Palmarès

Posté par MpM, le 6 février 2008

Les lauréats

  • Cyclo d'or : Le vieux barbier de Hasi Chaolu (Chine)

"pour son scénario authentique, plein de dignité et de loyauté, pour la ville de Pékin face à la globalisation, pour son sujet né de la chimie subtile et délicate entre les membres d’une équipe de non professionnels"

  • Grand Prix du Jury International : Philippine science de Auraeus Solito (Philippines)

"pour son énergie positive et le jeu remarquable des jeunes acteurs, preuve d’un cinéma philippin authentique"

  • Mention spéciale : Those three de Naghi Nemati (Iran)

"pour son approche esthétique minimaliste et sa vision des valeurs humaines face à une situation critique de militarisation"

  • Prix du Jury NETPAC (Network for the Promotion of Asian Cinema) : Le vieux barbier de Hasi Chaolu (Chine)

"pour son histoire émouvante d’êtres humains en particulier ceux marginalisés, et pour la relation entre l’homme et son environnement traitée avec beaucoup de sensibilité"

  • Mention spéciale : Les moissons pourpres de Cai Shangjun (Chine)

"pour sa peinture d’une Chine en transformation face à la globalisation et les liens subtils d’amour et de confusion entre deux êtres"

  • Prix Emile Guimet : Boz salkyn de Ernest Abdyjaparov (Kirghiztan)

"d’authentiques personnages dans un décor sublime, musique originale du réalisateur lui-même…un film dénonçant avec subtilité une coutume ancienne sexiste qui a survécu au cours des siècles"

  • Coup de coeur Guimet : Frozen de Shivajee Chandrabhushan (Inde)

"un premier film subjuguant pour la qualité de sa photographie, un choix audacieux du noir et blanc, un film sychologique et philosophique au Ladakh, un tournant dans le cinéma indien"

  • Prix Langues' O : Les moissons pourpres de Cai Shangjun (Chine)

"pour avoir abordé la crise du monde rural dans la Chine contemporaine, ce qui a rarement été montré, et les bouleversantes relations père-fils"

  • Coup de coeur Langues 'O : Le vieux barbier de Hasi Chaolu (Chine)

"pour la qualité de son scénario et de ses images et le personnage principal témoin de la disparition de son quartier"

  • Prix du public longs métrages de fiction : Philippine science de Auraeus Solito (Philippines)
  • Prix du public du film documentaire : Le cri du coeur de Shinji Takahashi (Japon)
  • Prix Jury Jeunes : Les enfants bananes de Cheng Xiao-xing (France-Chine)
  • Prix du Jury Lycéen : Le vieux barbier de Hasi Chaolu (Chine)

Pour les spectateur parisiens, reprise d'une partie du palmarès au Musée Guimet les 5 et 7 mars 2008.

Regard sur les cinémas d’Asie contemporains

Posté par MpM, le 5 février 2008

Quels sont cette année les visages des cinématographies venues du continent asiatique ? Si l'on se base sur la compétition fiction, d'un point de vue géographique, on constate la prédominance du cinéma chinois et iranien (qui représentent une proportion importante des films proposés aux organisateurs) ainsi que le renouveau de la Malaisie et des Philippines qui bénéficient de la révolution numérique. L'Asie centrale n'est pas oubliée, avec deux oeuvres venues du Kirghiztan et du Kazakhstan, non plus que l'Inde, incontournable, et Israël, à la production relativement dynamique.

Sur le plan thématique, il apparaît que pour nombre de réalisateurs présents, le cinéma reste avant tout un formidable outil de témoignage sur les réalités sociales et politiques de leurs pays respectifs. Les deux films chinois en compétition abordent ainsi tour à tour la désertification des campagnes au profit des villes, la perte des valeurs familiales, la situation des femmes prostituées ou vendues (Les moissons pourpres de Cai Shangjun) ainsi que l'obsession de modernisation du pays et les bouleversements de la société chinoise (Le vieux barbier de Hasi Chaolu). Dans un genre assez proche, mais cette fois en Asie centrale, Le martinet d'Abai Koulbai suit l'errance d'une jeune fille kazakhe livrée à elle-même dans la capitale Almaty. Trop occupés à survivre, ou à monter dans le train du progrès, les adultes s'avèrent incapables de l'aider, ou ne serait-ce que de remarquer la prévisible et choquante descente aux enfers dans laquelle elle s'engage. Là aussi, les valeurs traditionnelles en prennent un coup.

Autre tendance de cette sélection, la volonté d'apporter un témoignage culturel ou historique inédit. Palme du sujet sensible, Boyz Salkyn aborde la question du vol des fiancées. Dans les campagnes kirghizes, lorsqu'une famille souhaite marier son fils, elle enlève tout simplement la jeune fille choisie, et s'arrange ensuite avec ses parents. Ernest Abdyjaparov, le réalisateur du film, avoue avoir lui-même procédé ainsi pour se trouver une épouse... C'est sans doute pourquoi il traite le sujet avec un regard très bienveillant, réussissant l'exploit de réaliser un film léger et même par moments burlesque sur une coutume archaïque et machiste. Trois mères de l'israélienne Dina Zvi-Riklis relate quant à lui la vie de trois soeurs du début des années 40 à Alexandrie aux années 2000 en Israël. Sous forme de fresque romanesque et familiale, la réalisatrice évoque le don d'enfants, qui se pratiquait en Egypte, et le tiraillement des juifs d'Egypte exilés en Israël. Enfin, l'hommage du réalisateur philippin Auraeus Solito à la comédie de teenagers (Philippine science) parle aussi des années d'instabilité du pays, dans les années 80, avant le renversement du dictateur Marcos.

Et puis, bien sûr, il y a les oeuvres atypiques et personnelles dont le point commun est sans doute de porter un regard humaniste et presque sociologique sur une poignée d'individus particuliers : un père et sa fille adolescente au Ladakh (Frozen de Shivajee Chandrabhushan), une poignée de militaires à la recherche de leur liberté individuelle dans une région glacée d'Iran (Those three de Naghi Nemati), des couples confrontés au doute ou au désamour (Waiting for love de James Lee).

Enfin, en terme d'esthétique, on retient le noir et blanc sublime de Frozen et sa mise en scène suffisamment inventive pour lui avoir valu le qualificatif de film indien "le plus novateur de ces dix dernières années", les cadrages au plus près du Vieux barbier, le technicolor soyeux et élégant de Trois soeurs, les interminables plans quasi fixes de Waiting for love, et encore le cinéma vérité du Martinet, film urbain par excellence, ou les images trafiquées de Those three.