Production : Paulo Branco, Paradise Films, Gemini Films, Arte France Cinéma & RTBF
Distribution : Gémini Films
Réalisation : Chantal Akerman
Scénario : Chantal Akerman en collaboration avec Eric de Kuyper
Montage : Claire Atherton
Photo : Sabine Lancelin
Décors : Christian Marti
Son : Pierre Mertens
Musique : Sonia Wieder Atherton (direction musicale)
Costumes : Nathalie de Roscoät
Durée : 110 mn Ê

Casting :

Sylvie Testud : Charlotte
Aurore Clément : Catherine
Jean-Pierre Marielle :Popernick
Natacha Régnier :la femme enceinte
Lucas Belvaux : M. Delacre
Elsa Zylberstein :Michèle

 

 
Jean Pierre Marielle sur EN
Natacha Régnier sur EN
Elsa Zylberstein sur EN
  (c) Ecran Noir 96-04
Demaain on déménage 
France / 2004 / Sortie France le 3 mars 2004 
 
 
Une mère emménage dans le grand et vieux duplex qu’habite sa fille à Ménilmontant. Elle s’y installe avec son piano, ses élèves, ses meubles et une grande demande affective. Perturbée par cette présence, sa fille tente difficilement d’honorer une commande de livre érotique. Pour trouver l’inspiration, elle écoute partout autour d’elle : ce que dit sa mère, Monsieur Popernick qui cherche à louer son studio, ou encore les personnes venues pour visiter un appartement que les deux femmes envisagent de vendre. Toute une galerie de personnages qui vont se croiser dans ce lieu étrange. Ê
 
   Demain on déménage est la seconde comédie de Chantal Akerman, après Un divan à New York avec Juliette Binoche et William Hurt (1996). En dehors de ces deux films, la cinéaste est plutôt connue pour un cinéma plus personnel et très éloigné du simple divertissement. Elle avoue que c’est Pierrot le fou de Jean-Luc Godard qui lui a donné envie de faire des films. Après un bref passage dans une école de cinéma belge, elle réalise son premier film en 1968. C’est Saute ma ville , dans lequel elle incarne le personnage principal, ce qui sera souvent le cas par la suite. Après quelques autres travaux, elle est remarquée en 1975 avec la réalisation de Je tu il elle , dans lequel elle partage l’écran avec Niels Arestrup, et surtout Jeanne Dielman, 23 quai du Commerce, 1080 Bruxelles . Avec ce portrait de femme incarnée par Delphine Seyrig, elle s’intègre parfaitement au nouveau cinéma féminin qui émerge alors. Parallèlement aux fictions, elle s’illustre dans la réalisation de divers documentaires. Récemment, elle a ainsi tourné Sud , documentaire sur les relations entre les noirs et les blancs au Texas (1998) et De l’autre côté , sur la perception négative des mexicains par les américains de la zone frontière (2002). En 1996, elle surprend en tournant une comédie à tendance romantique assez éloignée de ses précédents films. C’est Un divan à New York , destiné à toucher un plus large public (ce qui ne sera pas vraiment le cas car le succès fût limité). Le film raconte l’échange d’appartement entre un psychanalyste new yorkais et une danseuse de Belleville. En 1999, elle est saluée par la critique en présentant une adaptation de «La Prisonnière » de Marcel Proust. C’est La Captive avec Sylvie Testud, Stanislas Merhar et Aurore Clément, film mystérieux au charme éthéré. Avec Demain on déménage , Chantal Akerman s’essaye de nouveau à la comédie et retrouve Sylvie Testud et Aurore Clément. Au départ, Olivier Gourmet et Nathalie Richard devaient faire partie du projet. Mais le sort en a voulut autrement et c’est finalement Natacha Régner et Lucas Belvaux qui ont participé à l’aventure.
 
 
AU THEATRE CE SOIR, LES COSTUMES SONT DE DONALD CARDWELL, LES DECORS DE ROGER HART.

«- Les rideaux sont sales.»

Que dire de Demain on déménage ? L’affaire est délicate car l’estime que l’on a pour Chantal Akerman est grande. Néanmoins, avec son dernier film, nous sommes plus proche du Divan à New York que des autres travaux de la cinéaste. Et habitués à un cinéma profond et engagé, la déception nous rend perplexe. Ici, point de profondeur. On assiste près de deux heures durant aux pérégrinations d’une jeune femme, de sa mère et de plusieurs visiteurs dans un appartement chaotique. Et ces tribulations sont malheureusement peu captivantes et l’on se demande quel est le propos de la réalisatrice. Alors bien sûr, d’aucun pourront dire qu’un charme discret et une légère absurdité farfelue flottent sur le film. Mais là où un Hervé Le Roux ou un Mathieu Amalric réussissent parfaitement à dépeindre une douce folie dans leurs respectifs On appelle ça le printemps et Mange ta soupe ou, encore, là où une Jeanne Labrune parvient a nous donner ses fantaisies réjouissantes, Chantal Akerman nous laisse tristement de marbre. Il y a bien l’appartement (magnifique) qui lui seul détient un mystère intrigant par son apparence labyrinthique et désuet. Il y a bien aussi certains jolis plans de Sylvie Testud, la clope au bec, cherchant l’inspiration devant son ordinateur. Mais les personnages et le film sonnent creux. Nul charme n’émane de ses caractères fantoches et trop caricaturaux pour être un tant soit peu crédibles et touchants. Tout paraît poussif, surfait et théâtral (mais du mauvais théâtre). Plus le film avance, et plus on a le sentiment d’assister à une sorte de représentation familiale jouée par des enfants à la fin d’un repas de Noël. Aucune intrigue. Des scènes vides de sens qui, distendues et incohérentes, s’enchaînent les unes après les autres en égrenant des paroles qui ne sont pas davantage signifiantes. Heureusement qu’il y a Jean-Pierre Marielle et Elsa Zylberstain, les seuls à apporter un peu de poésie et de crédibilité à leur personnage. Les scènes qu’ils illuminent de leur présence sont quasiment les seules à faire résonner un écho charmant mais malheureusement trop rares.

- Laurence