Truman fait son show aux Goyas

Posté par vincy, le 8 février 2016

Pour leur 30e édition, les prix Goyas, les César espagnols, ont fait un triomphe à la comédie dramatique de Cesc Gay, Truman. C'est la première fois que le cinéaste remporte les prix de meilleur film et meilleur réalisateur. Révélé par Krampack en 2000 (sélectionné à Cannes, nommé comme meilleur nouveau réalisateur et meilleur scénario), on lui doit les films En la ciudad (nommé au scénario et la la réalisation) et Les hommes de quoi parlent-ils?. Truman sort en France le 6 avril, distribué par La Belle Company. Il s'agit de l'histoire de Julian, un acteur argentin vivant à Madrid, atteint d'un cancer en phase terminale. Il reçoit la visite inattendue de son ami d'enfance, Tomas, qui va l'accompagner pendant quatre jours intenses pendant lesquels il devra trouver un nouveau propriétaire pour son chien, Truman.

Truman a également récolté le prix du meilleur scénario original, du meilleur acteur (l'argentin Ricardo Darin, pour la première fois récompensé après trois nominations infructueuses) et du meilleur second-rôle masculin (Javier Camara, déjà "goyaisé" comme meilleur acteur en 2014, trois autres fois nommé comme meilleur acteur une fois comme meilleur second rôle, et une fois comme meilleur espoir).

Les prix Goyas ont aussi récompensé l'acteur Daniel Guzman pour A cambio de nada (meilleur réalisateur pour un premier film, mais aussi meilleur espoir masculin pour Miguel Herran), Un dia perfecto (meilleure adaptation), Nadie quiere la noche (meilleure musique, meilleurs décors, meilleurs costumes, meilleurs maquillages), Palmeras en la nieve (meilleure chanson, meilleure direction artistique), El desconocido (meilleur montage, meilleur son), Un otono sin Berlin (meilleur espoir féminin pour Irene Escolar, qui a pourtant 12 ans de carrière derrière elle) et Anacleto: agente secreto (meilleurs effets spéciaux).

La jeune comédienne Natalia de Molina (Techo y comida) a été sacrée meilleure actrice avec son personnage de mère célibataire sans emploi, tandis que la vétérane Luisa Gavasa a été distinguée comme meilleur second rôle féminin pour son rôle dans La novia (également récompensé pour l'image).

Dans les autres catégories, les professionnels espagnols ont récompensé l'excellent El Clan de Pablo Trapero (meilleur film hispano-américain) et Mustang de Deniz Gamze Ergüven (meilleur film européen. Atrapa la bandera a reçu le prix du meilleur film d'animation tandis que Suenos de sal a été couronné par le Goya du meilleur documentaire. Enfin, un hommage a été rendu au scénariste et réalisateur Mariano Ozores, auteur de près de 100 films ayant totalisé 90 millions de spectateurs.

Pour le reste, dans cette période si particulière en Espagne (le nouveau gouvernement n'est toujours pas formé), les Goyas n'ont pas manqué à leur tradition de tribune engagée en présence de plusieurs premirrs ministres éventuels.

Le palmarès de Venise confirme la grande forme du cinéma latino-américain

Posté par vincy, le 14 septembre 2015

Le cinéma latino-américain a clairement marqué son empreinte dans le grand chelem annuel Berlin-Cannes-Venise.
A Berlin, les chiliens avaient emportés la mise: Grand prix du jury pour El Club de Pablo Larraín, prix du scénario pour Patricio Guzmán (Le bouton de nacre) et Teddy Bear pour Nasty Baby de Sebastián Silva, auxquels on ajoute un Ours d'argent Prix Alfred Bauer pour le guatémaltèque Jayro Bustamante (Ixcanul Volcano) et le prix du public dans la section Panorama pour La seconde mère de la brésilienne Anna Muylaert.
A Cannes, ce fut le prix du scénario pour le mexicain Michel Franco (Chronic), la Caméra d'or (en plus de trois autres prix à la Semaine de la critique) pour le colombien César Augusto Acevedo (La tierra y la sombra), le prix CICAE de la Quinzaine des réalisateurs pour un autre colombien, Ciro Guerra (El Abrazo de la Serpiente), le Grand prix Nespresso de la Semaine de la critique et le prix Fipresci pour l'argentin Santiago Mitre (Paulina) et enfin le prix L'oeil d'or pour le documentaire chilien Allende, mi Abuelo Allende de Marcia Tambutti.

A Venise, ça n'a pas fait exception. Un Lion d'or (Desde Alla de Lorenzo Vigas, ignoré par Cannes), un Lion d'argent du meilleur réalisateur (Pablo Trapero pour El Clan), un prix spécial du jury dans la section Orizzonti (Neon Bull de Gabriel Mascaro), soit respectivement des cinéastes venus du Venezuela, d'Argentine et du Brésil (tout le palmarès de la 72e Mostra de Venise).

Premier film, premier vénézuélien en compétition, premier Lion d'or latino-américain

Pour Venise, il s'agit d'une première. C'est la première fois qu'un film latino-américain reparte avec son prestigieux Lion d'or. On peut étendre cet exploit aux deux autres grands festival tant le "phénomène" est rare: Berlin a récompensé d'un Ours d'or un film péruvien en 2009, deux films brésiliens en 1998 et 2008 et Cannes n'a décerné sa Palme d'or à un film latino-américain qu'en 1962 (Brésil).

Le réalisateur vénézuélien Lorenzo Vigas a donc frappé fort avec son premier long métrage Desde Alla (c'était la première fois qu'un film vénézuélien était retenu dans la compétition vénitienne). Doublé avec le Lion d’argent du meilleur metteur en scène au cinéaste argentin Pablo Trapero, le palmarès du jury présidé par le mexicain Alfonso Cuaron conforte la vision d'Alberto Barbera, directeur du festival de cinéma de Venise, qui avait confié au journal Le Monde que l’Amérique latine lui semblait aujourd’hui "le continent des plus grandes promesses cinématographiques."

Aux antipodes du cinéma français: Luchini et Leborne

Pour les festivaliers, cependant, le palmarès laisse un goût amer. De nombreux favoris de la critique sont complètement absents (Rabin, The Last Day de l’Israélien Amos Gitai, Sangue Del Moi Sangue de Marco Bellochio, pourtant prix de la critique internationale, Francofonia d’Alexandre Sokourov). Et que dire de deux prix - Fabrice Luchini pour l'interprétation, Christian Vincent pour le scénario - pour un même film, certes français, L'hermine, qui paraissent disproportionnés dans un tableau d'honneur aussi restreint? Luchini comme Valeria Golino (prix d'interprétation féminine) remportent là les deux plus grands prix de leur carrière respective. Les deux Coupes Volpi viennent consacrer le talent de stars confirmées, à l'inverse du prix d'interprétation dans la section Orizzonti, qui a mis en lumière Dominique Leborne, dans son propre rôle pour sa première apparition au cinéma, entouré de sa famille, dans le film Tempête de Samuel Collardey, prévu dans les salles en février 2016.

L'audace made in USA

L'audace, et peu importe ce qu'on pensera des films, était donc du côté latino-américain, mais pas seulement. En récoltant le Grand prix du jury, Anomalisa de Charlie Kaufman et Duke Johnson, un dessin animé "houellebecquien" réalisé en stop-motion, se déroulant une nuit dans un grand hôtel, le cinéma américain a prouvé une fois de plus sa capacité d'inventivité. Ici, le personnage principal est dépressif, terriblement seul, dégoûté de lui-même et révulsé par le monde capitaliste qui l'entoure. Il faut ajouter le double prix pour Brady Corbet et son premier long métrage The Childhood of a Leader. Sélectionné dans la section Orizzonti, le film, avec Robert Pattinson, Stacy Martin, Liam Cunningham et Berenice Bejo, a gagné le Prix Luigi de Laurentis (l'équivalent de la Caméra d'or) et le prix de la mise en scène Orizzonti. Brady Corbet, jeune acteur remarqué dans Sils Maria, Eden, Snow Therapy et Saint Laurent, s'est librement inspiré d'une nouvelle de Jean-Paul Sartre, Le mur.

Pas de doute, sur la lagune cette année, c'était à l'Ouest qu'il y avait du nouveau.