Vous n'en avez pas marre?

C'est vrai que c'est tendance de critiquer le Net et ses start-ups, mais il y a de quoi s'énerver... A partir de concepts fumeux, certains lèvent des millions de francs. Pour quoi en faire? des affiches très laides, voire dénuées d'esthétique, placardées sur les bus, dans les métros. Des pubs TV soi disant humoristiques où les vieilles mémés en tablier et les pédés chauves sont humiliés par des tons criards et des slogans bêtes. Des sites pluôt 16 couleurs, avec des liens hypertextes partout, mais peu de textes... Où sont les journalistes des sites féminins? Même dans Elle et Femme Actuelle, il y a plus d'infos! Normal, le fric investit dans la pub ne peut pas payer les tape-claviers... On vous calibre un site en fonction de segments, de cibles, de nombre de caractères par page, de temps de lecture de l'internaute type...
On y place des cookies partout qui vous poursuivent et avalent votre "way of life". Pour mieux l'anticiper. C'est pour votre bien : ça vous fera gagner du temps et vous dépenserez de l'argent, en plus d'atteindre aux libertés individuelles.
Le grand truc, c'est les portails. C'est communautaire. L'idée est d'être un site qui permette d'aller sur d'autres sites, voire de piquer le contenu des autres pour en faire un site à moindre coût.
Pas très réglo comme business. D'ailleurs le web est passé directement du troc à l'escroc qui nous croque. On a oublié d'éditer les théories de la nouvelle économie. Celles où les producteurs feraient payer aux diffuseurs, comme dans n'importe quel autre média...
Bizarrement, depuis le rachat de Time Warner par AOL, puis de Universal par Vivendi, tous les analystes s'accordent à dire que le contenu est la plus forte valeur du web. Vous connaissez combien de sites de contenus en bourse? Vous avez remarqué combien de sites de contenus ont réussi à lever des fonds? Tout le monde parle de e-commerce, tout le monde oublie le vrai commerce. Tout le monde investit le Wap, tout le monde ignore les éditeurs de contenus.
L'une des rares solutions est de se coller à un grand groupe, qu'il s'appelle Canal, LVMH, PPR, France Telecom... Ecran Noir n'y échappera pas; l'indépendance n'existe pas pour des sites thématiques. Des Big Brothers, plus ou moins big, sont en train de naître. Il y a ceux qui veulent tout contrôler, de la production à la diffusion, en passant par les droits; d'autres qui se concentrent sur leur métier.
Car, finalement, combien produisent réellement un contenu, construisent une image, s'évertuent à créer un style, dialoguent avec leurs lecteurs?
Je ne préfère même pas vous entrenir des toponymies des sites : le K est très "hype", et le double o est carrément "fashion mortel". L'exemple idéal c'est évidemment Kelkoo : double k, double o, on frôle l'overdose d'imagination. Sans parler de Voonoo (pourquoi pas Voodoo!?). Facile à retenir, ou facile à mélanger? Car peut-on retenir toutes ces marques semblables, tous ces noms de domaines affichés, tous ces concepts confus qui nous prennent pour des cons, faut pas déconner...
Bon j'arrête avec mon esprit bougon façon Bacri aigri.
Parce qu'il y a de belles choses sur le web, depuis 5 ans... Mondomix en musique du monde, WebCity pour vous guider dans les villes, Nouvo.com pour regarder la TV, nos amis créatifs de cHmAn, Bechamel, Tokto, Oeil pour Oeil, Chewing.com, Atom Films..., Lonely Planet pour les belles photos du monde entier, les délires de Gizmoland, Magique Maman pour les émilie jolies, ...
Et puis il y a tous nos nouveaux amis : CineCourtsCom, CineInfo, Canoe, ... Car rien ne sert de critiquer si nous ne pouvons pas nous mêmes améliorer le sort de ce web qui s'appauvrit de jour en jour, contaminé par l'effet TF1 (recherche d'audience maximum > recherche de la qualité maximum). Quoique le site de TF1 est meilleur que le site de Canal, paradoxalement.
Donc, Ecran Noir se transforme un peu, pour s'adapter aux technologies actuelles : les téléphones mobiles, les Palm Pilot, les liaisons haut débit... A quoi cela servirait de défendre une certaine idée du contenu, et donc de la connaissance, de l'information, si nous ne sommes lus, vus par personne?
A partir d'une équipe de passionnés, après 4 ans de bons et loyaux services, il est temps de rentrer dans l'arène, et de défier les taureaux de Wall Street et de l'Euronext, avec une seule brindille : le texte. C'est par essence multi-support.

VCT / 14/07/00


 

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