Les films de Cannes brillent dans les festivals en Europe

Posté par vincy, le 22 novembre 2014

snow therapy force majeure amour fou party girl cannes 2014

Trois festivals en Europe ont récemment couronné des films en sélection officielle au dernier Festival de Cannes. Particulièrement significatif, cinq films de la sélection Un certain regard ont récolté de nouveaux lauriers.

Le Festival du cinéma européen de Séville (Espagne), qui se tenait du 7 au 15 novembre, a remis son Giraldillo d'or à Force majeure (Snow Therapy) du suédois Ruben Östlund, qui a également reçu le prix du meilleur scénario Le film avait déjà le Prix du jury Un certain regard à Cannes. Il est en course pour le European Film Award du meilleur film. Il sort le 25 janvier 2015 en France.
Le jury présidé par le réalisateur espagnol Carlos Vermut a donné le Giraldillo d'argent L'institutrice de Nadav Lapid, qui avait été présenté à la Semaine de la critique à Cannes. Grand prix du jury sur la Croisette, Les Merveilles d’Alice Rohrwacher a reçu le Prix spécial du jury et le prix de la meilleure actrice pour Maria Alexandra Lungu (ex-aequo avec Arielle Holmes dans Heaven Knows What).
Autre film cannois primé,  Mr Turner: prix du meilleur réalisateur pour Mike Leigh et prix du meilleur acteur pour Timothy Spall, déjà primé pour son interprétation à Cannes. Avec Leviathan, prix du scénario sur la Croisette, le russe Andrei Zvyagintsev a été distingué pour la photographie.
Le prix du public a été décerné au film italien de Paolo Virzi, Les Opportunistes, sorti cette semaine en France. Rare film non cannois à avoir été couronné. D'autant que c'est le Grand prix Un certain regard, White God du hongrois Kornel Mundruczo qui a emporté le Prix Eurimages de la meilleure coproduction européenne.

Pas très loin de l'Andalousie, le Festival du film de Lisbonne et d'Estoril (Portugal) se tenait du 7 au 16 novembre. Amour fou de Jessica Hausner, sélectionné à Un certain regard en mai dernier, a remporté le Prix du meilleur film. Le jury a aussi récompensé Phoenix de l'Allemand Christian Petzold (qui avait reçu le prix de la critique internationale à San Sebastian) et Heaven Knows What des Américains Joshua et Ben Safdie (primé à Séville, Venise et surtout Grand prix à Tokyo). Ingrid García Jonsson a été choisie comme meilleure actrice (La Belle Jeunesse de Jaime Rosales, qui était lui aussi dans la sélection Un certain regard à Cannes. L'actrice a été récemment primée pour son interprétation à Cinespana à Toulouse.

Enfin, en Europe centrale le Festival international du film de Bratislava (Slovaquie), du 7 au 14 novembre, a distingué le cinéma français. Le Grand Prix de la compétition internationale a sacré Marie Amachoukeli, Claire Burger et Samuel Theis pour leur premier long métrage Party Girl. Angélique Litzenburger est repartie de son côté avec le prix d'interprétation féminine. A cela ajoutons le Prix du jury étudiant. Le film cumule les lauriers: prix d'interprétation (pour l'ensemble de ses acteurs) par le jury d'Un Certain Regard et Caméra d'or au Festival de Cannes, et le Grand prix au Festival du film de Cabourg. Il est aussi en lice pour le European Film Award du meilleur premier film.

Le jury de Bratislava a donné le prix de la meilleure réalisation à Nguyen Hoang Diep (Flapping in the Middle of Nowhere) et le prix du meilleur acteur à Fabrício Boliveira (Brazilian Western).

Cannes 2014 : qui est Jessica Hausner ?

Posté par MpM, le 16 mai 2014

jessica hausnerRISE LIKE A PHOENIX

Est-ce le fait d'avoir suivi des études de psychologie avant d'intégrer l'académie du Film de Vienne ? Est-ce parce qu'elle a eu un certain Michael Haneke comme professeur, avant de travailler auprès de lui comme scripte sur Funny games en 1997 ? Ou est-ce encore d'avoir grandi en Autriche, dans une société qu'elle qualifie "du trompe-l'oeil et de l'à-plat permanent" et dont elle veut "montrer les abimes" ? Toujours est-il que le cinéma de Jessica Hausner porte en lui la volonté de montrer l'envers des choses et des êtres, de capter les moments où l'on croit saisir le monde avant qu'il ne nous échappe.

Dès 1996, la jeune réalisatrice se fait remarquer avec son court métrage Flora primé à Locarno. Puis c'est le moyen métrage Inter-view (portrait d'êtres décalés et solitaires) qui lui vaut une mention de la Cinéfondation à Cannes. Jessica Hausner affirme son ambition de "décrire le déséquilibre et l'arbitraire", qu'elle poursuit avec son premier long métrage, Lovely Rita. Avec une précision chirurgicale, le film suit une adolescente à la dérive, solitaire et paumée, qui s’enfonce peu à peu dans le drame. Sélectionné à Cannes en section Un Certain Regard, il marque les esprits avec son montage aux ruptures marquées et sa vision sans fard d’une société malade de son incommunicabilité et de sa violence diffuse.

En parallèle, Jessica Hausner fonde la maison de production Coop 99 avec d’autres jeunes talents du cinéma autrichien comme Barbara Albert, Antonin Svoboda et Martin Gschlacht. Devenir productrice lui permet de "dépasser le clivage entre les aspects artistiques et financiers", explique-t-elle, revendiquant une véritable "économie du cinéma" tout au long du processus de production.

En 2004, la jeune réalisatrice est de retour sur la croisette avec Hôtel, un thriller paranoïaque et claustrophobe qui réjouit la critique. Toujours précise dans sa mise en scène, Jessica Hausner confirme son sens du cadre (au cordeau) et son regard acéré sur la nature humaine. Son troisième long métrage, Lourdes (prix FIPRESCI à Venise en 2009), a en commun avec les précédents de mettre en scène un personnage féminin ambigu dans une société oppressante. Sylvie Testud campe une jeune femme paralysée qui prend part à un pèlerinage et guérit miraculeusement. Jessica Hausner observe froidement le microcosme des pèlerins et les réactions de chacun face à un événement d’ordre inexpliqué. Non dénué d’humour noir, le film poursuit le portrait peu amène de sociétés étonnamment rigides où règnent en maître l’inquiétude, la complaisance et la solitude.

Trop rare, la cinéaste met cinq ans à monter son projet suivant, Amour fou, à nouveau sélectionné à Cannes en section Un Certain regard. Sur le papier, le sujet laisse quelque peu perplexe, puisqu’il s’agit du double suicide de l’écrivain von Kleist et de son amie Henriette Vogel. Mais avec Jessica Hausner aux manettes, plus que du mélodrame ou des paillettes, c'est la promesse de retrouver un peu de la noirceur romantique, de la soif d’absolu et de l’essence tragique de Kleist qui nous attend.