(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Jury de la compétition officielle
Paul Schrader (président) : réalisateur américain
Hiam Abbass : actrice et réalisatrice française
Molly Malene Stensgaard : monteuse danoise
Nansun Shi : productrice hongkongaise
Mario Adorf : acteur allemand
Willem Dafoe : acteur américain
Gael Garcia Bernal : acteur mexicain
Palmarès
Ours d'or : Le mariage de tuya du Chinois Wang Quan'an
Ours d'argent : El otro de l' Argentin Ariel Rotter
Ours d'argent du meilleur réalisateur : Joseph Cedar pour Beaufort (Israël)
Ours d'argent de la meilleure actrice : Nina Hoss pour Yella de Christian Petzhold (Allemagne)
Ours d'argent du meilleur acteur :
Julio Chavez pour El otro de Ariel Rotter (Argentine)
Ours d’argent spécial : tous les acteurs de The good Sheperd de Robert de Niro (Etats-Unis)
Ours d'argent de la meilleure musique : David MacKenzie pour Hallam Foe (Grande Bretagne)
Prix Alfred Bauer : I'm a cyborg but that's okay de Park Chan-Wook
Statistiques
Accrédités : 19 000, issus de 127 pays
Journalistes : 4 000
Spectateurs : 430 000
Public : 200 000
Films : 373
Projections : 1 190
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AUTOPORTRAIT D'UN MONDE EN DEROUTE
Il y a la Palme, les Lions, les Léopards… et les Ours. Si tout le monde a déjà entendu parler de la première, ou fait mine de s'y intéresser, plus rares sont ceux qui connaissent le dernier, récompense pourtant prestigieuse distribuée à chaque Berlinale depuis 57 ans. Berlin, plus grand festival européen de la saison, fait en effet un peu figure de mal aimé. Quelque chose à avoir avec le fait qu'il se passe très à l'est, à une époque où les températures sont susceptibles de descendre loin en-dessous de zéro ? Allons, allons, pas de mauvais esprit. D'ailleurs, sur la Postdamer Platz, ce sont tout de même 19 000 accréditations qui ont été délivrées cette année... Le public, lui, s'est précipité en masse aux nombreuses séances qui lui étaient ouvertes, comme quoi on peut être à la fois un grand festival professionnel et une manifestation populaire. Avec ses 1 190 projections en douze lieux différents, cette 57e Berlinale a ainsi attiré en tout plus de 430 000 spectateurs.
Belle réussite pour un festival dont la compétition officielle mise presque tout sur une thématique politique et sociale éminemment sérieuse. Là où Cannes joue à fond la carte des auteurs, Berlin s'offre des films où le fond l'emporte systématiquement sur la forme. Ici, on observe le monde à travers le prisme sombre et terrible de la réalité : la seconde guerre mondiale, encore et toujours (Die Fälcher de Stefan Ruzowitzky, Ich habe den englischen König bedient de Jiri Menzel…), la dictature au Brésil (Das Jahr als meine Eltern im Urlaub waren de Cao Hamburger), l'apartheid (Goodbye bafana de Bille august)… et partout la notion de survie (au sida, à la mort d'un proche, à son passé…) et de combat contre les autres ou contre soi-même (Les témoins, Desert dream…)
Instantané d'une époque
Cette étrange homogénéité ne saurait être fortuite, de même qu'elle ne peut être une simple construction ex nihilo de la part des organisateurs. La pluralité et la variété de ces films qui interrogent le passé et le présent prouvent indubitablement que c'est à quoi s'intéresse tout un pan du cinéma mondial. De la République tchèque aux Etats-Unis, en passant par la Corée du Sud ou le Brésil, les auteurs cherchent à témoigner de leur réalité, de celle de leurs parents, de leurs voisins, de leurs enfants… Ces multiples vérités, mises bout à bout, forment un instantané passionnant d'une époque sans être pour autant un catalogue de la misère du monde. On y rit souvent (chez Park Chan-wook et chez Jiri Menzel notamment), on rêve, on s'abîme dans la contemplation, on pleure… Toutes la palette des émotions humaines est sollicitée, avec plus ou moins de bonheur comme dans n'importe quel festival, mais sans restriction.
Un sérieux qui n'a pas empêché Berlin de jouer la carte du glamour en invitant sur son tapis rouge de nombreuses stars internationales (Cate Blanchett, Sharon Stone, Jennifer Lopez, Emmanuelle Béart, Matt Damon, Antonio Banderas…) susceptibles d'apporter quelques paillettes à la manifestation. Sérieux ou pas, le cinéma doit avant tout faire rêver… et c'est de bonne guerre. Non, décidément, l'unique bémol dans cette compétition est peut-être l'origine géographique des films, assez concentrés sur l'Europe (la moitié des films sélectionnés), l'Amérique du Nord (4) et l'Asie (4). Seul le film du Suédois Bille August, une coproduction entre l'Allemagne, la France, la Belgique, la Grande-Bretagne, l'Italie et l'Afrique du Sud, traitant justement de l'apartheid, permet au continent africain de mettre un pied dans la compétition…
Palmarès forcément subjectif
Quoi qu'il en soit, pas facile d'être un membre du jury chargé de départager toutes ces œuvres. Paul Schrader et ses six compagnons ont mis l'accent sur la sensibilité en récompensant Le mariage de tuya du Chinois Wang Quan'an, le portrait émouvant d'une jeune bergère mongole cherchant un deuxième mari pour subvenir aux besoins de ses enfants et de son premier époux handicapé (ours d'or), ainsi que El otro du jeune Argentin Ariel Rotter (Grand prix du Jury et Ours d'argent du meilleur acteur masculin), ou l'histoire d'un homme qui prend l'identité d'un mort pour changer de vie. Comme toujours, un palmarès, c'est forcément contestable et subjectif, et chacun y trouvera à redire. Mais avec le jeu des multiples jurys indépendants chargés de remettre quantité de prix, la plupart des films intéressants tirent leur épingle du jeu : I'm a cyborg but that's okay du Coréen Park Chan-Wook reçoit par exemple le prix Alfred Bauer, du nom du fondateur du festival, censé récompenser une œuvre innovante, tandis que le très délirant Ich habe den englischen König bedient de Jiri Menzel se voit offrir le prix FIPRESCI. L'honneur est sauf, donc.
Du côté des autres sections (au nombre de huit, courts métrages, rétrospectives et hommages compris), on s'en met plein les yeux aussi, quoiqu'avec plus de légèreté dans les sujets. C'est notamment l'occasion de retrouver le génial cinéaste Hal Hartley qui donne une suite à Henry Fool près de dix ans après sa sortie. Fay Grim raconte ce qu'il est advenu de l'épouse d'Henry, après la disparition de celui-ci et l'emprisonnement de son frère, sur un mode délirant assez parodique qui rappelle les beaux jours des pastiches de film d'espionnage, tendance Le monocle rit jaune, mais avec une étonnante modernité. On croise également le plus célèbre cinéaste allemand vivant, Wim Wenders, à qui est consacré un documentaire passionnant, Von einem der auszog - Wim Wenders' frühe Jahre, de Marcel Wehn, où il se livre avec simplicité. Top designer brand watch about replica watches for gents. High end swiss fake watches.
Hong SangSoo, Michel Spinosa et Sarah Polley
Enfin, la section "Panorama" permet de découvrir le nouvel Hong SangSoo (Woman on the beach) ainsi que le dernier film de Michel Spinosa, Anna M.. Le premier raconte une nouvelle fois l'histoire d'un trio amoureux, une variation sur le thème de prédilection du réalisateur coréen (Conte de cinéma, La femme est l'avenir de l'homme, etc.) avec en plus énormément d'humour. Le second embarque une isabelle Carré époustouflante dans un récit de folie et d'auto-destruction qui tient en haleine jusqu'à son rebondissement final. A découvrir de toute urgence en avril sur les écrans français.
Côté découvertes, l'un des scénaristes culte de Johnnie To est passé derrière la caméra : Yau Nai Hoi, qui a écrit entre autres The mission et les deux Election, signe Eye in the sky, où des policiers suivent et surveillent des braqueurs de banque… Le polar hongkongais n'a jamais été aussi fleurissant, même si Hoi ne semble pas avoir hérité du talent de mise en scène de To. L'actrice Sarah Polley s'est elle aussi mise à la réalisation avec Away from her, un film touchant et maitrisé sur la maladie d'Alzheimer, avec Julie Christie en héroïne principale. Chapeau bas, car aborder un sujet pareil sans avoir l'air de tirer les larmes au spectateur est déjà un exploit en soi…
MpM
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