Catherine Deneuve

Catherine Deneuve biographie



40 années d'un mythe

Deneuve

Elle fut princesse dans les années 60, puis Femme idéale, devenue Reine d'un cinéma mysogine, pour en être l'impératrice.
La carrière de Catherine Deneuve est unique au monde. Quelle actrice des années 60 possède aujourd'hui son statut? Que ce soit dans le cinéma de son pays (elle est l'une des 5 actrices les mieux payées), le cinéma mondial (certains de ses films anciens sont devenus des chefs d'oeuvre, ses plus récents sont exportés sur son seul nom), ou parmi les actrices (son aura et la pérennité de son succès en font l'un des derniers mythes du siècle).
Modèle de l'élégance et du style (très liée à YSL, elle a eu sa ligne de produits de beauté, Deneuve Perfumes), régulièrement citée dans les magazines de mode comme référence), photographiée par les plus grands, Marianne des années 70, elle a réussi à masquer sa vie privée tout en franchissant les époques.
Car Deneuve a changé comme le cinéma a changé.

Vénus des plus grands cinéastes...
Totalement évincée de la nouvelle vague (contrairement à Bardot, Belmondo...), elle tournera ses oeuvres les plus marquantes dans les années 60. En acceptant d'être dirigée par des auteurs aussi différents (et parfois nouveaux) que Polanski, Demy, Rappeneau, ou Bunuel, mais aussi Deville et Rappeneau, elle prête son visage et un talent qui cherche à s'éclore, à des réalisateurs qui l'ont menée à Cannes, Hollywood, et en fait sur les chemins d'une gloire culte.
La popularité de Deneuve nait dans ces années là avec d'immenses succès. Mais ses qualités d'actrices n'ont pas encore été reconnues.
La fin de cette décennie lui apportera un drame (la mort de sa soeur, la comédienne Françoise Dorléac) et Truffaut. Toujours à la recherche de films, qu'elle ne veut que servir, et donc de réalisateurs, parmi les meilleurs. Elle sera d'ailleurs souvent fidèle et retournera souvent avec eux: Truffaut, Rappeneau, Bunuel, Demy, et surtout Techiné (4 films)....
Fidèle aussi aux acteurs: Mastroïanni, Noiret, Auteuil, Montand, Delon, Bohringer, Piccoli, et surtout Depardieu (5 films). Bizarrement, à part Françoise Dorléac, Susan Sarandon et Danielle Darrieux, elle n'aura pas eu de face à face marquant avec d'autres actrices, jusqu'en 2000. Avec Dancer in the Dark et Björk, puis avec Huit femmes de Ozon qui la confrontera à Huppert, Béart, Ardant.

Marianne post-Bardot
Les années 70, plus proches de Romy Schneider et d'Annie Girardot sont ses années pauvres. En qualité, et en rencontres: on peut signaler Berri, Lelouch, Robert et bien entendu Melville. Elle tournera beaucoup de films, dans des registres plutôt populaires. Des succès comme Le sauvage sauve sa trajectoire. On parle désormais de Deneuve comme d'une beauté populaire, ce qui n'est pas forcément bien adapté à un cinéma assez réaliste, très radical. Elle tournera donc de nombreuses comédies françaises, où elle joue sans cesse ce rôle de belle blonde, frivole et attirante; elle échouera aussi dans son internationalisation.

Après Le Dernier Métro, les applaudissements
Le génie de Truffaut fut de reprendre des bribes de leur premier film (La sirène du Mississipi) et de le replacer dans un contexte moins noir, mais plus morbide. Il donnera surtout à Deneuve LE rôle de femme dont elle avait besoin. Le Dernier Métro, qui lui vaut son premier César, c'est la convergence de 20 années de vie au Cinéma: la maturité d'une femme de tête, la beauté épanouie, et le talent enfin reconnu mêlé à un cri de détresse d'un cinéaste qui hurle son amour pour un cinéma disparu. En pleine époque "Adjanienne", Deneuve relance sa carrière, et ose tout. Elle croise le regard de l'héritier de Truffaut, Téchiné.

L'audace qui perce la glace
Les risques sont avant tout dans le changement radical du choix de ses rôles. En acceptant de jouer des femmes banales, névrosées, le regard brisé, emplies de sentiments toujours plus ambivalents, elle va attirer un jeune premier nommé Tony Scott, mais aussi Alain Corneau, André Téchiné, Jean Pierre Mocky ; ainsi, délibérément , elle va "casser" son image, ou disons la faire évoluer. Sa survie est là. Elle avait bien pensé arrêté le cinéma au début des années 80...
Mais de nouveau, elle donne son image à de jeunes réalisateurs (Dupeyron), et se permet l'audace d'alterner avec des comédies populaires (L'Africain notamment). Sa curiosité, sa cinéphilie, son amour pour les aventuriers des images et des mots la poussent à se dépasser.
Sa côte remonte à un moment particulier du cinéma français: la nouvelle vague est oubliée, Belmondo et Delon cartonnent avec des magnums, Baye, Marceau, Adjani la concurrencent vivement. Schneider, Signoret s'éteignent. Deneuve symbolise plus une époque révolue, et en devient la Reine. Bardot étant à la retraite, Moreau sur les planches et Girardot à l'écart.
En 1986, elle présente Le lieu du crime à Cannes, en couverture de Première et des Cahiers du Cinéma! C'est le début d'une nouvelle ère, où Deneuve revient chaque année ou presque sur la Croisette, dont une en tant que Vice Présidente, aux cotés de Clint Eastwood. Mais sa valeur ne décuplera que dans les années 90.

Indochine, la Renaissance
Marc Esposito écrivait qu'"une star n'avait besoin que d'un chef d'oeuvre tous les 10 ans pour continuer à briller". En 1990-1992 elle tourne, présente et se fait récompensée comme jamais pour Indochine. Nominations aux Oscars et Golden Globes, et deuxième César.
Deneuve, est seule et unique, l'impératrice d'un cinéma qui se cherche une ambassadrice: elle ne récolte que l'admiration. Aux USA, ses récents films n'ont jamais eu autant de succès. La re-sortie de Belle de Jour la replace sous la lumière. Un succès estival inattendu en salles.
Une carrière aussi riche, contradictoire, tourmentée en fait un symbole du métier. Ses personnages sont toujours plus osés: soit perdus, soit en quête d'un idéal baffoué, entre la distance et la survie, le déséquilibre et la réalité. Même un journal aussi peu enclin au star-system que Libération qualifie son travail d'impeccable, d'impérial.

Jouer pour ne pas vieillir...: plus proche de Darrieux que de Garbo
Plus belle femme selon Gala, ou encensée par le New York Times, peu importe, Deneuve a imposé une passerelle entre le grand public et des auteur européens: Ruiz, Oliveira, maintenant Carax, Von Trier, ....Elle use de son pouvoir pour permettre à un certain cinéma de vivre.
En même temps, elle a conscience de la limite de ce pouvoir: Deneuve atteint un âge critique pour une actrice, et le succès demeure un argument nécessaire pour se maintenir au plus haut niveau.
Il serait dommage d'attendre sa retraite pour rendre hommage à cette grande dame au service de son art....
Avec un instinct de survie rare, elle enchaîne en cette fin de siècle un drame réalisé par Nicole Garcia, et de multiples seconds-rôles chez Wargnier, Garrel, Oliveira, Ruiz ; et enfin une comédie de Gabriel Aghion, qui avait ressuscité Ardant. Ses grands écarts, à un âge où les actrices sont plutôt au chômage, c'est une véritable passerelle entre les cinéphiles et les cinémas. Tour à tout comédienne de planches, maîtresse d'un jeune amant, grande dame proustienne ou délurée fumant un joint, elle multiplie les vies et les visages.
On la sent déçue de cette industrie qui n'a plus les mêmes règles. On la sent dépitée par tous ces seconds rôles trop peu enrichissants. Dancer in the Dark est un choix gonflé et une reconnaissance méritée. Elle va au fron pour défendre le film, et ses idées en faveur de l'abolition de la peine de mort.
Depuis son prix d'interprétation pour Place Vendôme, elle se cherche. On a murmuré qu'elle serait du prochain Chatilliez, du nouvel Aghion... Azéma et baye prendront sa place. Le Jacquot est retardé, voire annulé. Ozon la rescape et l'introduit dans son octogone féminin. Elle s'internationalise avec D'Artagnan. Vogue la place en couverture. Elle nous intrigue en jouant une Peau d'Ane d'un autre âge dans Le Petit Poucet de Dahan. Mais Deneuve a peur de cet avenir incertain, de ce cinéma parfois lointain, souvent trop charnel pour elle. Elle va voguer Au plus près du paradis, entre Paris et New York, grâce à Tonie Marshall. La star a besoin d'aller ailleurs. Comme si les scripts frenchys ne lui suffisaient plus. Comme si son statut l'étouffait comme un corset. Difficile tournant à gérer...?
Car s'il ne s'agit pas d'un mythe, elle est l'incarnation de notre idéal. Comme dirait Sandrine Bonnaire, "elle a une telle carrière!".

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