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Eructations, éjaculations, confessions et contes de la folie ordinaire
Valérie Lemercier au Palace
spectacle co-écrit avec Brigitte Buc
du 5 novembre 2008 à janvier 2009
Le Palace : 8 rue du Fbg Montmartre - 75009 Paris
Résa : 01 40 22 60 00 www.reeftiger.fr
Elle se trouve piètre cinéaste, mais revendique un talent d’écriture. Elle n’aime pas jouer les drames (une seule exception, Vendredi soir) et donc s’investit dans le drôle. Elle aime passionnément les planches, mais n’y revient que tous les cinq ans, et même, ce coup-ci sept ans. Casino de Paris, folies Bergères, et désormais le Palace. Lady Palace. Valérie Lemercier inaugure cette nouvelle salle parisienne avec un spectacle neuf. Rien à voir avec du stand-up. Il s’agirait presque d’une pièce de théâtre sous forme de puzzle, où une mère possessive croise un veuf belge, une attachée de presse blasée, la fille adoptive de Chirac et une voisine grincheuse. Des personnages truculents et bien vivants, que l’on semble connaître en deux phrases et dont les névroses nous paraissent si familières.
L'ecsta, ça leur donne envie de baiser, et sur scène ça sert pas à grand chose
Car au-delà de l’écriture, finement ciselée, Lemercier habite complètement sa créature, modifiant sa voix, utilisant des accents, jouant sur une posture ; son accessoire, une grande écharpe rouge fait le reste et « habille » (c'est-à-dire différencie) celui qu’elle incarne. Avec cette sobriété vestimentaire et ce classicisme dans la mise en scène, elle peut se permettre de tout transgresser. Elle parle avec un naturel insolent d’inceste, d’homosexualité, de drogue, de suicide, ou encore d’échangisme. Elle interpelle quelques « célébrités » en les invitant dans ses sketches : George Moustaki, Jacques Chirac, Patrick Sébastien… Lemercier nous raconte des histoires pour adultes, hilarantes et amères, où les névroses de chacun se délient sous forme de confessions intimes, révélant le poids de leur souffrance. Bien sûr on en rit, parce que l’émotion est aussi présente, la sociologie et la psychologie bien mélangées. Il ne peut y avoir d’humour sans amour. On en rit de les voir malheureux.
Ainsi ces traversées de plateaux, en diagonale, n’osant pas regarder les spectateurs, tête baissée, se recroquevillant sur un foulard, n’osant pas avouer la culpabilité d’avoir donner un gilet offert en cadeau ou tout autre crime du politiquement correct. Cathartique, le spectacle de Lemercier ?
La Nespresso c'est mieux que la Senseo
En tout cas salutaire, car osant aborder quelques tabous sous l’angle d’un esprit ouvert. Comme chez un psy… Ne cherchant jamais à comprendre, mais toujours à justifier ces petits travers qui font que l’être humain trouve son bonheur dans des sentiers pas forcément balisés. Cela permet de décomplexer tout le monde, de nous libérer et d’élargir la norme à l’infini. Avec quelques limites : d’accord pour uriner sur son époux adoré, dans la baignoire, mais pas pour lâcher un colombien, qui sera mieux à la toilette.
Une heure trente de plaisir absolu où le cru n’est jamais vulgaire, s’entremêlant avec un bon goût assumé et un ton enfantin, ludique, parfois virulent et gentiment méchant, toujours juste, décalant la grossièreté vers une certaine réalité : l’observation de notre folie ordinaire.
Ainsi cette bobo, jeune bourge bien française, arrogante, prétentieuse, donneuse de leçons, qui n’en peut plus de la soirée chez les voisins et qui dénoncent l’immoralité de leurs mœurs : celle qui ne mange que deux fruits et légumes par jour, l’autre qui jette un slip sale, celui qui ne nettoie pas son pot de yoghourt avant de le mettre dans le bac jaune, … l’intégriste de la politique du recyclage, de la bonne conduite environnementale, l’adepte des slogans « mangez pas trop de sucre pas trop de sel pas de gras ni chaud ni froid… ». Elle revient par intermittence, régulièrement, nous harponner, nous houspiller. On la déteste et on s’en régale. Cette Parisienne est le prototype parfait de la galerie sociétale du nouveau spectacle de la comédienne. Lemercier, égérie des gays, des bobos, attirent en fait un public très divers, qui ne goûte pas forcément son regard féroce, manquant peut-être d’autodérision.
Un Palace catégorie Formule 1
A moins que ce ne soit le nouveau Palace qui les ait indisposés. Convoqués à 20 heures, les spectateurs ont découverts un bordel très français. La salle ne gérait pas l’afflux de gens. 20h15 tout le monde n’était pas encore installé. Un surbooking avait obligé l’installation de chaises supplémentaires, rendant bourriques les pauvres hôtesses, munies d’un plan. Serrés serrés, on peut s’interroger sur la sécurité d’une telle salle en cas d’incident, tant, pour sortir, c’est aussi long que pour entrer. A cela on ajoute : tout ça pour ça. Tant de travaux pour une salle si sobre, si « rustre », sans bar, ni salon d’attente. Une usine à rire ?
C’est possible quand le comique est débutant et le billet coûteusement raisonnable. Mais Lemercier est une star, et le ticket vaut de l’or. Et le Palace lui n’a rien d’un établissement de luxe.
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