Le tour de France des festivals : part 1, octobre-novembre 2008

Posté par MpM, le 1 octobre 2008

Le cinéma deviendrait-il être une industrie touristique comme une autre ? Pas une région, pas une ville qui ne s’enorgueillisse de son festival de films : Isère, Moselle, Basse-Normandie, Région parisienne, Haute Garonne, Pas-de-Calais… faire le tour de France en allant uniquement de festival en festival est devenu au fil des années chose possible, et même facile. Le tour des cinématographies mondiales également, puisque chaque manifestation tâche de se distinguer de ses rivales par une programmation spécifique. Rien qu’en octobre et novembre, on devrait avoir le choix entre cinéma espagnol (Toulouse), polonais (Paris), italien (Villerupt), méditerranéen (Montpellier), chinois (Paris), russe (Honfleur) ou plus largement européen (Arras, Dijon). Une diversité géographique qui se double d’une diversité thématique, avec une mise à l’honneur des seconds rôles (Allier), des films pour enfants (Vizile) et pour jeune public (Saint Quentin) ou encore des films gays et lesbiens (Paris). Au-delà des critères purement géographiques et pratiques, une seule solution pour s’y retrouver : suivre ses goûts, ses envies ou sa curiosité.

Par exemple, si vous aimez les méchants de fiction, laissez-vous tenter par la sélection du Festival du film pour enfants de Vizile (Isère) dont c’est le thème principal. Au menu, des classiques (Poil de carotte, Oliver Twist, Vipère au poing) et pas mal d’animation (La ferme des animaux, Max and co, Les trois brigands). Dans le même style, quoique destiné à un public plus adulte, la nouvelle section rétrospective et thématique du Festival Hors-écrans de Lyon propose une illustration en 7 films du terme "Sabotage". La soif du mal d’Orson Welles, Les bourreaux meurent aussi de Fritz Lang, Taxi driver de Martin Scorsese… espionnage, paranoïa et terrorisme sont au rendez-vous ! Côté personnalités, John Boorman sera à l’honneur à Arras, Colin Firth invité à Lyon, Ai Xiaoming et Hu Jie fêtés au Festival Shadows de Paris. Quant à la copie restaurée de Lola Montès, le chef d’œuvre de Max Ophüls, elle sera présentée à Dijon et à Moulins (Allier) avant sa sortie en salles début décembre.

Car bien sûr, les avant-premières sont le lot quotidien des festivals, occasion rêvée pour découvrir avant tout le monde les films qui seront sur nos écrans demain… ou, pour certains, peut-être jamais. Au choix, la caméra d’or, Hunger de l’Américain Steve Mac Queen, sera au Festival Jean Carmet des seconds rôles, le Grand Prix Un Certain regard 2008, Tulpan de Serguei Dvortsevoi, à Honfleur, Le plaisir de Chanter d'Ilan Duran Cohen à Lyon, El prado de las estrellas de Mario Camus à Toulouse, Les grandes personnes de Anna Novion à Moulins, Amour, mensonges et ballon rond de Luca Lucini à Villerupt, Magique ! de Philippe MUYL à Dijon, Pièces détachées à Saint Quentin, et ainsi de suite.

Ces multiples petits événements locaux participent à l’excellent tissu culturel du pays, où variété et qualité, cinéma populaire et films d’auteurs, curiosité et valeurs sûres permettent une offre cinématographique toujours renouvelée. Accessible au plus grand nombre, car extrêmement délocalisée et bénéficiant souvent de tarifs modestes, on pourrait parler de démocratisation si en fait il ne s'agissait pas là de résistance. Car cette diversité et cette richesse ne mettent pas les festivals de films à l’abri de la politique culturelle actuelle. Les aides allouées à chaque manifestation sont en baisse et les contraintes budgétaires menacent les plus fragiles. On connaît l’infatigable énergie déployée par les équipes organisatrices pour faire vivre leurs festivals, souvent avec peu de choses, si ce n’est enthousiasme et bonne volonté. Mais peut-être ne faudrait-il pas perdre de vue que même les cinéphiles les plus passionnés ne peuvent vivre simplement de l’amour du cinéma et de l’eau fraîche des belles rencontres.

Toronto remplacera-t-il Venise ?

Posté par vincy, le 17 septembre 2008

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Le 33e Festival de Toronto vient de s’achever avec succès. Tandis que Venise connaît la crise, la Ville Reine canadienne se pavane de ses succès. Les dates coïncidant de plus en plus, Venise se voit finalement menacée, surtout lors d’une année faible artistiquement. A côté, Toronto propose des avantages indéniables : pas de compétition, hormis ce prix du public qui, souvent, fait émerger un succès en salles, des dépenses quotidiennes moins élevées qu’en Italie pour les festivaliers, une proximité géographique avec Hollywood et New York, mais surtout l’existence du 2e marché du film, juste après Cannes.

Venise semble bien fragile tant ses Lions d’or ne se transforment pas en Oscars (malgré de bons prétendants) et sa médiatisation s’amenuise au fil des ans. La manifestation peine à faire le virage nécessaire que Toronto a entrepris il y a quelques années, en investissant dans un palais dédié à la manifestation. Pourtant, même si cela se sait moins, Venise et Toronto ont longtemps collaboré ensemble. Désormais la guerre larvée que se font les grands festivals pour obtenir les avant-premières les plus prestigieuses prend des allures de guerre de tranchée. Venise accuse Toronto de faire pression sur les producteurs américains pour obtenir des exclusivités. Et ils sont d’autant plus tentés que le voyage coûte moins cher et surtout le résultat est plus rentable, pouvant ainsi vendre leurs films aux distributeurs venus du monde entier.

Toronto avait déjà croqué Montréal et son FFM. Si dans le calendrier, Venise continue d’avancer vers septembre, la Mostra risque de se faire dévorer par le tigre ontarien. Ou l’inverse si Venise commence à sortir les griffes.  Clairement, il deviendra difficile d’accueillir des films aux mêmes dates.

Les studios misent de plus en plus sur les festivals pour lancer leurs opérations de marketing ou séduire des acheteurs. Toronto a projeté 312 films, dont 116 premières mondiales. Les producteurs français et britanniques viennent de plus en plus nombreux sur les bords du lac Ontario. Ainsi Pathé y a présenté The Duchess, avec Keira Knightley. Ironiquement, après son avant-première internationale à Toronto, le film fera le voyage… à Rome, le festival concurrent de Venise. Les français ont présenté Mesrine, La fille de Monaco, Un conte de Noël, Il y a longtemps que je t’aime, ou encore Faubourg 36.

C’est aussi à Toronto qu’on s’est arraché les droits de The Wrestler, tout juste primé d’un Lion d’or à Venise. Fox Searchlight l’a acquis pour 4 millions de $ pour le distribuer aux USA. C’est encore à Toronto que le Che de Sodebergh, présenté à Cannes, a trouvé son distributeur américain (IFC), qui devrait miser sur la Video-On-Demand.

Si le marché a montré des signes de faiblesse – crise économique, impact de la grève des scénaristes – Toronto, au contraire de Venise, a rempli son contrat. Et s’affirme un peu plus comme le rendez-vous de la rentrée, et donc la rampe de lancement pour les Oscars. C’est ce que recherchent les producteurs : un moyen efficace et rentable de donner un maximum de visibilité à leurs films. Si Toronto séduit les médias du monde entier, Venise se marginalisera.

Palmarès 

- Prix du public : Slumdog Millionaire, de Danny Boyle, suivi de More than a game, de Kristopher Belman et The Stoning of Soraya M, de Cyrus Nowrasteh
- Prix de la critique internationale : Lymelife, de Derick Martini et Disgrace, de Steve Jacobs
- Prix de la découverte : Hunger, de Steve McQueen
- Meilleur film canadien : Lost Song, de Rodrigue Jean
- Meilleur premier film canadien : Before Tomorrow, de Madeline Piujuq Ivalu et Marie-Hélène Cousineau

Venise, festival de marque(s) ?

Posté par MpM, le 2 septembre 2008

Steve Mac Queen et Isabelle HuppertEffervescence au Palais Grassi le 1er septembre aux alentours de 19h. Pour la troisième année consécutive, le groupe Gucci profite de la Mostra pour remettre un prix récompensant une personnalité internationalement reconnue pour sa contribution à la réalisation d’un film, que ce soit en tant que réalisateur, scénariste, acteur ou créateur des costumes. Une petite foule triée sur le volet se bouscule donc flûte de champagne à la main afin d’apercevoir l’heureux lauréat 2008, Steve Mc Queen (Hunger), le président du Festival de Venise, Marco Müller ou encore l’actrice Isabelle Huppert, membre du comité de sélection.

La collision avec les grandes marques n’est pas une nouveauté pour le cinéma. Tout festival qui se respecte a son lot de sponsors, et l’on croise sur le Lido un stand Lancia, un atelier de relooking L’Oréal et des dizaines de journaliste accro à la San Pellegrino, gratuitement distribuée en salle de presse. Non, ce qui surprend le plus, c’est peut-être le contraste entre l'omniprésence de ces "partenaires" et la relative "radinerie" du festival.
le pont des soupirs

En plus de l’accréditation payante, il faut payer pour avoir accès au catalogue de la manifestation et la traditionnelle sacoche aux couleurs de la manifestation n’est pas offerte aux festivaliers (comme cela se pratique dans 90% des cas). Il se raconte même dans les couloirs que les photographes choisis pour couvrir les prestigieux tapis rouge sont ceux qui ont aligné la plus grosse somme d’argent… L’accusation elle-même est suffisamment révélatrice pour ne pas avoir besoin d’être vraie : il n’a visiblement échappé à personne (ne soyons pas naifs !) qu’un Festival, qu’il soit à Venise ou ailleurs, n’est pas une organisation de bienfaisance. Quand on commence à mieux voir (et connaître) les sponsors que les artistes, il est toutefois peut-être temps de se poser des questions.

 Mais dans une ville où il a été possible à Lancia de totalement recouvrir le mythique Pont des soupirs le temps des travaux de rénovation sans sembler réellement perturber les touristes (consciencieusement et en grappes bien serrées, ils se battent même pour immortaliser ce pont réinventé dans des tons pastels pleins de promesses, finalement plus joyeux que l’original), à quoi s'attendait-on ?

Et si Nicolas Sarkozy allait voir Hunger?

Posté par vincy, le 21 juillet 2008

Nous apprenons, très matinalement, que l'actrice et réalisatrice Valeria Bruni-Tedeschi, soeur de Carla Bruni Sarkozy et donc belle-soeur du Président de la République Française, a rendu visite à Marina Petrella, ancienne membre des Brigades rouges, vivant en France depuis 15 ans et arrêtée l'an dernier.

Cette femme avait refait sa vie, en tant que mère et assistante sociale, et vivait tranquillement à l'abri de la parole donnée par François Mitterrand, qui s'était engagé à ne pas extrader ceux qui ont renoncé aux armes.

Nicolas Sarkozy a décidé de rompre cet engagement. Comme Jacques Chirac avant lui avec l'affaire Cesare Battisti.

Or, sa belle-soeur vient rendre visite à cette femme. Politiquement, ce n'est pas anodin. D'autant que les soeurs Bruni sont venues en France pour se protéger d'un éventuel enlèvement dans la famille. Bruni-Tedeschi confie au Corriere della Sera : "Je préfère ne pas parler de la rencontre car la situation est très délicate et ce n'est pas à moi de faire des déclarations publiques. Je peux seulement dire que cette personne va très mal, son poids est descendu à 40 kilos, elle ne mange plus depuis avril et elle a été placée sous perfusion."

Lorsqu'on lit ça, on ne peut pas s'empêcher de revoir les images de Hunger, le film de Steve McQueen présenté à Un Certain Regard cette année à Cannes. Une histoire de prisonnier politique faisant la grève de la faim. Des images insoutenables sur un corps en désincarnation. Le film avait reçu la Caméra d'or (meilleur premier film).

Maintenant que le décret d'extradition est signé, Nicolas Sarkozy peut toujours s'ingérer dans les affaires italiennes et demander sa grâce, cela risque de se terminer de manière fatale, avec un arrière-goût amer dans la bouche. Epidermiquement de gauche, voulant se lancer dans l'humanitaire, Carla Bruni devrait lui montrer ce film qui ne laisse pas insensible à la souffrance d'un homme, ou d'une femme, qui n'a plus rien à perdre.

Cannes en salles (seconde partie)

Posté par vincy, le 28 mai 2008

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Comme chaque année, il y a reprise des sélections Un Certain Regard, La Quinzaine des réalisateurs et La Semaine Internationale de la critique à Paris.

Un Certain Regard migre ainsi au Reflet Medicis (Paris 5e), du 28 mai au 3 juin. Vous pourrez y voir la Caméra d'or, Hunger.

La Quinzaine des réalisateurs occupe le Cinéma des cinéastes (Paris 17e) durant la même période.

Du 5 au 8 juin, la Semaine internationale de la Critique emménage à la Cinémathèque Française (Paris 12e).

Enfin, du 11 au 17 juin, Le Latina (Paris 4e) reprendra la sélection Cannes Classics parmi lesquelles Les cendres du temps version redux.

Cannes : Qui est Michael Fassbender?

Posté par vincy, le 15 mai 2008

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Michael Fassbender incarne Bobby Sands, terroriste irlandais incarcéré dans le film choc Hunger, qui ouvre Un Certain regard. La plupart du temps à poil dans ce film dénonçant les tortures infligées aux prisonniers de Maze au début des années 80, sa prestatation est surtout remarquée pour les 40 dernières minutes du film : un corps qui maigrit jusqu'à ne plus avoir de chair sur la peau. En grève de la faim, on le voit épuisé et dévitalisé. Ses os saillants, son ventre creux, sa peau meurtrie font le reste.

Fassbender n'est pas inconnu du grand public. On l'a vu dans 300, le péplum sanglant de Zack Snyder et dans Angel, le mélo romantique et kitsch de François Ozon. Cet Irlandais de 31 ans né en Allemagne et de parents allemands vient des planches, où il a même produit, mis en scène et joué une version de Reservoir Dogs. Il a tenu aussi le rôle de sergent dans la série Frères d'armes, produite par Tom Hanks et Steven Spielberg. On a pu aussi l'apercevoir dans un pub pour une bière brune irlandaise. Il vient de finir le tournage du prochain film de Joel Schumacher, Town Creek. Et à Cannes, Hanway a confirmé qu'il serait Heathcliff dans Les hauts de Hurlevents, où il donnera la réplique à Natalie Portman.

Il tourne actuellement Fish Tank, le prochain film d'Andrea Arnold, prix du jury à Cannes en 2005 avec Red Road.