2011 – février : Une séparation gagne l’Ours d’or

Posté par vincy, le 26 décembre 2011

19 février 2011. Le jury présidé par Isabella Rossellini décerne l'Ours d'or au film iranien d'Asghar Farhadi, Une séparation. Le film repart avec deux Ours d'argent pour les interprètes masculins et féminins, le prix du jury oecuménique, le prix des lecteurs du Berliner Morgenpost. Les prix ont d'autant plus de résonance que des cinéastes iraniens sont condamnés, emprisonnés, assignés à résidence. Cet Ours ne sera que le début de sa longue marche triomphale. Au cours de l'année, il remportera plus d'une quarantaine de prix. Il est le favori pour l'Oscar du film en langue étrangère. Cette tragédie subtile qui scrute de son regard perçant les contradictions de la société iranienne et les conflits humains nés de schémas préconçus emballe aussi le public. En France, sorti à la fin du printemps, il séduit 922 000 spectateurs. Un record pour un film iranien, et un score exceptionnel pour un film asiatique.

Tout le bilan 2011

Berlin 2011 : le palmarès

Posté par MpM, le 19 février 2011

Nader et SImin, une séparation, ours d'or 2011Très peu de surprises dans ce palmarès 2011 qui récompense logiquement les trois meilleurs films de la compétition.

L'Iranien Asghar Farhadi était donné gagnant avec Nader et Simin, une séparation, regard aigu et profond sur la société iranienne contemporaine. En plus de la récompense suprême, le film reçoit un double prix d'interprétation masculine et féminine pour les 4 acteurs principaux, effectivement tous exceptionnels. Apparemment le coup de coeur du jury, après avoir été celui de la presse. Les premiers mots de Farhadi ont été pour Jafar Panahi, qu'il espère voir à Berlin l'an prochain. Comme nous tous.

Favori lui aussi de la presse, Bela Tarr, le grand maître du cinéma esthétique, repart avec un grand prix totalement justifié pour Le cheval de Turin, une oeuvre envoûtante et fascinante qui tient plus de l'expérience sensorielle que de la banale séance de cinéma. Au-delà du film, c'est toute la carrière d'un très grand réalisateur ayant annoncé son désir de ne plus tourner qui est célébrée.

The forgiveness of blood de Joshua Marston a été projeté le dernier jour du festival et n'a donc pas bénéficié du même buzz que les deux films précédents, pour autant le jury l'a fort justement retenu. Un prix du scénario logique pour cette histoire sensible et sobre d'un adolescent contraint à rester enfermé chez lui pour échapper à une vendetta lancée contre sa famille.

Un palmarès équilibré qui correspond globalement aux attentes. C'est à peine si l'on peut déplorer l'absence de Miranda July (The future) dans la liste des autres lauréats, et se demander, malgré tout le bien que l'on pense de Nader et Simin, une séparation, si cumuler tant de prix sur le même film était vraiment indispensable...

Ours d'or
Nader et Simin, une séparation d'Asghar Farhadi

Ours d'argent, Grand prix du jury
Le cheval de Turin de Bela Tarr

Ours d'argent du meilleur réalisateur
Schlafkrankheit d'Ulrich Köhler

Ours d'argent de la meilleure actrice
Leila Hatami et Sarina Farhadi pour Nader et Simin, une séparation

Ours d'argent du meilleur acteur
Peyman Moadi, Shahab Hosseini et Sareh Bayat pour Nader et Simin, une séparation

Ours d'argent de la meilleure contribution artistique
El premio de Paula Markovitch

Ours d'argent du meilleur scénario
The forviveness of blood de Joshua Marston

Prix Alfred-Bauer de l'innovation, du nom du premier directeur de la Berlinale
Wer, wenn nicht wir ? d'Andres Veiel

Berlin 2011 : Asghar Farhadi, Miranda July, Bela Tarr, trio gagnant

Posté par MpM, le 15 février 2011

turin horseAlors que cette 61e Berlinale vient déjà d'entrer dans sa seconde partie, la compétition proposait aujourd'hui trois captivantes propositions de cinéma, quoi que chacune dans une direction très particulière.

Asghar Farhadi (A propos d'Elly) propose dans Nader et Simin, une séparation un regard aigu et profond sur la société iranienne contemporaine. On y découvre la mesquinerie de certains rapports  sociaux, l'hypocrisie des rouages administratifs ou judiciaires, ou encore la difficulté du "vivre ensemble", que ce soit entre homme et femme ou entre individus issus de classes différentes. Le film démonte les préjugés et oppose deux visions totalement opposées de la vie, l'une consistant à être prêt à tout pour sauver sa peau, tandis que l'autre conduit à privilégier la droiture et la vérité, même si les conséquences s'avèrent terribles.

Miranda July (You, me and everyone we know) explore elle-aussi les tréfonds de l'âme humaine en proposant une réflexion à la fois tendre, amère et pleine de dérision sur l'existence, le temps qui passe et la sensation de passer à côté de sa vie. Dans The Future, les personnages qu'elle met en scène ressemblent à un couple de pré-ados immatures qui jouent à se faire peur ("Et si... ?") pour masquer la réalité de leurs angoisses. Ils arrivent à ce moment de l'existence où l'on commence à compter les points, à faire la liste de ce que l'on ne sera jamais, à restreindre celle de ce que l'on fera un jour. Malgré leur finesse, l'humour et l'absurdité des dialogues et des situations ne parviennent guère à dissimuler l'aspect désespéré du constat.

Bela Tarr (Les harmonies Werckmeister), de son côté, propose The Turin horse (notre photo), une oeuvre à l'esthétisme envoûtant, portée par la musique lancinante et hypnotique de Mihaly Vig. On suit le quotidien austère et répétitif d'un fermier et de sa fille, filmé dans un noir et blanc riche en contrastes et en clairs-obscurs. La mise en scène est moins immédiatement impressionnante que dans L'homme de Londres, mais elle est entièrement au service du projet poursuivi par le réalisateur, capter le rythme de la vie et s'ouvrir à la conscience de chaque moment. On est ébloui (mais aussi effrayé) par la radicalité du cinéaste qui refuse toute concession à la narration traditionnelle.  Cet aspect jusqu'au boutiste confère au film un statut d'expérience sensorielle et esthétique qui ne s'appelle plus vraiment du cinéma. Il provoque un état de flottement, presque de léthargie, voire d'ennui pour les moins réceptifs, et s'avère pour le cinéphile un peu las un véritable bain de jouvence.