Cinespana 2015 : El gran vuelo de Carolina Astudillo

Posté par MpM, le 8 octobre 2015

El gran VueloPrix du meilleur documentaire au dernier festival de Malaga, El gran vuelo de Carolina Astudillo fait partie de la sélection « Politique et société » du 20e festival Cinespana, qui propose un regard acéré sur le passé et le présent de l’Espagne. Aux côtés d’œuvres plus ancrées dans l’actualité, traitant de thématiques comme la corruption au cœur du système politique et judiciaire espagnol ou la lutte d’associations engagées contre les expulsions immobilières, El gran vuelo s’avère un étonnant objet cinématographique, à mi-chemin entre la recherche expérimentale, le portrait saisissant et le constat amer des nombreux échecs des luttes politiques passées.

Au centre du film, il y a la mystérieuse Clara Pueyo Jornet, militante du Parti communiste qui prit part à la guerre civile et s’échappa des geôles franquistes dans les premières années de la dictature avant de disparaître à jamais. De cette femme, figure centrale de la résistance en Catalogne à la jonction entre les années 30 et 40, on ne sait presque rien. Très peu d’images subsistent d’elles, et les rares témoignages à son égard sont flous et inconsistants. C’est presque à la rencontre d’un fantôme que part Carolina Astudillo.

Munie d’une poignée de photographies usées et de quelques lettres confisquées, la jeune cinéaste reconstitue dans leurs grandes lignes les années charnières de l’existence de son personnage, détaillant les photos jusqu’à les rendre floues, s’accrochant aux moindres informations distillées dans les documents en sa possession. Sa grande intelligence est d’avoir transformé la faiblesse de son propos (le manque cruel d’éléments) en une formidable idée de cinéma.

el gran vueloPuisqu’elle ne peut montrer des images animées de Clara, elle les suggère en utilisant des films amateurs de l’époque, où d’autres fillettes, puis des jeunes femmes, connaissent les mêmes expériences : première communion, jeux, travail… Le rythme hypnotisant des images, le noir et blanc granuleux, la musique lancinante et parfois même dissonante contribuent à donner de Clara une impression fantomatique et au fond insaisissable. Il faudra, et c’est devenu rare de nos jours, se contenter de ces bribes, et renoncer à savoir ce qu’il est advenu de la jeune femme après qu’on a perdu sa trace.

Carolina Astudillo transforme alors son personnage en allégorie d’une époque et d’un engagement. A travers le portrait en creux de Clara, c’est celui de l’Espagne révolutionnaire des années 30 et 40 qu’elle esquisse. Elle dit l’impossible émancipation féminine, même au sein du mouvement républicain, les difficultés à s’aimer librement dans une société entièrement corsetée par la religion catholique, la guerre qui envahit tout, même les jeux des enfants. Elle propose également une passionnante réflexion sur l’image et l’absence d’image, la manière dont sont filmés les corps en fonction des époques et des milieux : corps niés des bonnes d’enfants, corps faussement glamour des prisonnières…

On ne peut évidemment s’empêcher de dresser un parallèle entre ces luttes d’autrefois et celles d’aujourd’hui, qui font dans une certaine mesure appel aux mêmes instincts. Il y a d'ailleurs quelque chose d’éminemment pessimiste dans El gran vuelo, donnant l’impression que l’engagement personnel est un acte violent et destructeur, souvent mal compris et difficile à mener à bien. C’est l’une des interprétations possibles de la disparition mystérieuse de Clara Pueyo après son évasion réussie de la prison de Barcelone, où elle attendait d’être exécutée. On sent dans ses dernières lettres une usure et une lassitude, presque un renoncement. S’il ne dissipe pas le mystère, ce portrait ténu et audacieux ravive avec justesse et subtilité la mémoire de cette combattante qui a volontairement choisi l'oubli, non par renoncement envers ses idéaux, mais au contraire par fidélité absolue.

Cinespana 2015 : cinq bonnes raisons de ne pas louper la 20e édition

Posté par MpM, le 2 octobre 2015

Cinespana 2015

Il y a deux sortes de gens : ceux qui ont déjà assisté au festival Cinespana et rêvent donc d'y retourner cette année, et ceux qui n'ont jamais pu s'y rendre, et prient pour que cette année soit la bonne. Dans les deux cas, les bonnes raisons ne manquent pas d'aller soutenir le plus grand festival européen de cinéma espagnol hors Espagne qui commence ce soir à Toulouse. Pour achever de convaincre les indécis retardataires, cinq raisons forcément subjectives de faire le déplacement d'ici la clôture samedi prochain.

Soirée anniversaire en compagnie de Marisa Paredes

A Toulouse, on ne fait pas les choses à moitié. Pour sa 20e édition, le festival Cinespana a tout simplement demandé à l'actrice Marisa Paredes de venir souffler les bougies. Elle sera ainsi présente pour une soirée exceptionnelle composée d'une rencontre avec le public et de la projection de l'une de ses nombreuses collaborations avec Pedro Almodovar, La fleur de mon secret. Une soirée avec Marisa, ça vaut tous les gâteaux d'anniversaire, non ?

Projection en plein air de Femmes au bord de la crise de nerfs de Pedro Almodóvar

Pour la première fois, Cinespana organise une projection en plein air, ouverte à tous, dans le cadre prestigieux du donjon du Capitole. Un bonheur n'arrivant jamais seul, c'est carrément le film culte de Pedro Almodovar, Femmes au bord de la crise de nerfs, qui bénéficiera de cette séance exceptionnelle. Inratable.

Soutien au cinéma espagnol

Le cinéma espagnol est l'un des plus dynamiques d'Europe, et en même temps l'un des plus menacés par la diminution des subventions qui a suivi la crise en Europe. Aller à Cinespana, c'est donc s'engager en faveur d'une cinématographie fragile, souvent indépendante, qui doit se battre pour exister. Militer en se faisant plaisir, quoi de mieux ?

Deux films d'ouverture pour le prix d'un

Pour lancer cette 20e édition, ce n'est pas un film qui aura les honneurs de l'ouverture, mais deux ! Au choix, les festivaliers pourront ainsi découvrir la comédie Murieron por encima de sus posibilidades de Isaki Lacuesta ou le documentaire Paco de Lucía, légende du flamenco de Curro Sánchez Varela. Le luxe.

Instantané de la production cinématographique ibérique

Cinespana, c'est des longs et des courts métrages, des fictions et des documentaires, un panorama de films récents et un focus sur des inédits issus de la veine la plus indépendante du cinéma espagnol... en bref, un instantané de la production ibérique contemporaine dans toute sa diversité. L'occasion rêvée de découvrir des cinéastes émergents, d'avoir des nouvelles des artistes confirmés, et surtout de connaître avant tout le monde les tendances, les grands noms et les petites pépites de demain ! Indispensable pour les simples cinéphiles comme pour les professionnels.

Au coeur du Cartoon Forum 2015: 7 pitchs à suivre

Posté par cynthia, le 22 septembre 2015

Dans une ambiance de colonie de vacances, la 26ème édition du Cartoon Forum a présenté une nouvelle fois une grande diversité de projets d'animations européennes. Nous y étions... Immersion.

Cartoon Forum Kézako???

Du 15 au 18 septembre, la ville de Toulouse accueillait pour la quatrième fois la 26ème édition du Cartoon Forum. Mais qu'est-ce que c'est le Cartoon forum?
Le Cartoon forum est le rendez-vous européen de la coproduction de séries animées où, venant de 31 pays, 900 professionnels ont répondu présents cette année, soit 5% de plus que l'édition passée. Parmi ce nombre conséquent d'invités, 270 acheteurs potentiels dont Canal + et France Télévisions. Pour cette 26ème édition, l'association européenne du film d'animation a reçu 150 projets (12% de plus que l'année dernière) avant de sélectionner minutieusement 91 projets dont 30 français et 11 anglais.

Comment ça se passe une journée au Cartoon Forum?

N'imaginez pas que cela se déroule comme un festival habituel et autant vous dire que passer du Festival de Deauville au Cartoon Forum c'est comme déguster un délicieux donut après 4 ans de régime à la soupe aux choux!

Tout débute le matin dans une navette qui passe vous prendre près de votre hôtel... à la limite de la colonie de vacances avec des (belles) rencontres le temps du chemin, avant de démarrer la journée au «Croissant Show», un rassemblement autour du thé, café, croissants et autres pains au chocolat. «On a essayé d'aborder ça de manière conviviale, note Mark Vandeweyer, organisateur du Cartoon forum, il y a vraiment une communauté qui s'est créée, qui se respecte malgré la concurrence.» Entouré par les producteurs, réalisateurs, journalistes et autres distributeurs, vous découvrez en images la sélection de pitch de la journée: à vous ensuite de faire un choix parmi les sessions du matin. Même sens de la convivialité pour le déjeuner (et quel déjeuner) afin de suivre le programme de l'après-midi. Échange autour de plats succulents et équilibrés (on en a encore l'eau à la bouche), rires et prise de notes, on se serait cru à Poudlard, les hiboux express en moins.

Rebelote l'après-midi avec des pitchs avant de nous retrouver lors du dîner (encore merveilleux à souhait). Outre cela, des activités nous ont été proposées: balade sur le canal du Midi ou jogging touristique ainsi qu'un ciné-concert. Il n'y a pas à dire nous étions en vacances, avec le soleil en bonus.

Pitch Sessions

Une fois que vous avez choisi la session que vous allez suivre (une session à choisir parmi trois dans des salles différentes), vous êtes subjugués pendant 30 minutes par l'équipe technique du support présenté qui vous en met plein la vue. Comme lors d'une vente aux enchères, l'équipe vend son petit bijou d'animation au public: extrait, trailer, cadeaux, messages vidéos (ou en direct) de personnes réputées du métier, tout est bon pour attirer l'œil des professionnels présents dans la salle et titiller leur portefeuille.

Les pitchs qui ont retenu nos rétines

Lili (Royaume-Uni)
Les aventures d'une petite fille espiègle et qui adore faire des bêtises. Révolution dans le domaine puisque habituellement les héroïnes de dessin animé sont mignonnes et gentilles (tout le contraire d'un enfant réel). Ici, il y a un peu plus de vérité en passant par l'humour avec Lil, gamine capable de jeter un cadeau aux ordures lorsqu'on lui en offre un mieux.

Frankie and Doris (Royaume-Uni)
Une amitié drôle et fusionnelle entre une créature à la sauce Frankenstein et une fille squelette. Un cartoon sur la tolérance et l'acceptation de soi avec en bonus la voix de l'actrice Evanna Lynch (la saga Harry Potter).

Dorg Van Dango (Irlande)
Une comédie forte sur une bande d'adolescents peu conventionnels (un fantôme, une licorne, un alien, une sorcière et un humain) sur fond de dossier top secret et d'humour potache.

Ibinou (France)
Un projet qui vient de Toulouse et qui propose aux enfants de suivre les aventures d'Ibinou, un petit hibou qui prend en photo les espèces qui l'entourent. À noter que les photos sont de vraies photos prisent par des professionnels et que la série fera l'objet d'un transmedia (faire apparaître les éléments d'une série dans un jeu, une application, etc...)

Krabstadt (Suède)
À la manière de South Park, une dénonciation de notre société dans tous les domaines possibles (féminisme, sexe, différence). Ce show est agrémenté par les femmes baleines: des femmes portant une carcasse de ce mammifère sur leur visage et qui dérange les habitants de la ville par cet accoutrement, métaphore drôle et satirique du port du voile.

La quatrième planète (France)
Un film animé à la française et pour jeune adulte prévu lui aussi en transmedia (plateforme Web, jeux PC) qui traite d'un exode contrôlé sur Mars après le déclin climatique de notre planète...puissant!

sylvain chomet cartoon forum 2015Mimi & The Mountain Dragon (France/Royaume-Uni)
Le coup de crayon ne laisse pas indifférent et dès les premières minutes du trailer nous devinons qu'il s'agit de la patte de Sylvain Chomet (Les Triplettes de Belleville, L'illusionniste). Le réalisateur était d'ailleurs présent afin de nous présenter son prochain petit bijou pour la TV. Mystérieux concernant le scénario (signé par le scénariste de Cheval de guerre), Sylvain Chomet nous a tenu compagnie le temps de quelques questions posées au compte goutte. C'est ainsi qu'il nous a appris qu'il ne scanne plus ses dessins mais qu'il dessine «directement sur la tablette Wacom», un procédé qui permet d'aller plus vite et de laisser le dessin intact. Pourtant, le dessinateur reste fidèle à la méthode Photoshop qu'il a d'ailleurs utilisée pour le gag du canapé d'un épisode de la saison 25 des Simpsons.
À la question «êtes-vous intéressé par Pixar?» ce grand monsieur répond le plus honnêtement du monde «ça ne me donne pas envie!» L'appel de l'Amérique ne le tente guère et il ajoute même qu'il «y a une sorte de malédiction autour des réalisateurs oscarisés pour le meilleur court-métrage d'animation». Il nous évoque ensuite le triste destin de Jan Pinkava (réalisateur oscarisé en 1998 pour son court-métrage d'animation Geri's game) qui fut réduit à état de stagiaire chez Pixar après avoir obtenu sa statuette dorée. En d'autres termes, Sylvain Chomet ne semble pas être attiré par la magie de l'animation américaine et d'un côté tant mieux pour nos mirettes...

Cérémonie de clôture et soirée karaoké

Vous avez bien lu le titre...«Ka-ra-o-ké»...c'est ce qui s'appelle la convivialité. Si seulement nous avions ce genre d'activités dans les festivals, cela serait plus sympathique. On se serait bien vu faire un karaoké avec Ian McKellen à Deauville.

La cérémonie de clôture, qui avait lieu dans une église, récompensait six films d'animation d'environ 30 minutes. Le Cartoon d'or, prix qui récompense chaque année le meilleur court-métrage d'animation européen, a été remis à The Bigger Picture de Daisy Jacobs (Royaume-Uni).

Cinespana 2015 : Marisa Paredes soufflera les bougies

Posté par MpM, le 22 septembre 2015

Marisa Paredes

Pour son anniversaire, le festival Cinespana de Toulouse offre à ses spectateurs la présence de l'actrice Marisa Paredes (Talons aiguilles, Tout sur ma mère, La vie est belle...) pour une rencontre animée par le journaliste François-Pier Pelinard Lambert et suivie par la projection de La fleur de mon secret de Pedro Almodovar. Un cadeau largement à la hauteur de la longévité de la manifestation qui célèbre, soutient, montre et défend le cinéma espagnol depuis vingt ans.

Deux autres événements-phare marqueront cette édition spéciale : la projection en plein air de Femmes au bord de la crise de nerfs de Pedro Almodovar, qui aura lieu pour la première fois au Donjon du Capitole, et l'exposition de photos "20 ans de tête à tête" qui réunit les portraits de tous les invités prestigieux passés par Cinespana.

Côté programmation, le festival reste fidèle à sa volonté de donner à voir toutes les formes de cinéma espagnol : courts et longs métrages, fictions et documentaires, premiers films et grands classiques, sans oublier cinéma de genre, animation, et même des films historiques avec les "Regards sur la dictature".

En plus des habituels compétitions et panoramas, on découvrira par ailleurs Márgenes, un projet complet qui englobe une plateforme de vidéo à la demande, un festival en ligne et une société de distribution cinématographique, et qui proposera un échantillon des dernières tendances du cinéma espagnol indépendant à travers trois films et une session de courts-métrages expérimentaux. La "Dernière séance" fera frémir les festivaliers les plus audacieux avec entre autres L’esprit de la ruche de Víctor Erice et [REC] 4 : Apocalypse de Jaume Balagueró. Quant à la section "Politique et société" (anciennement "mémoire et politique"), elle permettra de comprendre comment le cinéma s'est approprié la nouvelle donne politique espagnole et les enjeux contemporains.

Enfin, parmi les nombreux temps forts de cette édition spéciale, un hommage sera rendu à Vicente Aranda, l’un des réalisateurs les plus reconnus du cinéma hispanique, décédé en mai 2015. A cette occasion, le public pourra (re)découvrir La mariée sanglante (1972) et Juana La Loca (2001), qui a lancé la carrière de Pilar López de Ayala.

Entre deux séances, Cinespana sera fidèle à sa réputation de convivialité et de bonne humeur en proposant de nombreuses rencontres avec les invités de sa 20e édition ainsi que des apéro-concerts quotidiens. Partenaire de longue date de la manifestation, Ecran Noir sera de la partie pour ne rien rater de ce 20e anniversaire prestigieux et follement cinéphile.

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Cinespana, 20e édition
Du 2 au 11 octobre 2015
Le site de la manifestation

Cinespana 2015 : 20 ans de cinéma espagnol, ça se fête !

Posté par MpM, le 19 août 2015

cinespana 2015

Avoir 20 ans, pour un festival, n'est jamais une étape anodine. Mêlant la satisfaction du chemin accompli et le défi de poursuivre inlassablement sa tâche, cet anniversaire signifie forcément la nécessité de continuer à se renouveler tout en restant toujours au service de ce qui fait le cœur de toute manifestation : les films, ceux qui les font, et ceux qui les regardent.

C’est évidemment dans cette optique que se prépare la 20e édition de Cinespana,  Festival de cinéma espagnol de Toulouse, qui se tiendra du 2 au 11 octobre 2015. Et qui dit édition spéciale dit événements spéciaux ! A l'image de la soirée anniversaire qui se tiendra le 3 octobre à la Cinémathèque de Toulouse avec une rencontre autour du métier d’acteur en Espagne et la projection de Murieron por encima de sus posibilidades, une comédie de Isaki Lacuesta.

En parallèle, une projection en plein air au Donjon du Capitole permettra à tous les Toulousains de (re)découvrir Femmes au bord de la crise de nerfs de Pedro Almodóvar dans le décor étonnant du Donjon du Capitole. Par ailleurs, une exposition de photographies intitulée "20 ans de tête à tête" rendra hommage aux nombreuses personnalités venues à Cinespana depuis sa création.

Comme tous les ans, le festival proposera par ailleurs de nombreux rendez-vous incontournables comme la compétition officielle (dont le jury sera présidé par Yves Boisset), une sélection documentaire et courts métrages, un cycle de dix films donnant une vision plurielle de la dictature depuis l’époque franquiste jusqu'à l’Espagne démocratique, une Carte Blanche au Festival Márgenes, une sélection de films proposés par la Cinémathèque de Madrid, un cycle Politique et Société et une rencontre littéraire avec l’écrivain et scénariste espagnol Ignacio Martínez de Pisón.

Un programme riche et foisonnant qui devrait permettre à la fois de célébrer dignement le 20e anniversaire de Cinespana et de rappeler le dynamisme indubitable du cinéma espagnol.

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Cinespana, 20e édition
Du 2 au 11 octobre 2015
Le site de la manifestation

Cinespana 2014 : une 19e édition sous le signe du contraste et de la modernité

Posté par MpM, le 3 octobre 2014

cinespanaOn retrouve chaque année avec plaisir le festival Cinespana qui porte haut les couleurs d'un cinéma comptant parmi les plus intrigants et audacieux d'Europe.

Si, avec l'arrivée de la crise, on s'était inquiété pour la créativité espagnole forcément bridée par les restrictions budgétaires et les difficultés sociales où se retrouvait le pays, la production des deux dernières années nous avait quelque peu rassuré.

Certes, l'industrie cinématographique espagnole se porte mal (il y est de plus en plus difficile de faire un film), mais ses créateurs ont su tirer profit des contraintes économiques pour offrir un cinéma en toute liberté, souvent très ancré dans la réalité contemporaine, et soucieux de renouveler les codes et les cadres.

On en aura la démonstration (efficace) lors de cette 19e édition du Festival toulousain avec notamment la sélection en compétition du très remarqué La belle jeunesse de Jaime Rosales (un portrait sombre des conséquences de la crise qui mêle prises de vue en 16mm et images numériques prises sur le vif ) ou encore du formellement original 10 000 km de Carlos Marques-Marcet (principalement filmé à travers une webcam).

Le reste de la programmation réunit un panorama de films contemporains, une programmation jeune public, un cycle "Sexe, genre et identités", des apéro concerts, une section "Mémoire et politique", une séance consacrée au cinéma de genre, et plusieurs hommages.

Les festivaliers pourront ainsi assister à une Rencontre avec l'actrice Lola Dueñas, à un hommage à la danseuse de flamenco et actrice espagnole Carmen Amaya et une carte blanche thématique ("Cinéastes de l’exil : Madrid, Mexico, Paris") au réalisateur, acteur et critique Luis E. Pares.

Le cinéma espagnol, dans ce qu’il a de plus contrasté, entre innovation et patrimoine, modernité et continuité, posera donc une fois de plus ses valises à Toulouse pour dix jours de projections, rencontres et soirées forcément animées.

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19e édition du Festival Cinespana
Du 3 au 12 octobre 2014
Infos et programmation sur le site de la manifestation

Cinélatino 2014: un palmarès très brésilien

Posté par Morgane, le 30 mars 2014

o homem das multidoes cinélatinoAprès 10 jours, le festival Cinélatino touche à sa fin. C’est donc le temps des palmarès! Et cette année, le cinéma venu du Brésil a eut le vent en poupe en recevant 4 des 7 prix avec 3 films différents.

Compétition long-métrage:

*Le Grand Prix Coup de Coeur - O Homem Das Multidoes de Marcelo Gomes et Cao Guimaraes (Brésil, 2013).

Le film suit deux personnages : Juvenal, conducteur de métro, et Margo, qui contrôle le flux des trains. Chacun vit, à sa manière, un état de profonde solitude au sein d’une ville densément peuplée. Peu à peu, cependant, leurs routes vont se croiser. Librement inspiré d’une nouvelle éponyme d’Edgar Allan Poe, ce film fait appel à toute une série de situations inédites, à la frontière du réel. Le film avait déjà récolté le prix de la mise en scène au festival de Rio de Janeiro.

Mention spéciale attribuée à Atlantida de Ines Maria Barrionuevo (Argentine-France, 2014). Ce film était en sélection au Festival de Berlin 2014.

*Le Prix du Public La Dépêche du Midi - Casa Grande de Fellipe Barbosa (Brésil, 2014). Ce film était en sélection au Festival de Rotterdam 2014.

*Le Prix CCAS, prix des électriciens gaziers - Somos Mari Pepa de Samuel Kishi Leopo (Mexique, 2013). Ce film était en sélection au Festival de Berlin 2014.

*Le Prix Fipresci, prix de la fédération internationale de la presse cinématographique - Casa grande de Fellipe Barbosa (Brésil, 2014)

*Le Prix découverte de la critique française - Casa grande de Fellipe Barbosa (Brésil, 2014)

*Le Rail d’or, prix des cheminots - La ninas Quispe (Les soeurs Quispe) de Sebastian Sepulveda (Chili, France, Argentine, 2013). Ce film sort le 4 juin en France. Il a reçu le prix de la meilleure image à la Semaine de la Critique à Venise en 2013.

Compétition court-métrage:

*Le Prix « courtoujours » - El rama de Mena Duarte (Argentine, 2013)

*Le Prix Signis du court-métrage - O Caminho de Meu Pai de Mauricio Osaki (Brésil, Vietnam, 2013)

Ont aussi été remis les Prix pour la compétition Documentaire ainsi que le Prix Cinéma en Construction.

Palmarès Documentaire:

Pour le Prix documentaire rencontres de Toulouse sous l'égide des médiathèques de Midi-Pyrénées, sont ex-aequo, Le grill de César de Darío Aguirre et La muerte de Jaime Roldos de Lisandra I. Rivera et Manolo Sarmiento.
Le prix a été décerné par un jury de médiathécaires de Midi-Pyrénées et de professionnels du cinéma européen et latino-américain.

Le grill de César de Dario Aguirre a également remporté le Prix SIGNIS (créé en 2003, il est remis par SIGNIS, Association Catholique Mondiale pour la Communication) ainsi que le Prix lycéen (prix remis par une classe du lycée agricole Beaulieu-Lavacant d'Auch, suite à la résidence de la documentariste María-Isabel Ospina.

Prix Cinéma en Construction:

Le Prix Cinéma en Construction (organisé conjointement entre les festivals de Toulouse et de San Sabastian) a pour objectif d'aider à la finalisation, la distribution et/ou la promotion de films latino-américains qui rencontrent des difficultés lors de la phase de postproduction. Six films en cours de finalisation ont donc été montrés à un public de professionnels exclusivement susceptibles d'apporter leur contribution pour que ces oeuvres puissent arriver jusqu'à leur public.

Cette année il a été attribué à Aurora de Rodrigo Sepulveda (Chili).

Cinélatino 2014 : les femmes à l’honneur dans la ville rose

Posté par Morgane, le 22 mars 2014

affiche de cinélatino 2014Toulouse accueille cette année, et pour 10 jours (20 au 30 mars), la 26e édition du festival du cinéma latino-américain, Cinélatino. De nombreux lieux, de nombreux films et de belles rencontres au programme!

Cette année, le thème principal est dédié aux "Femmes de Cinéma". Sont à l'honneur Maria Rondon (réalisatrice et productrice vénézuélienne), Marcela Said (réalisatrice chilienne), Lila Stantic (productrice et réalisatrice argentine), Celina Murga (productrice et réalisatrice argentine), Natalia Smirnoff (productrice et réalisatrice argentine) et Catalina Villar (productrice et réalisatrice argentine). La Muestra "Femmes de Cinéma" donnera donc l'occasion de découvrir un regard féminin et latino-américain sur le monde d'aujourd'hui (rappelons que le Brésil, l'Argentine et le Chili sont présidés par des femmes), aussi bien à travers des fictions que des documentaires.

Cinélatino ce sera aussi un palmarès : il faudra choisir parmi les 14 longs-métrages de fiction en compétition, les 7 documentaires et les 8 courts-métrages. Le festival offre également un panorama de films du continent sud-américain, à voir ou à revoir, des avant-premières, des rencontres, des débats, de nombreux réalisateurs/trices présents, des concerts et du tango.

Et pour commencer en beauté, Cinélatino a fait son ouverture en plein air avec le concert de Liubila suivi de la projection d'un programme de courts-métrages. 10 jours de fête et de découvertes aux couleurs de l'Amérique latine dans la ville Rose de Nougaro... celui-là même qui chantait "Sur l'écran noir de tes nuits blanches...".

Pour plus de renseignements, rendez-vous sur le site du festival.

Cinespana 2013 : trois prix pour Los Ilusos de Jonás Trueba

Posté par MpM, le 7 octobre 2013

los ilusosLa 18e édition de Cinespana s'est achevée par le sacre de Los ilusos de Jonás Trueba, récompensé à la fois de la Violette d'or du meilleur film, du prix d'interprétation masculine (Francesco Carril) et de la meilleure musique (Abel Hernández).

Ce deuxième long métrage du fils de Fernando Trueba (L'artiste et son modèle) est un film expérimental qui parle, avec poésie et liberté, du désir de cinéma, thème récurrent de la compétition 2013.

Trois autres films se partagent les autres prix : la heridaFrontera de Manuel Pérez (un huis clos dans une prison, quimêle détenus et acteurs professionnels) est distingué pour sa photographie, La plaga de Neus Ballús (documentaire sur différents individus confrontés à la crise sociale) pour son scénario et La Herida de Fernando Franco (sur une femme souffrant d'un trouble de la personnalité borderline) vaut un second prix d'interprétation à Marian Álvarez après celui remporté à San Sebastian en septembre dernier.

otelloA noter enfin que le public a récompensé El Cuerpo de Oriol Paulo (le nouveau polar des producteurs de l'Orphelinat Juan Antonio Bayona) tandis que Otel.lo de Hammudi Al-Rahmoun Font (mise en abyme du tournage d'une adaptation décomplexée d'Othello) recevait le prix du meilleur premier film et Dime quien era sanchicorrota de Jorge Tur Molto (portrait en creux d'un bandit-héros du sud-est de la Navarre qui volait aux riches pour donner aux pauvres) celui du meilleur documentaire.

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Le palmarès complet

Violette d'or
Los ilusos de Jonás Trueba

Meilleure interprétation féminine
Marian Álvarez pour La Herida de Fernando Franco

Meilleure interprétation masculine
Francesco Carril pour Los ilusos de Jonás Trueba

Meilleure photographie
Oriol Bosch Vázquez, pour Frontera de Manuel Pérez

Meilleur scénario
Neus Ballús et Pau Subirós pour La plaga de Neus Ballús

Meilleure musique
Abel Hernández, pour Los ilusos de Jonás Trueba

Prix du public
El Cuerpo de Oriol Paulo

Meilleur premier film
Otel.lo de Hammudi Al-Rahmoun Font

Meilleur documentaire
Dime quien era sanchicorrota de Jorge Tur Molto

Prix du meilleur court métrage
Eskiper de Pedro Collantes
Mention spéciale à
Bendito machine IV de Jossie Malis

Cinespana 2013 : retour sur la compétition

Posté par redaction, le 4 octobre 2013

cinespana 2013Le Festival du Cinéma espagnol Cinespaña, dont la 18e édition se déroule à Toulouse jusqu'au 6 octobre, est nécessaire pour se rendre compte qu’il n’existe pas qu’un seul réalisateur en Espagne, l'incontournable Pedro Almodovar, connu de tous !

Au contraire, nous pouvons découvrir et apprécier toute une diversité de propositions artistiques, de long-métrages, premiers films, documentaires, courts-métrages, tous inscrits dans le cadre de la programmation du festival.

Patrick Bernabé, le vice-président et programmateur de Cinespaña, expliquait récemment que la sélection pour la compétition officielle est centrée sur le cinéma d’auteur et se fait selon plusieurs critères parmi lesquels prime avant tout la qualité du film dans son ensemble : qualité du scénario, critère d’originalité du film,  de sa proposition artistique, jeu des acteurs, etc.

Cette programmation très réussie pour sa 18e édition se caractérise effectivement par la qualité et la diversité.

los ilusosLos Ilusos de Jonas Trueba est un film expérimental, film dans et pour le film, métacinema ou cinéma qui se regarde et s’observe pour mieux trouver sa place. En même temps, il s’agit d’un film simple, qui s’écarte d’une narration cinématographique classique ; telle une recompilation de fragments de tâtonnements et possibilités.

Filmé en noir et blanc, avec une esthétique proche de la nouvelle vague, c'est un film poétique qui rend hommage au cinéma. Jonas Trueba, fils du grand réalisateur Fernando Trueba, a baigné dans le cinéma depuis son enfance et connaît son sujet. Il déclarait lors de l’interview qu’il nous a accordée que le film est construit sur trois axes fondamentaux : les amis, le besoin de continuer à travailler dans sa propre ville, Madrid, et l’appétit, le besoin ou la nécessité vitale de filmer. D’une grande originalité et d’une poésie rare, il s’agit d’une belle proposition de ce réalisateur talentueux.

Toujours axé sur le processus de création, ilusion l’expression de liberté en quête de reconnaissance de la place de l’artiste dans la société actuelle, Ilusión de Daniel Castro est une comédie à la fois drôle et intelligente. Daniel, le personnage principal du film, interprété par le réalisateur, est un scénariste qui cherche désespérément à vendre à un producteur son projet de comédie musicale ayant pour toile de fond la période de transition en Espagne [Nom donné à la période politique initiée en 1977, chargée d’assurer un rétablissement démocratique après la dictature de Franco].

Avec cette proposition loufoque et innocente à la fois de vouloir vendre une comédie musicale politique, le personnage principal nous livre toute une série de moments intimistes allant de simulation de remise de prix, possible préparation d’interview pour le Figaro et coups de gueule teintés d’humour à l’encontre de Haneke, réalisateur jugé trop « pessimiste ». Un film qui vaut vraiment le détour !

la fronteraLa Frontera de Manuel Pérez, est un film à caractère social, qui se déroule en huis clos dans une prison. Le groupe de théâtre de la prison de Quatre Camins à Barcelone se trouvera être mis en quarantaine suite à l’alarme donnée d’une possible contagion par un virus. L’isolement dans l’isolement et le manque d’information accentuent la manipulation, l’agressivité et l’égoïsme des sujets enfermés qui représentent finalement la société actuelle.

Il existe une frontière ou plusieurs : la frontière dans l’espace entre l’isolement et l’extérieur, la frontière psychologique ou personnelle des individus, la frontière esthétique dans un film qui se trouve entre le documentaire et la fiction. Le défi du film étant l’intégration, il mêle vrais codétenus et acteurs professionnels, et a été coécrit avec le groupe de théâtre de la prison en gardant comme prémisse l’isolement, la justification de cet isolement et un travail de groupe. Une proposition intéressante avec beaucoup de personnalité.

La Herida de Fernando Franco est un film intimiste, la heridatrès réaliste dans sa réalisation, centré sur le personnage d’Ana, interprété magistralement par Marian Alvarez, récemment consacrée meilleure actrice au Festival du Film de San Sébastian. Ana est une ambulancière épanouie dans sa profession mais isolée dans sa vie privée. Sa maladie, elle est borderline, fait qu’elle est toujours à fleur de peau, fragile, irritable, ce qui l’empêche de s’épanouir. Ce film qui a mis 5 ans avant de voir le jour est un film « dur » et « non commercial » selon les propos du réalisateur, Fernando Franco. L'idée de départ était de faire un documentaire sur cette maladie mais, observant que cela amenait à accentuer les symptômes des personnes borderline, le réalisateur a fait le choix de la fiction.

Marian Alvarez, l’actrice principale du film, lors de l’interview qu’elle nous a accordée, déclarait  sur le processus de travail du personnage : « J’ai eu beaucoup de temps pour préparer le personnage, car heureusement ou malheureusement le projet a mis beaucoup de temps a aboutir, je me suis centrée sur des recherches dont la source d’information principale provenaient de blogs, un temps pour répéter qui a été essentiel et ma proposition était m’ouvrir de l’intérieur. Je savais que cela allait être douloureux mais je savais aussi que Fernando (Franco) était derrière moi pour me soutenir. Ce personnage m’a amené un vertige immense j’avais besoin de lâcher prise sur toute forme de contrôle car le personnage ne prend conscience à aucun moment qu’il est malade ». C’est un des films incontournable de ce festival et il nous livre une belle prestation d’actrice.

la plagaLa plaga de Neus Ballus présente une double particularité dans cette sélection. Il s’agit d’un documentaire et c’est une femme qui le réalise. Ce film, présélectionné au Festival du Film de Berlin, est un documentaire car il s’agit de la vraie vie des personnages, mais présente une construction, une narration très proches de la fiction.

La Plaga est un beau voyage. Il nous livre une succession d’images très poétiques, une série de portraits de plusieurs individus très différents qui sont parfois amenés à se rencontrer (une personne âgée en maison de retraite, un agriculteur catalan, un lutteur de catch moldave, une infirmière philippine, une prostituée). Tous humains, simples et atteints par ce « fléau » qu'est la crise sociale (signification de La plaga en espagnol).

Enfin, Fil de Cain de Jesus Monllaó el cuerpoet El cuerpo d’Oriol Paulo, deux films à suspens ou films policiers, très bien construits, qui comptent avec la présence de José Coronado, en tant qu’acteur et invité spécial du Festival, sont sans doute les propositions les plus « commerciales » ou plus ouvertes au public. La salle était d'ailleurs comble lors de la projection de El cuerpo, le très attendu film de Rodar y Rodar, producteurs de L’Orphelinat (El Orfanato de Juan Antonio Bayona).

L'édition 2013 de Cinespana proposait donc une compétition diversifiée où on peut observer trois des tendances qui sont par ailleurs le reflet de l’actualité du cinéma espagnol :

- La baisse considérable du budget accordé à la culture en Espagne et des aides à la création s’est dramatiquement répercutée sur la production et les moyens de financement des films. La plupart des films présents à Toulouse sont donc par la force des choses autofinancés, c’est-à-dire financés par les réalisateurs avec leurs propres moyens.
- Une grande présence d’un métacinema ou de films faits pour ou dans le cinéma,  un cinéma qui s’observe, se regarde et cherche sa place.
- La présence d’un hyperréalisme et des films souvent à la frontière entre le documentaire et la réalité.

De difficiles délibérations attendent sans aucun doute les membres du Jury à l’heure de décider qui seront les lauréats de cette 18e édition de Cinespaña...

Banafcheh Pérez