Ecran Rose, le ciné-zine gay de vos nuits blanches

Chronique de la 11ème édition du Festival Image et Nation Gay et Lesbienne.

Alix Tardieu - Septembre 98

Les Gays sortent du Village

Lorsqu'on m'a proposé de couvrir un festival d'homosexuels à Montréal, je n'y ai pas réfléchi à deux fois... D'une part, les scénarios des films gays sont souvent originaux et prêtent à réfléchir sur les conditions de cette communauté. D'autre part je me suis lancée un défi personnel de straight provinciale: fréquenter des gays et des lesbiennes pendant 15 jours et aimer ça! Aujourd'hui je peux vous le dire, si on me proposait de couvrir tous les festivals gays du monde je suis partante...

Avant le lancement même de l'évènement, je me suis retrouvée face à des gens adorables, amicaux et sans complexe. Voilà pour preuve une petite anecdote, alors que j'attendais patiemment mon accréditation au comptoir du bar, le Drugstore (transformé en QG du Festival pour l'occasion), j'observais les personnes venues acheter leurs billets. Tout d'un coup, je capte une conversation, un homme brun, très mignon, dans la jeune vingtaine, racontait ses ébats amoureux de la veille : "Pendant 4 heures il était attaché et je l'ai battu...", réellement sans complexe... La bonne humeur était présente et les salles allaient être combles.

Lorsqu'on sort d'un Festival des Films du Monde morose et que l'on se retrouve avec des salles remplies, un public récéptif, on ne peut être que content. C'est exactement ce qui s'est produit, notamment pour des films comme Love is the Devil, qui faisait l'ouverture, Gods and monsters (gagnant du prix du public du Festival),East Palace, West Palace (la salle a été prise d'assaut par la communauté asiatique..) ou encore Relax it's just sex.
Par contre, j'ai pu remarqué que les films abordant des thèmes gays attiraient un public à majorité masculine et inversement lorsque le sujet était plus féminin, comme le cancer du sein dans Murder, Murder. Est-ce-que les hommes se sentent peu concernés par les problèmes de leurs "collègues" du sexe opposé et les lesbiennes n'ont-elles pas les mêmes préoccupations que les homosexuels?

Comme nous le savons tous, le "Village" gay de Montréal se situe sur Ste Catherine Est, et franchement il doit être petit!! Tout le monde se connaît dans les files d'attente avant les projections. Mais il faut dire que les rencontres se font facilement, même pour une hétéro... Ainsi, j'ai pu croiser un cinéphile qui allait visionner plus de 20 films, ou encore d'autres personnes qui venaient pour se relaxer après leurs journées de boulot. Les séances étant le soir, Le public s'est agrandit, ne discriminant pas les travailleurs qui avaient droit, eux aussi de profiter de la très bonne programmation du Festival.

Mais revenu un instant à l'ambiance qui régnait dans les salles.
Tout d'abord, ne soyez pas surpris, ici le public rigole fort, et siffle les acteurs et même parfois les réalisateurs venus présenter leurs films. Ne vous méprenez pas, c'est toujours bon enfant!
Dans Gods and monsters, j'ai même pu sentir un sentiment de frustration remplir la salle, on attendait tous que la caméra descende lorsque Brendan Fraser a enlevé sa serviette afin de poser pour le "Maître", normal, ils nous avaient mis l'eau à la bouche en déshabillant ce bel acteur...

Un vrai succès pour ce Festival qui a bénéficié d'une large couverture médiatique (pas seulement via Fugues, l'hebdomadaire gratuit gay) et d'un public qui a répondu présent tout au long de ces 15 jours, malgré une absence de sous-titres français dans une programmation majoritairement anglophone.
Avec une telle programmation, le Festival se met lui-même la barre haute pour la 12ème édition, du 23 septembre au 3 octobre 1999.
On retrouvera certainement des thèmatiques, identiques à celles de cette années, comme le cancer (Murder, murder) ou le SIDA (Chocolate Babies, Le traité du hasard, Relax it's just sex...), des courts-métrages (Straight from the Suburds restera un trés bon souvenir, notamment par son originalité et l'environnement cartoon et Barbie dans lequel il évolue), des vidéos, des films anciens (Le cahier volé date de 1992) ou des primeurs.