Dinard 2015: le jury et le public plébiscitent « Couple in a Hole »

Posté par vincy, le 3 octobre 2015

Le deuxième long métrage du belge londonien Tom Geens, Couple in a Hole, a reçu les faveurs du jury du 26e Festival du film britannique de Dinard, présidé par Jean Rochefort, avec le Hitchcock d'or du meilleur film et le Hitchcock du meilleur scénario, ainsi que celles des festivaliers avec le Hitchcock du Public.

Le film, déjà présenté aux festivals de Toronto et Zurich, est l'histoire de deux Britanniques (Paul Higgins, Katie Dickie) qui vivent comme des bêtes sauvages dans un trou creusé à même le sol d’une forêt. Moins d’un an auparavant, ils ont tout perdu dans un terrible incendie. En état de choc depuis le drame, le couple se terre, en rupture totale avec la société… Mais un couple de français (Jérôme Kircher, Corinne Masiero) cherche à les aider.

Même si la fin laisse perplexe, Couple in a Hole est une allégorie de la dépression nerveuse post-traumatique chez un couple. Tragique et naturaliste, le film est une immersion dans le psyché d'un homme et d'une femme endeuillés qui préfèrent se couper du monde plutôt que d'affronter la réalité.

Le jury a décidé de donner deux mentions spéciales à Departure d'Andrew Stegall. l'une pour le film, l'autre pour les trois acteurs principaux, Juliet Stevenson, Alex Lawther et le jeune français Phénix Brossard, qu'on reverra bientôt dans Chocolat avec Omar Sy.

Il y a deux points communs entre ces deux films: ils ont été tournés dans la région Midi-Pyrénées et la nature est un personnage à part entière. Et aucun de ces films n'a de distributeur en France.

Le Hitchcock du meilleur court-métrage est décerné à After the End de Sam Southward. Récompensant un film ayant déjà un distributeur, le Coup de coeur de la Règle du jeu est revenu à 45 Years, d'Andrew Haigh, film de clôture du festival projeté juste après la cérémonie du palmarès. Le film avait déjà été primé à Berlin pour ses deux acteurs, Tom Courtenay et Charlotte Rampling.

Enfin le Hitchcock d'honneur récompense l'écrivain et scénariste Hanif Kureishi, qui faisait sa Masterclass cet après-midi en compagnie de Roger Michell.

Dinard 2015: quand les couples s’isolent du monde…

Posté par vincy, le 2 octobre 2015

Deux films présentés hier au 26e Festival du film britannique de Dinard abordaient une thématique similaire, avec un traitement radicalement opposé. Couple in a Hole de Tom Geens et Hide and Seek de Joanna Coates ont en commun l'histoire de couples qui se mettent en retrait du monde.

couple in a hole

Tom Geens a tourné son film essentiellement en France pour une histoire tragique et sacrificielle où un couple écossais vit dans un trou, en pleine forêt, se nourrissant de plantes, de lapins chassés ou de vers grouillants. Couple in a Hole nous enferme dans cette nature protectrice, bienfaitrice mais aussi périlleuse: l'homme est parfois contraint de revenir dans le monde moderne (pour acheter des médicaments), la femme reste "enterrée" dans cette caverne puante et primitive. Cet isolement sert d'allégorie à une dépression psychologique suite à un traumatisme violent. Ici, le couple ne cherche plus à être en contact avec les autres, ne veut plus être connecté, et pense se suffire à lui-même en revenant à l'état primal. Ils s'aiment, partagent la même douleur, et cela leur suffit. Comme s'il était impensable de survivre à un deuil autrement qu'en s'enfermant dans une souffrance irrationnelle... Couple in a Hole, c'est un couple qui se désagrège parce qu'il n'envisage plus de vivre comme avant, après la tragédie qui les a frappés.

hide and seek

A l'inverse, avec le plus enthousiasmant Hide and Seek (Cache-cache), Joanna Coates opte pour l'utopie et la liberté. Avec son scénariste et acteur Daniel Metz, ils ont imaginé le couple dans différentes variations. Deux hommes, deux femmes, quatre possibilités (au minimum). Désireux de se couper de la société et de ses conformismes, d'un système et des contraintes qui en découlent, les quatre jeunes gens se réfugient dans une maison de campagne pour une durée indéterminée. Ils vivent en communauté, sans médias, avec pour rares occupations des jeux et des créations artistiques. Du vin, de l'art et du sexe, voilà la vie idéale selon le film. Le sexe, il y en a. Tout le monde couche avec tout le monde, par deux le plus souvent. Il n'y a plus de genre, plus d'orientation. Homo, hétéro peu importe, et c'est sans doute là le pari le plus audacieux et le plus intéressant du film, qui jamais ne revient sur le chemin des conventions ou de la morale. La chair est un accès au paradis. Il s'agit de se libérer (s'émanciper) en désirant, aimant l'autre sans préjugés. Ni couple, ni trouple, ni simple échangisme orgiaque: c'est un quatuor harmonieux qui va se construire, pour l'éternité. Les couples, ici, coupés du réel, s'épanouissent en partageant l'essentiel. Cet hédonisme, idéaliste, nous interpelle: et si l'amour était infini, à condition de se dépasser et de larguer notre éducation comme notre passé?

A travers ces deux films, le cinéma anglais, dans un registre dramatique ou dans un genre plus poétique, mais tous les deux naturalistes, transgresse quelques tabous et nous interroge sur notre capacité à dépasser nos limites, pour le pire ou pour le meilleur.

Dinard 2015: jury, compétition et avant-premières

Posté par vincy, le 1 septembre 2015

dinard 2015Le 26e festival du film britannique de Dinard (30 septembre-4 octobre) s'ouvrira avec Up & Down (A Long Way Down), dernier film de Pascal Chaumeil, décédé ce week-end. Cette comédie très britannique avait été présentée à Berlin en 2014. Une comédie noire et drôle avec Pierce Brosnan, Toni Collette et Imogen Poots, quoi de mieux pour donner le tempo à un programme chargé et varié?

Jury

Présidé par Jean Rochefort - la classe - le jury sera composé des actrices françaises Alexandra Lamy, Emma de Caunes, Mélanie Doutey, de l'actrice belge Virginie Efira, de l'actrice britannique Amara Karan (A bord du Darjeeling Limited), du comédien français Bernard Lecoq, du réalisateur britannique Julien Temple et du producteur Bertrand Faivre.

Compétition

On ne connait que 5 des 6 films en compétition. Mais  il y a un des films anglais les plus attendus de l'année: Kill Your Firends d'Owen Harris, avec Nicholas Hoult, Ed Skrein, James Corben et Rosanna Arquette. Les quatre autres films déjà connus pour la compétition sont: Just Jim de et avec Craig Roberts et aussi Emile Hirsch ; Departure d'Andrew Stegall, avec Juliet Stevensen et Alex Lawther ; American Hero de Nick Love avec Stephen Dorff et Eddie Griffin; et Couple in a Hole de Tom Geens, avec Paul Higgins et Jérôme Kircher.

Avant-premières

Outre Up & Down en ouverture, 19 films autres films seront présentés aux festivaliers: 45 Years d'Andrew Haigh, avec Charlotte Rampling et Tom Courtenay (double prix d'interprétation à Berlin cette année), Hide and Seek de Johanna Coates (meilleur film anglais à Edimbourg), The Lobster de Yorgos Lanthimos, avec Colin Farrell, Rachel Weisz, Ben Wishaw et Lea Seydoux (prix du jury à Cannes cette année), Norfolk de Martin Radich  (sélectionné à Rotterdam), Still de Simon Blake (meilleur réalisateur au festival indépendant de Londres), Hector de Jake Gavin avec Peter Mullan (sélectionné au Festival d'Edimbourg), Mr. Holmes de Bill Condon, avec Ian MacKellen et Laura Linney.

Les autres avant-premières sont Birthday de Vadim Jean, Bypass de Duane Hopkins, Dough de John Hordschmidt avec Jonathan Pryce, The Ecstasy of Wilko Johnson, documentaire de Julien Temple, Gold de Nial Heery, Lapse of Honour de Rayna Campbell, Orthodox de David Leon, The Survivalist de Stephen Fingleton et Love is blind de Dan Hodgson.

Dinard projettera plusieurs films de Roger Mitchell: The Lost Honour of Christopher Jefferies et Birthday en avant premières, The Mother, Venus et Un week-end à Paris dans le cadre de l'hommage au scénariste et écrivain Hanif Kureishi. Ce dernier et Roger Mitchell feront une Master class. D'autres films scénarisés par Kureishi seront présentés: My Beautiful Laundrette et Samie et Rosie s'envoient en l'air de Stephen Frears, Mon fils le fanatique de Udayan Prasad et Intimité de Patrice Chéreau.

Dinard 2012 : Astérix et Obélix au service de Sa Majesté en avant-première

Posté par kristofy, le 7 octobre 2012

C’est le 4ème film (hors animation) avec les personnages de Goscinny et Uderzo, c’est le 3ème acteur a porter le costume de Astérix, c’est l’adaptation de 2 albums de bande-dessinée en même temps, et c’est la 1ère fois que la gaulois castagne en 3D… L’avant-première de Astérix et Obélix au service de Sa Majesté réalisé par Laurent Tirard était un des évènements de ce 23ème Festival du film britannique de Dinard, avec la présence de Guillaume Gallienne, alias Joritorax, et Valérie Lemercier. Les enfants ont rigolé durant la projection. Mais les adultes ne faisaient que sourire devant ce devoir appliqué de Laurent Tirard.

Les différences entre bande-dessinée et film :

Si le premier film de Claude Zidi montrait le meilleur mimétisme possible entre les acteurs et les dessins de Albert Uderzo, celui-ci est peut-être la transposition la plus fidèle des scénarios de René Goscinny, même si l’histoire mélange  Astérix chez les Bretons et Astérix chez les Normands. A noter que les deux, séparément, ont fait l'objet d'une adaptation en film d'animation. La liaison entre ces deux aventures est tout de même un peu artificielle : César demande le renfort des normands…mais ensuite, il n’y aura pas un seul contact entre ceux-ci et les romains. Pour le reste Astérix et Obélix au service de Sa Majesté est fidèle à presque tous les rebondissements des albums avec Jolitorax l’émissaire breton qui fait venir les gaulois pour leur "magique potion" et les normands qui veulent découvrir la peur en capturant le jeune Goudurix (Vincent Lacoste) pour apprendre la peur. Certains personnages sont cette fois totalement absent : le druide Panoramix, le barde Assurancetourix. La façon de parler des anglais et le flegme britannique à toute épreuve ainsi que leurs manières courtoises qui font l’humour de la BD se retrouvent bien transposées dans le film. Obélix-Gérard Depardieu et le nouvel Astérix-Edouard Baer forme un duo tout à fait convaincant même s'il n'est pas très fidèle à l’esprit de la BD : le premier est plus stupide et le second est moins héroïque.

Un casting all-stars :

Comme pour les précédents films, c’est le bottin mondain du cinéma français qui se retrouve au générique avec cette fois Catherine Deneuve et Fabrice Luchini (qui ne se croisent jamais), Vincent Lacoste, Dany Boon, Bouli Lanners, la surprise Atmen Kelif et aussi Charlotte Le Bon qui est l’atout charme du film (ex miss météo qu’on verra beaucoup en 2013 chez Clément Michel et chez Michel Gondry). On y remarque dans certaines séquences quelques guests célèbres comme Jean Rochefort et Gérard Jugnot (pas rancunier après l’annulation de son projet de réaliser le troisième film Astérix en Espagne), et d’autres encore qui se montrent pour dire à peine deux répliques comme Nader Boussandel. A noter qu’il s’agit de la dernière apparition au cinéma de l’acteur Michel Duchaussoy (dans le furtif rôle du chef Abraracourcix) avant son décès. Après Jamel et Gérard Darmon dans Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre et Benoît Poelvoorde dans Astérix aux Jeux olympiques, deux autres personnages principaux deviennent les moteurs à gags : Guillaume Gallienne et Valérie Lemercier avec leur savoureux accent british. Une case de la BD avec les Beatles a inspiré le générique de fin chanté par les BB Brunes. On regrettera qu'aucun acteur anglais ne fasse parti de la distribution. Le cinéma européen ce n'est pas pour maintenant.

Les nouveaux gags :

L’opus le plus drôle venait de l’humour spécifique d'Alain Chabat et de Jamel ; ici le scénario s’inspire de l’actualité la plus récente et joue aussi avec la parodie de d’autres films célèbres. On y voit des clins d’œil à Kill Bill, Star Wars et Orange Mécanique ! Plusieurs dialogues font écho à la politique sous la présidence Sarkozy avec notamment des dépenses excessives et "bling-bling" reprochées par le Sénat et la chasse aux clandestins (des sans papyrus) qui traversent la Manche. Côté gaulois on ironise sur les cheveux coiffés avec effet décoiffé, et côté breton on pourra remarquer les courbes des fesses de Pippa Middleton... La plus grande nouveauté est de s’amuser avec le sujet adulte de la sexualité. On y évoque le couple homosexuel (Astérix et Obélix sont deux hommes qui vivent ensemble avec un petit chien…), Astérix se met à draguer dans un bar, et César organise des orgies pour ses sénateurs. Sans compter le dépucelage électrique et tactile d'Obélix. Les enfants qui sont aussi le public-cible du film essaieront de comprendre ce que signifie une "orgie à emporter"… Ces différents nouveaux gags qui sont dans l’air du temps ne se substituent pas pour autant à la ligne directrice qui guide l’humour de ce film : nos personnages en provenance de la Gaule découvrent tout le charme de l’excentricité des Bretons. "To be a gentilhomme or not to be, that is the question". Reste que le film est l'une des cartouches principales pour résister à le véritable espion de sa majesté, James Bond, qui sort sur les écrans le 26 octobre, une semaine après l'arrivée d'Astérix et Obélix au service de Sa Majesté sur nos "gaulois écrans" le 17 octobre.

Dinard 2012 : Rencontre avec les deux acteurs de Good Vibrations, primé pour son scénario

Posté par kristofy, le 7 octobre 2012

Avec le film ill Manors de Ben Drew, l’autre sensation de la compétition du 23e Festival du film britannique de Dinard s'appelle Good Vibrations, second film du duo Glenn Leyburn et Lisa Barros D’Sa, qui a reçu le prix du scénario hier soir. On se retrouve dans le trouble des années 70 à Belfast : beaucoup d’irlandais auparavant gauchistes ou pacifiques prennent alors les armes pour se faire la guerre. Un homme avec peu d’argent et beaucoup de motivations décident d’ouvrir un magasin de disques sur l’avenue la plus bombardée de la ville, il veut faire partager son amour pour la musique et en particulier la country, le folk, et le reggae. Mais la révélation viendra avec le punk. Il veut vendre le disque d'un groupe local qu'il apprécie mais le groupe n’en n’a jamais enregistré… Cet homme va lui-même les emmener dans un studio et produire leur enregistrement : "il faut que tout le monde les entendent ! "

Vrai-faux biopic

Good Vibrations est presque un biopic ; son histoire est inspirée par Terri Hooley qui a contribué à faire émerger et se développer le mouvement punk à Belfast : depuis son magasin  il a ensuite fait enregistrer plusieurs groupes pour démarcher des maisons de disques qui rejettaient le punk. Du coup, il les distribuait lui-même, avec un van,organisait des concerts où quasiment personne ne venait... au début. Guidé par sa passion Terri Hooley va en même temps accumuler des dettes et risquer de mettre en péril son mariage. Pour cet idéaliste "les punks ne sont pas le problème, ils sont la solution ". L’époque change et le mouvement punk commence à s’étendre, un jour le dj-star de la radio BBC John Peel va passer à l’antenne un de ses disques et la gloire commence à arriver…Terri Hooley a fait connaître le punk nord irlandais avec Rudi, The Outcasts, The Undertones

Sur le thème de la musique adoucit les mœurs, ici le punk résonne comme un mouvement alternatif à la guerre. Le film parvient subtilement à doser humour et séquence musicale, et surtout, il délivre une énergie communicative digne des meilleurs feel-good movies.

Entretien avec Richard Dormer et Jodie Whittaker

Les deux acteurs principaux sont venus à Dinard, Richard Dormer et la craquante Jodie Whittaker (déjà connue par Attack the block) ; l’occasion de les rencontrer en tête à tête :

Ecran Noir : Jouer le le rôle d’une légende vivante comme Terri Hooley n'est-ce pas plus difficile?

Richard Dormer : Dans un certain sens, c’est plus facile en fait, car après l’avoir vu, ça donne la direction vers laquelle aller, on peut lui parler. La rencontre avec d’autres gens qui l’ont connu apporte aussi d’autres éléments sur sa façon de se comporter. J’avais une vue d’ensemble de l’homme qui était Terri Hooley, je ne partais pas de rien pour devenir lui à l’écran. C’est intéressant de s’approprier certains gestes et certaines intonations de voix tout en y apportant mon expérience de comédien.

Jodie Whittaker : Moi comme je joue sa femme, c’était aussi plus facile. Même si elle a une place très importante dans la vie de Terri Hooley, ce n’est pas cette personne qui est le sujet du film. Le scénario était vraiment fantastique parce qu'il donnait déjà des indices sur l’énergie de cette femme sur plusieurs traits de son caractère. J’ai pu proposer beaucoup de choses, j’avais plus de liberté par rapport à la façon de jouer ce personnage.

EN : Une réplique dit que "à New-York ils ont les coiffures, à Londres ils ont les pantalons, mais c’est Belfast qui est vraiment punk", Good Vibrations c’est LE film sur le mouvement punk ?

Richard Dormer : Oh certainement oui ! Mais c’est vrai qu’on n’a pas vu beaucoup de films sur ce thème. Est-ce qu’il existe d’autres films punk ?

Jodie Whittaker : Il y a Sid et Nancy, mais c’est à peu près tout.

Richard Dormer : Gary Oldman est très bon d’ailleurs en Sid Vicious.

Jodie Whittaker : D’une certaine façon Sid et Nancy c’est plus sur leur relation entre eux deux comme couple, mais ce n’est peut-être pas vraiment un film sur le punk d’ailleurs.

EN : Good Vibrations montre l’émergence du punk dans un contexte de réaction à la guerre civile en Irlande entre catholiques et protestants, et peu à peu on oublie presque cette guerre pour suivre que la musique…

Richard Dormer : Tout à fait, ça commence avec la guerre entre irlandais, mais le réalisateur ne voulait pas s’appesantir dessus. Ces combats entre ceux du nord et ceux du sud ont duré plusieurs dizaines d’années, c’est devenu malheureusement comme un cadre de vie. La guerre civile n’est pas vue comme quelque chose qui détruit la vie des gens même si on voit que ça les perturbe, les gens vivaient avec ça. Et il y a eu des jeunes pour dire "Non", ces jeunes qui malgré la guerre ont voulu suivre leurs rêves et faire ce qu’ils avaient envie de faire. Ne pas laisser la guerre t’arrêter et fais ce que tu veux, c’est cet esprit qui anime Terri Hooley toute sa vie et aussi ces jeunes groupes de punk-rock. Ces jeunes voulaient jouer leur musique et Terri Hooley voulait que tout le monde les écoute.

EN : Ici à Dinard il y a beaucoup de films où la musique est très présente, le punk dans Good Vibrations, le rap dans ill Manors, beaucoup de David Bowie dans Hunky Dory, la musique devient un élément de plus en plus important dans l’histoire racontée ?

Richard Dormer : Je ne sais pas si c’est un genre de tendance, mais si c’est le cas, on ne l’a pas du tout suivie. Le film Good Vibrations était en développement depuis quasiment dix ans. C’est juste une coïncidence je pense.

EN : Le slogan "punk is not dead" est encore d’actualité aujourd’hui ?

Richard Dormer : Si on voit le punk comme une autre manière de penser, c’est presque révolutionnaire. Le punk c’est remettre les choses établies en question, à la fois l’autorité et l’hypocrisie, c’est une affirmation de liberté.

Jodie Whittaker : Lui il est punk !

EN : Dans votre playlist quels sont vos cinq musiciens préférés ?

Jodie Whittaker : alors d’abord en n°1 Coldplay, je suis fan de Coldplay, n°2 Arcade Fire, n°3 The Tallest man on Earth, ils sont fabuleux, n°4 The White Buffalo, et en n°5 peut-être James Taylor ?

Richard Dormer : James Taylor ? vraiment ?

Jodie Whittaker : et toi ?

Richard Dormer : J’aime Coldplay aussi, Tom Waits, Cat Stevens, Snow Patrol, d’ailleurs trois des membres du groupe sont co-producteurs de ce film Good Vibrations, et voyons…

Jodie Whittaker : Rihanna !

Richard Dormer : hahaha, voyons, j’ai dit Tom Waits déjà…

Jodie Whittaker : Elliott Smith ? Elbow ?

Richard Dormer : oui, Elbow ! On a beaucoup écouté Elbow sur le tournage de ce film, ils sont très populaires en Angleterre.

EN : Good Vibrations n’a pas encore de distributeur en France, il sort quand en Angleterre ?

Jodie Whittaker : Chez nous la sortie est prévue pour janvier 2013, peut-être qu’il faudra encore attendre pour la France. Le film tourne pour le moment dans différents festivals comme ici à Dinard, celui de Belfast, celui de Karlovy-Vary, il sera au festival de Londres dans deux semaines.

Richard Dormer : Pour l’instant on a que de bons échos de ceux qui l’ont vu, il y a une good vibe avec Good Vibrations !

Dinard 2012 : Au palmarès, Shadow Dancer fait de l’ombre à ses concurrents

Posté par vincy, le 6 octobre 2012

On attendait le fantastique Ill Manors, de Ben Drew. C'est Shadow Dancer de James Marsh qui repartira du 23e Festival du film britannique de Dinard avec le Hitchcock d'or (prix du jury) et le prix du public. Le film, qui réunit Clive Owen, Andrea Riseborough, Gillian Anderson, Aidan Gillen et Domhnall Gleeson, a donc fait consensus. Ce qui est assez logique tant le film est finalement assez consensuel, même s'il n'est ni prévisible, ni formaté.

Shadow dancer est une histoire d'espionnage au moment où le gouvernement britannique tente de signer un accord de paix avec l'IRA en Irlande du nord. Une jeune femme se voit contrainte de jouer les indics pour le MI-5, alors que ses frères sont des membres actifs de l'organisation terroriste. Le film se distingue d'une part avec son esthétique, d'autre part avec son scénario. Cette jeune femme (Andrea Riseborough) qui doit jouer les agents doubles est une tache de couleur rouge (la couleur de son imperméable) dans une atmosphère fascinante, terne et pluvieuse. Les tensions et rebondissements, les trahisons et révélations ponctuent le film comme autant de pistes qui se brouillent pour attendre l'ultime plan et comprendre (ou pas) l'enjeu initial. C'est parfois confus (la fin ouvre la voie à deux interprétations) mais suffisamment bien maîtrisé pour nous interpeller du début à la fin.

Le film avait fait son avant-première mondiale au Festival de Sundance avant d'être présenté à celui de Berlin cet hiver. A celui d'Edimbourgh, Andrea Riseborough et Brid Brennan, qui joue sa mère, ont remporté le prix d'interprétation féminine. Il sortira le 2 janvier 2013 sur les écrans français.

Ill Manors, bien plus audacieux et brillant, repart avec le prix de la meilleure photo et le prix "coup de coeur", décerné par l'association La règle du jeu et lui permettant d'être diffusé dans 40 salles du Grand Ouest.

Good Vibrations de Lisa Barros D'Sa & Glenn Leyburn reçoit le prix du meilleur scénario.

Dinard 2010 : John Lennon à l’honneur

Posté par kristofy, le 9 octobre 2010

Happy Birthday John Lennon!

Il est né le 9 octobre 1940 et il aurait eu 70 ans. L’année 2010 marque en fait plusieurs anniversaires de Lennon, dont sa vie adolescente avant les Beatles est racontée dans Nowhere Boy. Il s’agissait du film d’ouverture du 21ème Festival du Film Britannique de Dinard qui en même temps avait programmé un focus sur le groupe pop le plus populaire de l'histoire.  Une séance nommée "J'écoute le cinéma" aussi spéciale que très appréciée permettait aux festivaliers d'écouter un florilège audio (monté par Gaël Coto) des œuvres marquantes des Beatles en étant confortablement installés dans des transats face à la mer.
Aujourd’hui en 2010 cela fait 50 ans que le groupe The Beatles a été formé et 40 ans qu’il a été dissout, et cela fait 30 ans que Lennon a été assassiné. Le calendrier fait bien les choses puisque la sortie française de Nowhere Boy est prévue le 8 décembre 2010 alors que John Lennon est mort le 8 décembre 1980 ! Ce biopic sur sa jeunesse avant qu’il ne soit un musicien reconnu devait être un évènement, mais malheureusement la réalisatrice Sam Taylor-Wood peine à nous passionner.

Nowhere Boy évite de parler des Beatles (le nom n'est même jamais prononcé) pour vraiment se concentrer sur un adolescent qui s’appelle John. On entendra la première mesure de la chanson Hard Day’s Night et trois autres extraits de compositions de Lennon, dont une chanson  sur sa mère, mais les autres musiques sont celles de l’époque qui ont pu l’influencer. Le film s’attache a nous raconter l’environnement dans lequel le musicien a grandi : élevé par sa tante il va découvrir alors qu’il avait été quasiment abandonné par ses parents quand il apprend enfin à connaître qui était sa mère... John est un adolescent qui découvre le rock’n roll avec Elvis Presley et Buddy Holly et commence à gratter un banjo avant de rencontrer un jeune homme de 15 ans qui s’appelle Paul qui plus tard lui présentera George…, et le groupe The Quarrymen démarre. Malheureusement cet adolescent perturbé par ses problèmes de famille, ne nous intéresse pas. Si Sam Taylor-Wood voulait ne pas l’idéaliser ni en faire un personnage attachant, elle a bien réussi.

Dinard a programmé l’excellent documentaire The US vs John Lennon où le gouvernement américain réprouve les engagements libertaires de Lennon (son opposition à la guerre du Vietnam, sa fréquentation d’activistes politiques) jusqu’à le surveiller où vouloir l’expulser. Le film avait déjà marqué il y a quelques années la mostra de Venise car il faisait alors écho à la tendance anti-Bush de l’époque. C’était aussi l’occasion de découvrir le film The Killing of John Lennon qui retrace le parcours de son assassin Mark Chapman pendant les trois mois qui ont précédé son geste fatal. Voici ce que le réalisateur Andrew Piddington nous a dit : « Quand vous faites un film biographique, il faut prendre position sur la vérité, si on s’aligne totalement dessus ou si on va vers la fiction. Ici ni métaphore ni parabole, tout ce qui se passe dans le film s’est réellement passé, et on a filmé dans les vrais endroits où ça c’est vraiment passé. Les acteurs du film ont à peu près le même âge que les vraies personnes de l’époque. L’intention n’est pas de cautionner Mark Chapman encore en prison aujourd’hui mais de rentrer dans sa tête les trois mois précédents avant qu’il appuie sur la gâchette. On avait un petit budget, tout est à l’écran, rien tourné en studio mais dans les lieux réels. Le film a été primé au festival Tribeca à New-York et a eu une nomination aux BAFTA anglais. » A mettre en parallèle avec la même histoire racontée avec quelques différences dans Chapitre 27 (produit un an après) où Jared Leto donne à voir un Mark Chapman un peu plus déséquilibré les trois jours précédents le meurtre.

Il est assez curieux que la mort de John Lennon inspire de meilleurs films que la naissance des Beatles. Pour les nostalgiques des débuts de Lennon d'avant la gloire et de la beatlesmania mondiale, le mieux est encore de (re)voir Backbeat à propos de son ami Stuart Sutcliffe (cinquième Beatles avec John, Paul, George et Pete Best) ; ou même la comédie That thing you do où quatre garçons dans le vent (inspirés des Beatles) commencent à avoir du succès…

En attendant, notez que ses anniversaires sont déjà célébrés avec la parution de l’intégrale des chansons de Lennon après les Beatles en version remasterisée : Signature Box est un coffret 11 cd disponible depuis quelques jours.

White Lightnin’ : la tentation infernale

Posté par kristofy, le 15 février 2010

whitelightnin.jpg"J’ai essayé la vie normale mais…"

L’histoire : Au cœur des montagnes Appalaches, où tout homme possède une arme et de quoi distiller de l'alcool de contrebande, vit une légende : Jesco White. De sa jeunesse trempée dans les effluves d'essence en passant par de nombreux séjours en maison de redressement ou en hôpital psychiatrique, la vie tumultueuse et incandescente de Jesco se consumait dangereusement. Pour le sauver, son père tente de lui apprendre au moins une chose dans la vie : la danse ou plutôt une version frénétique de claquettes sur de la musique country.
Propulsé sur le devant de la scène, applaudi aux quatre coins du pays, Jesco goûte à la vie et tombe amoureux. Mais, obsédé par la vengeance du meurtre son père, il réveille les démons qui sont en lui !

Notre avis : White Ligntnin’ est un de ces films dont on ne se relève pas sans en garder une empreinte profonde, sa vision hypnotise et on s’en souvient longtemps après. White Ligntnin’ est un film éprouvant, pour certains il mettra à l’épreuve votre tolérance à la violence et pour d’autres il sera une épreuve de force dont on ne sort pas indemne. Car White Ligntnin’ est une œuvre rugueuse aux abords abrupts qui ne fait pas beaucoup d’efforts pour séduire le spectateur, c’est d’abord au spectateur de faire un effort pour ne pas repousser le film. Puis progressivement on découvre l’itinéraire d’un enfant pas gâté tout en partageant ses douleurs et ses espoirs. Jesco White est un gamin qui grandit dans une enfance glauque : les vapeurs d’essence lui tourne la tête, le centre de redressement lui brutalise le corps, il se défonce le cerveau et l’asile lui transmet la folie. Heureusement que son père parvient à lui apprendre le tap-dancing au rythme d’une guitare, la seule bonne chose qui embellit son monde gris. Jesco White devenu adulte danse avec des chansons dans des bars, mais il danse aussi avec ses obsessions en bataille. Son père a été cruellement assassiné, et le poison de la vengeance fait son chemin…

Certaines scènes peuvent heurter la sensibilité de certains spectateurs. Le réalisateur Dominic Murphy lui-même avertissait le public lors du festival de Dinard où son film était en compétition, "j’espère que vous avez bien digérer votre petit-déjeuner…" Et c’est White Lightnin’ qui a été ensuite primé du Hitchcock d’or (et aussi du prix du meilleur directeur de la photographie); le film s’est imposé pour la maîtrise de sa mise en scène, le travail sur le son, les thèmes abordés. Le jury avait reconnu une œuvre de cinéma évidente avec un visuel pas ordinaire et un acteur extraordinaire.

White Lightnin’ nous raconte donc l’histoire hallucinante et hallucinée de Jesco White qui va se venger des assassins de son père après un parcours autant chaotique que psychotique. Le réalisateur Dominic Murphy a combiné en virtuose une palette de partis pris visuels et sonores très tranchés qui réussit à faire naître un certain malaise et en même temps une fascination irrésistible. Au début le rythme est plutôt lent avec des couleurs délavées et il y a beaucoup de voix-off, et on est alors les témoins de l’histoire de ce marginal. On partage les errements de Jesco White (en oubliant la performance de l’acteur Edward Hogg) et la parenthèse heureuse de sa vie quand il rencontre une femme plus âgée que lui (Carrie Fisher revenue de Star Wars est ici méconnaissable et formidable). Mais sa vie au lieu d’être une fête devient une farce puis une tragédie. Ses démons intérieurs destructeurs vont affoler une vengeance autodestructrice terrifiante. Œil pour œil comme dans la bible, vengeance et expiation. Jesco White trouvera-t-il le salut ? White Lightnin’ fait preuve de beaucoup d’audaces, c’est rare qu’un film provoque des sentiments aussi extrêmes, un éclair éblouissant de cinéma.

Dinard 2009 : des cinéastes en tous genres

Posté par kristofy, le 27 octobre 2009

Le jury du 20ème Festival du film Britannique de Dinard a choisi de récompenser le film White Lightnin’  réalisé par Dominic Murphy où la violence de Jesco White en perdition se confond avec celle d’un coin du sud des USA, et le film Jean Charles de Henrique Goldman où des immigrants brésiliens se retrouvent à Londres, mais pendant la psychose des attentats l’un d’eux va être tué par des policiers… Ce palmarès est une nouvelle illustration que le cinéma britannique semble s’interroger sur le monde et les autres bien plus que le cinéma français. Si les films en compétition étaient très différents les uns des autres ils ont tous su faire partager aux spectateurs des quotidiens des personnes plutôt que de personnages.

Le cinéaste Shane Meadows vient maintenant chaque année à Dinard, son festival préféré, où presque chacun de ses films ont été découvert ici comme Dead Man’s Shoes (grand prix Hitchcock d’or en 2004), This is England, Somers Town en clôture en 2008. Son nouveau film Le Donk & Scor-Zay-Zee est une expérience de vrai-faux documentaire tourné en seulement cinq jours sans scénario. Shane Meadows avec une caméra numérique (plus un autre caméraman et un preneur de son) a choisi comme sujet de film Le Donk (un roadie qui travaille en coulisse des concerts des Artic Monkeys) qui voudrait devenir le manager de Scorz, un copain qui fait du rap en amateur. On découvre donc un looser magnifique qui regrette que son ex-femme enceinte de lui soit heureuse avec un autre et un rappeur qui espère chanter devant des milliers de personnes. Shane Meadows réussit avec habileté à provoquer des improvisations géniales (surtout de Paddy Considine) tout en nous montrant des scènes off, en plus de l’histoire des deux personnages il y a aussi celle du film dans le film (Scorz-Zay-Zee a depuis enregistré son premier album). Le Donk & Scorz-Zay-Zee est autant un exercice de style qu’une fiction en forme de documentaire, ce mockumentaire très drôle est aussi une sorte de manifeste encourageant les apprentis-cinéastes à réaliser eux aussi un film en cinq jours…   

Les amateurs de films de genre fantastique vont attendre Moon, un premier film très maîtrisé de Duncan Jones, déjà un peu connu comme réalisateur de pub et de clip et plus connu comme étant le fils de David Bowie. Dans un futur pas si lointain les ressources d’énergie sur Terre sont épuisées alors on exploite de l’hélium 3 produit sur la Lune. Là-haut, la production est surveillée par un seul employé (Sam Rockwell) qui y travaille avec un contrat de trois ans avant de revenir. Un accident va bousculer les certitudes de cet employé qui va se rendre compte qu’il n’est pas aussi seul qu’il le croyait… Moon est un film de science-fiction du genre introspectif, avec des mouvements de caméra calmes et la musique planante de Clint Mansell, un climat propice pour partager les doutes du personnage. Après avoir été un des évènements du festival de Sundance 2009 (40 après les premiers pas de l’homme sur la Lune), Moon a aussi récolté une moisson de récompenses au festival fantastique de Stiges.

Un des réalisateurs précurseur de la vague ‘Horror made in UK’ (The Descent, Eden Lake, Wilderness, etc…) était de retour à Dinard : Christopher Smith qui nous avait épouvanté avec Creep puis avec le survival déjanté Severance nous a présenté son mystérieux Triangle. Cette fois c’est un pur film d’angoisse qui joue avec les nerfs des spectateurs. Triangle est la fois très malin et très maîtrisé, une belle surprise.

 Une séance spéciale a fait découvrir sur grand écran Lesbian Vampire Killers, une chance car le film qui aurait dû sortir en salles cet été nous arrivera en fait directement en dvd courant février 2010. Deux potes en virée arrivent dans un village maudit où à leurs 18ème anniversaire les jeunes filles deviennent des vampires lesbiennes, et justement quatre bimbos étudiantes sont venues elles aussi… Même si on est loin en dessous de Shaun of the dead, cette comédie parodique est tout de même assez jouissive (les premières quinze minutes où on découvre les personnages sont délirantes) avec son lot de gags graveleux, difficile de lutter contre des suceuses démoniaques.

Une poignée de films ont été quelque peu décevant, il faut bien le dire aussi, mais la grande majorité ont eu de nombreux échos très favorables. Pour les déceptions citons Shifty où le quotidien d’un jeune dealer de crack et ses mésaventures avec ses proches et ses clients ; Boogie Woogie film choral (avec Gillian Anderson, Heather Graham, Alan Cumming, une scène avec Charlotte Rampling…) qui critique le monde des amateurs d’art contemporain et ses clichés éculés ; et le film de clôture From time to time présenté par son réalisateur Julian Fellowes (oscarisé pour son scénario de Gosford Park) où un adolescent de 13 ans retourne au manoir familial au sortir de la guerre, sa grand-mère (Maggie Smith impériale) tente de sauver pour lui la demeure familiale et l’espoir que son père est encore vivant, mais des fantômes vont leur permettre de découvrir les secrets de leurs ancêtres…

Une jolie surprise est venue du réalisateur irlandais Lance Daly qui avec Kisses filme la vie nocturne d’une ville avec le regard de deux enfants qui font une fugue. Une fillette et son petit voisin subissent les disputes de leur famille, lui met un coup à son père pour défendre sa mère et une vitre est cassée à cause d’elle, alors ils s’enfuient ensemble. Le film commence en noir et blanc à l’image de leur quotidien gris puis doucement les couleurs arrivent au fur et à mesure qu’ils découvrent la grande ville. Ils s’amusent d’abord à dépenser de l’argent comme si c’était noël mais bientôt ils se rendent comptent qu’il va leur falloir trouver à manger et où dormir… Kisses réunit tout les ingrédients (et même les clichés) d’un film social comme seuls les britanniques savent en faire avec une situation désespérante d’où survient quand même l’espoir, mais son originalité un peu magique ne peut que remporter l’adhésion. On y entend cette jolie phrase : ‘when you kiss, you give or you take’.

L’autre belle surprise est peut-être le film le plus anglais du festival de Dinard bien qui soit réalisé par la danoise Lone Scherfig : An Education est le genre de film qui fait figure de classique instantané sur lequel on s’imagine parier pour arriver jusqu’aux Oscars (déjà un prix du public à Sundance). Il nous raconte le parcours d’une jeune fille BCBG de bientôt 17 ans qui va s’émanciper du conservatisme ambiant du Londres des années 60 encore marqué par l’après-guerre : un homme qui a dépassé la trentaine va lui faire tourner la tête et lui faire découvrir la vie comme elle la rêvait secrètement. La jeune Carey Milligan était conditionnée pour être sérieuse à l’école pour viser une prestigieuse université, mais elle va être séduite par l’aventurier Peter Sarsgaard qui lui fait découvrir le luxe et l’insouciance. Elle qui idéalise les français de Saint-Germain-des-Prés (Juliette Gréco et l’existentialisme de Sartre…) va découvrir d’un coup l’amour irraisonné (il a le double de son âge) et les conduites irraisonnables (ne pas compter l’argent, aller à l’encontre des bonnes moeurs…). Elle va transgresser beaucoup de conventions par rapport à sa famille (le père Alfred Molina voit d’un mauvais œil les étrangers sauf si ils permettent de s’élever socialement) et à son école (la directrice Emma Thompson ne veut pas entendre parler de relation intime avec un garçon pas plus que de se détourner des livres), mais l’époque du milieu des années 60 est-elle déjà prête pour être bousculée ? Le scénario très habile de Nick Hornby (inspiré d’une histoire vraie) parvient à nous faire partager les questionnements (féministes) et les envies (de belles vies) de son héroïne, ce qui fait que An Education trouve aussi un écho avec notre époque et notre adolescence.