Edmond, un portrait de Baudoin: la sensation que procure le dessin

Posté par vincy, le 30 septembre 2015, dans Critiques, Films.

Edmond Baudoin est un personnage pittoresque. Le dessinateur a commencé sa carrière dans la bande dessinée très tardivement, à la fin de sa trentaine, au début des années 80. Il n'a commencé à peindre qu'à 65 ans... Auteur d'une cinquantaine d'albums, dont deux primés au Festival de la BD à Angoulême, il a travaillé avec des auteurs comme J.M.G LeClézio, Fred Vargas, Tahar Ben Jelloin mais aussi des personnalités comme L'Abbé Pierre et Cédric Villani.

C'est avant tout l'un des plus grands dessinateurs contemporains. Il dessine debout. Parfois dessiner c'est juste un pinceau humide, sans peinture, qu'il glisse sur le bitume. Laetitia Carton a suivit le temps d'un été ce vieil homme qui parait toujours jeune. Son émerveillement permanent est sans doute ce secret de jouvence.

Le documentaire est un portrait, d'où son titre. Un portrait intime, d'où le prénom. Baudoin est public. Edmond est un transmetteur : il enseigne, il partage, il a ses enfants et petits enfants... Mais Edmond, un portrait de Baudoin esquisse aussi sa méthode de travail, sa vision du monde, ses complexes et ses doutes, son goût du récit et ses questionnements existentiels. Il y a une poésie humaniste qui se dégage du film et reflète cet homme curieux et humble.

De son village qu'il a beaucoup dessiné à sa vie qu'il a souvent raconté, les cases de ses albums se mélangent aux images réelles, formant un écho troublant où la magie du dessin cherche à retranscrire ce que l'artiste a vu. Mais cela ne suffit pas à percer le mystère de la création. L'homme a beau être nu au milieu d'un paysage de montagne sublime, il reste ce voile sur le motif et le talent qui le poussent à dessiner. Alors il reste l'inspiration, la mémoire et les émotions vécues. Le coup de pinceau gracieux, la précision du trait tentent de s'approcher d'une vérité qu'il déforme en la magnifiant en 2D.

2D comme Danse et dessin. Car Edmond est toujours en mouvement. Le geste est omniprésent. Il danse en boîte, il imagine un haïku sur l'espace public pour une chorégraphie dont le pinceau serait le guide, il danse sur ses pages blanches. C'est là sans doute que le film étonne le plus. Il nous happe dans un ballet inattendu.

Mais un film, un livre, une danse ou un dessin ne remplace pas ce que voit l'oeil, ce que ressent le corps. C'est toute la limite, qui semble l'écraser: arriver à la sensation. La restituer par l'art. Mission impossible qui nous rendent imparfaits... Simples mortels face à des orages effrayants ou des montagnes impériales.

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