussi nous révélant que nous étions bien plus fort que ce que nous pensions. Si la vie a été difficile en cette année, le septième art lui est comme chaque Français... toujours debout!  Malgré la dureté de 2015, ce n'est pas une comédie que j'ai choisie, ni un orgasme visuel comme l'année dernière mais un film social qui rappelle comme le monde peut être égoïste et inhumain lorsqu'il est question d'argent. 99 Homes c'est l'art du comment un homme bien sous tous rapports perd son âme afin de survivre dans une Amérique inquiétante de vérité!

Le film est tenu par un scénario qui prend aux tripes et met en scène un duo incroyable à l'écran: Andrew Garfield doux et qui amène l'empathie, Michael Shannon et sa gueule de gros dur qui nous rend haineux tend il interprète l'indifférence et la méchanceté avec brio (monsieur a été nommé aux prochains Golden Globe).

La scène qui m'a marqué à jamais reste celle où Dennis (Andrew Garfield) est contraint de mettre un vieillard handicapé et couvert de tuyaux à la rue:

"- Vous avez quelqu'un chez qui aller?

- Euh...non...ma femme est morte...je n'ai plus personne depuis longtemps..."

Pendant qu'on vide sa maison, on le dépose sur la pelouse aux yeux de tous. Puis on le laisse là, entouré par ses effets personnels et devant ses voisins effarés. Ramin Bahrani s'est inspiré de faits réels pour son film...de quoi faire froid dans le dos!  C'est donc cette douleur qui m'a plu en 2015, celle du personnage d'Andrew Garfield en perpétuel combat entre le bien et le mal, entre ce qu'il faut faire et ce qu'il doit faire. Un long-métrage captivant qui vous marque à tout jamais.

Grand gagnant de Deauville 2015, 99 Homes n'a pourtant pas eu la chance de sortir dans les salles obscures et n'est disponible qu'en VOD.

Mon film de l’année 2015: Mad Max: Fury Road de George Miller

Posté par geoffroy, le 25 décembre 2015

Mon coup de cœur est en fait un double coup de cœur. De deux cinémas diamétralement opposés qui, au détour d’une même thématique élevée au rang de profession de foi, se croisent comme pour mieux se contempler. Car et au-delà de leur forme, de leur agencement ou de leur proposition narrative bien distincts, mon choix se justifie avant tout par le geste qui les a enfantés.

La quête, alors identique, émane d’un besoin viscéral d’existence via un enracinement aussi bien géographique – topologique – qu’ontologique. L’un et l’autre se fondent pour ne plus former qu’un paysage-monde à l’étalement infini. À la fureur du premier répond la méditation du second dans une même communion avec l’espace arpenté. Ce faisant, les deux films créent les conditions d’un territoire cinématographique totale à la puissance d’invocation rare.

Alors oui, pour toutes ces raisons Mad Max : Fury road de George Miller et Jauja de Lisandro Alonso sont mes deux coups de cœur de cette année.

Edito: « La vie c’est comme un cornet de crème glacée »

Posté par redaction, le 24 décembre 2015

Noël arrive à temps. Pas qu’on soit forcément enthousiastes de subir les polémiques et "enguirlandages" de famille, de se réjouir des kilos supplémentaires pris dans les hanches, de s’affoler à l’idée d’avoir dépensé trois semaines de vacances en une soirée de cadeaux (dont certains seront revenus le lendemain au profit du bénéficiaire). Sans parler de tous ces films souvient mièvres où le sapin fait office de médiateur ou d’entremetteur. Mais, comme dirait Capra, La vie est «belle ».

Bah oui, franchement, nous sommes en vie. Comme le disait Charles Schulz, le créateur de Snoopy et des Peanuts, "La vie c’est comme un cornet de crème glacée que vous devez le lécher un jour à la fois." Oui, Forrest Gump n’a rien inventé. Et après cette année terrible – des dessinateurs assassinés, l’ascension de Donald Trump, le tremblement de terre au Népal, les buzz débiles sur le web, genre la bite de Justin Bieber, les attentats du 13 novembre à Paris, les sales conditions de vie des réfugiés d’orient et du sud, la palme d’or à Dheepan, les terrasses au mois de décembre hashtag Cop 21, la destruction de Palmyre, les spoilers de Star Wars, la pauvreté qui progresse, et on en passe – et bien après cette année terrible, on a tous besoin d’élixirs et d’ivresse, de résurrection du bonheur, d’heures de fantaisie, de cyber-pause, de poésie, de silence, d’élans du cœur…

On peut aussi aller au cinéma. Se laisser étreindre par les images, séduire par les stars, s’évader par l’illusion. Mais oui, Noël arrive à temps pour rembobiner une année pourrie et, plutôt qu’un remake, écrire une année originale, flamboyante, positive, enrichissante, bref, le film de notre vie. Ou au moins une belle séquence.

Et pour citer de nouveau Maître Schulz, "Tout ce dont vous avez besoin c’est d’amour. Mais un peu de chocolat de temps en temps ne fait pas mal."