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Le monde révolu de Vionnet
Musée des arts décoratifs à Paris
du 24 juin 2009 au 31 janvier 2010
scénaographie : andrée putman
Vionnet est aujourd’hui un nom qui évoque un monde révolu, celui d’une époque où l’élégance faisait sa révolution, où les femmes allaient progressivement gagner leur indépendance et où l’excellence était une exigence. Si Worth créa la figure du couturier, Doucet celle du couturier-esthète et Poiret celle du couturier-star, Vionnet incarne une visionnaire projetant ces modèles dans son époque.
A 35 ans, à la veille de la Première guerre mondiale, Madeleine Vionnet fonde sa maison de couture. Paris vit encore une époque de grande effervescence créative. Vionnet ne se retrouve pas dans les ornementations chargées et les parures fastueuses de ses confrères. Elle crée alors un style, son propre style, le style d’une femme moderne. Sa maîtrise des coupes en biais et des drapés lui permet de concevoir des modèles d’une légèreté extrême. En apportant du mouvement dans la mode, Vionnet émancipe le corps féminin.
« En enlevant le corset, en permettant aux femmes de se réapproprier leur corps, elle a établi le vocabulaire contemporain de la mode et atteint une perfection stylistique inégalée» précise Pamela Golbin, la commissaire de l’exposition qui lui est consacrée au Musée des Arts Décoratifs. Dans son travail, il y a, en effet, une harmonie unique entre le vêtement et le corps. Ses drapés minimalistes, la fluidité et le tombé des matières permettent, à la fois, sensualité et sophistication.
Minimale, Vionnet l’est par ses recherches et ses expérimentations. Elle est en quête d’une ligne épurée. La couturière veut aller à l’essentiel : « Elle va dépouiller le luxe comme elle va épurer la forme en partant des trois figures archétypales, le carré, le rectangle puis, en 1929, le cercle » analyse Pamela Golbin.
Vionnet ne se contente pas de secouer l’univers feutré de la couture. En 1921, elle lance son slogan « copier c’est voler » et obtient des tribunaux l’extension de la protection des créations artistiques aux modèles de la couture. C’est une grande victoire qui permet les premières luttes contre la contrefaçon.
Dans le domaine social, Vionnet fait figure, également, comme une pionnière. Son activité connaissant une grande prospérité, elle s’installe au 50, avenue Montaigne. Les 1200 ouvrières de la maison se retrouvent dans ce qui s’appelle « L’Usine » qui regroupe les ateliers, les salons de présentation des collections mais aussi une crèche et un cabinet médical.
Après avoir traversé la crise de 1929 et avant le cataclysme de la Seconde guerre mondiale, Madeleine Vionnet décide de fermer sa maison en 1939. Théophile Bader, le fondateur des Galeries Lafayette et son principal actionnaire, souhaitait vendre des modèles Vionnet produits en grande série dans ses grands magasins. Intransigeante, Vionnet refusait de voir ses modèles recopiés en grande série avec une qualité moindre. Elle a une vision absolue de son métier. Ses modèles, sa mode, ne peut pas ne pas être d’une qualité parfaite.
L’héritage de Madeleine Vionnet à la mode est considérable. Elle a, pour toujours, changé le style de la femme contemporaine. Elle a apporté de la légèreté et de la souplesse. Elle a apporté cette subtile dose de féminité d’une extrême élégance qui demeure, aujourd’hui encore, dans le monde de la couture.
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