Les ressorties de l’été 2016 (1) : on the road again avec Macadam à deux voies de Monte Hellman

Posté par MpM, le 28 juin 2016

Macadam à deux voies

L'été est la période idéale pour faire une pause dans les nouveautés qui affluent sans fin chaque semaine et renouer avec de grands classiques, films cultes ou chefs d’œuvres oubliés, qui ressortent avec bonheur sur grand écran à cette époque de l'année.

Cette semaine, c'est un film maudit, devenu culte, qui ouvre le bal : Macadam à deux voies (Two-lane Blacktop) de Monte Hellman, sorti en 1971, et devenu au fil des années l'un des symboles de la contre-culture américaine. Ce vrai-faux road-movie, qui s'inspire beaucoup des expériences de la Nouvelle Vague, est une oeuvre énigmatique et déroutante dont on ne peut pas vraiment dire qu'elle cherche à flatter le spectateur.

Pendant 1h30, on suit deux conducteurs mutiques (The driver et The mechanic) dont toute l'attention semble focalisée sur leur Chevrolet 1955, une voiture qu'ils ont entièrement customisée pour écumer la route 66 en quête de courses à gagner. Ils prennent en stop une jeune fille (The girl) puis croisent la route d'un autre conducteur, au volant d'une Pontiac jaune rutilante (GTO). Tous quatre se lancent dans une course que l'on ne peut pas vraiment qualifier d'effrénée, mais plutôt d'hallucinatoire, ponctuée de pauses dans des stations services et des dinners typiques. La jeune fille passe d'une voiture à l'autre, le GTO noie ses interlocuteurs sous une flopée d'histoires dont seul le spectateur sait qu'elles sont à chaque fois différentes, le conducteur et le mécano n'ouvrent la bouche que pour parler moteur et réglages, cadences et courses à gagner.

Choc sensoriel hypnotique

C'est à peu près tout pour l'action, qui se dilue assez vite dans l'irrésistible fuite en avant où s'oublient les personnages. Rien d'autre ne compte que le mouvement, l'ailleurs à venir, la vitesse à tenir, et cette sensation impalpable de liberté qui souffle sur tout le récit. On est sidéré par la vacuité revendiquée du film qui refuse tout message ou quête de sens pour s'abîmer dans un choc sensoriel hypnotique révélateur de l'incommunicabilité et du désœuvrement de l'époque, ainsi que de l'irréconciliable conflit générationnel. Pas très étonnant que Macadam à deux voies, énorme échec public à la genèse plus que compliquée, ait séduit des réalisateurs comme Quentin Tarantino ou Gus van Sant, bouleversés par son aridité contemplative à la limite de l'absurdité, qui laisse toute sa place à la recherche cinématographique exigeante du réalisateur.

On le revoit aujourd'hui avec d'autant plus d'émotions qu'il est le seul film du célèbre musicien folk rock James Taylor (Sweet baby james, Mud slide slim, Carolina in my mind) et du cofondateur des Beach Boys, Dennis Wilson, flanqués de Warren Oates (acteur fétiche de Sam Peckinpah) et de la jeune mannequin Laurie Bird. Tous les quatre sont à la limite de la désincarnation, silhouettes privées de noms, d'histoires ou ne serait-ce que d'épaisseur, comme des figurants réduits aux quelques traits de caractère de leur archétype, faire-valoir terribles d'un film qui les dévore quasiment au sens propre.

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Macadam à deux voies de Monte Hellman

Sortie le 29 juin en version numérique restaurée
Distribué par Ciné Sorbonne

Road to nowhere : le retour de Monte Hellman

Posté par MpM, le 13 avril 2011

Vingt ans que Monte Hellman n’avait plus réalisé de long métrage. Vingt longues années à essayer de monter des projets et à se consacrer à des courts métrages et à quelques apparitions dans les films des autres (I Love L.A. de  Mika Kaurismäki, There is no Direction de Sarah Bertrand…)  « J’ai travaillé pendant ces 20 ans même si rien n’a abouti », assure-t-il. On le croit, et on pense à Buffalo'66 qu’il aurait pu réaliser si les producteurs n’avaient pas été effrayés par sa réputation…

Car Monte Hellman n’a pas usurpé sa légende de « poète maudit » du cinéma. Depuis ses débuts en 1959 (Beast From Haunted Cave), le succès a rarement été au rendez-vous. Même ses œuvres les plus cultes (Macadam à deux voies, Cockfighter…) ne trouvèrent pas vraiment leur public. La critique, elle, fut souvent enthousiaste, saluant l’épure ou l’onirisme de ses longs métrages les plus emblématiques.

Son nouveau film, Road to nowhere, en salles à partir d’aujourd’hui, était donc forcément attendu au tournant. Un film noir et énigmatique se situant sur le tournage d’un cinéaste qui a failli s’appeler… Monte Hellman. De quoi ravir les fans, dont Quentin Tarantino, président de la Mostra de Venise où le film a été présenté, et qui lui décerna un Lion d’or spécial pour l’ensemble de son œuvre.

Le spectateur, lui, risque d’être une nouvelle fois déconcerté par ce puzzle existentiel où les pièces s’emboîtent sans forcément former de motif, et où tout reste toujours dans le non-dit. A chacun de décoder les symboles, de relever les coïncidences, de se laisser envoûter (ou non) par cette mise en abyme vertigineuse, dépassant largement le cadre du film dans le film.

Quoi qu’il en soit, quand un cinéaste se fait aussi rare que Monte Hellman, la moindre occasion de faire un petit bout de chemin avec lui est bonne à prendre, même si cela ne mène nulle part.

Tous les chemins mènent à Monte Hellman, qui fait étape au Nouveau Latina

Posté par Claire Fayau, le 15 février 2011

À l’occasion de la sortie du premier livre d’entretien en français avec le cinéaste culte Monte Hellamn et de la sortie prochaine de son nouveau film Road to Nowhere (le 6 avril, l'histoire d'un réalisateur de films embarqué malgré lui dans une conspiration criminelle), Le Nouveau Latina et Capricci Films organisent ce mardi 15 février une soirée exceptionnelle autour du cinéaste et en sa présence.

Accro au bitume, fan de contre-culture américaine, désenchantés du flower power, si vous aimez les road movies, American Graffiti et Easy Rider (et si vous aimez Reservoir Dogs !), programmez votre GPS destination le Nouveau Latina :

- à partir de 19h : Signature de son livre "Sympathy for the Devil" au salon de thé du Nouveau Latina (1er étage)

- 20h : Macadam  à deux voies (sa réalisation la plus connue dont on fête les 40 ans) . Outre la présentation du film, une rencontre avec Monte Hellman est prévue, orchestrée par Emmanuel Burdeau.

- 22h10 : Reservoir Dogs, le film culte de Quentin Tarantino, produit par Monte Hellman.

Hellman a fait ses débuts sous la direction de Roger Corman, producteur de série B, qui a également fait débuter Scorsese et Coppola, en réalisant une parodie de film d'horreur, Beast from Haunted Cave, en 1959. Il deviendra aussi monteur sur des films de Peckinpah, Raffelson et Demme.

Après le pastiche de film d'horreur, Monte Hellman se lance dans des westerns nouveaux genres, avec Jack Nicholson pour deux d'entre eux.

Il enchaîne les flops, et autant de films devenus cultes ou de curiosités entre initiés. Road to Nowhere sera sa première réalisation en 21 ans. Il avait reçu un Lion spécial à Venise en septembre dernier, alors que Tarantino présidait le jury. Road to Nowhere y était présenté en compétition, où, à 76 ans, il faisait figure de vétéran. Il y évoquait la difficulté qu'il avait eu à développer ses projets, puisqu'aucun ne s'est concrétisé. Trente ans d'écritures stériles. "Je préfère un bon film hollywoodien à un film indépendant. Il y en a peut-être cinq par an, mais ils valent toujours la peine" expliquait-il. "Il fallait sortir de là, ne plus dépendre du bon vouloir d'autrui, en finir avec les compromissions. Ma fille a pris les choses en main et a réuni des investisseurs privés. Le film, avec tous les salaires en participation, s'est monté pour environ 5 millions de dollars."

Six ans après celui de Cannes, Tarantino présidera le jury de Venise

Posté par vincy, le 6 mai 2010

La 67e Mostra de Venise (1-11 septembre) s'est choisie Quentin Tarantino comme Président du jury. Un choix peu original, finalement, puisque le cinéaste américain avait eu le même poste à Cannes en .... 2004.

Trois fois sélectionné à Cannes (avec une Palme d'or à la clef), une fois à Berlin,  et aucune fois à Venise, le choix est aussi surprenant de la part d'un festival qui l'a toujours ignoré.

Venise, cette année, remettra un Lion d'or d'honneur à John Woo. Quatre nouveaux prix ont été créés dans la section "Orizzonti", qui se transforme en laboratoire et absorbe les sections "CourtoCortissimo" et "Evénements spéciaux". Venise a annoncé la présentation de la version restaurée du film de Nicholas Ray (dont on célèbre le centenaire cette année, We Can't Go Home Again. Parmi les cinéastes pressentis pour aller à Venise, signalons  Terrence Malick, Anton Corbijn, Gus Van Sant, Steven Soderbergh, Clint Eastwood, Abdellatif Kechiche, ou encore Bela Tarr. Sont confirmés Potiche, de François Ozon, Somewhere, de Sofia Coppola, Miral, de Julian Schnabel, et Road to Nowhere de Monte Hellman.