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Nouvelle Vogue
Respecté et redouté, Vogue est une institution dans le monde de la mode. En
1920, au lancement de sa version française, Vogue se définissait comme "le
magazine le plus luxueux et le plus élégant que l'on puisse imaginer". Ses
différentes éditions cultivent, chacune à sa façon, la diversité de la
mode. Après de 10 ans au service du Vogue Paris, Carine Roitfeld, sa
mythique rédactrice en chef a quitté le magazine pour être remplacée par
Emmanuelle Alt, l'ancienne Rédactrice en chef Mode.
Pendant cette décennie, Carine Roitfeld a transformé une dame respectable
et sage en une jeune fille glamour et sexy, provocante et politiquement
incorrecte. Ancien mannequin et égérie de Tom Ford, Carine Roitfeld est à
l'origine du "porno-chic". Que l'on apprécie, ou pas, elle portait une
vision radicale et extrême sur la mode et sur son époque.
L'annonce du départ de Carine Roitfeld n'a pas été, néanmoins, une totale
surprise. Depuis plusieurs mois, des rumeurs de tensions fortes au sein du
Vogue Paris circulaient. L'interdiction d'accès de l'équipe Vogue aux
défilés Balenciaga depuis un an avait marqué fortement les esprits. Son
activité de consultante auprès de quelques marques en marge de Vogue avait
fait l'objet de critiques. Ce mélange des genres, si français, était de
moins en moins toléré et de plus en plus de voix s'élevaient contre ces
pratiques. Dernièrement, enfin, son soutien à Hakaan Yildirim, un jeune
créateur turc basé à Londres pour le prix de l'ANDAM 2010 avait été
sérieusement remis en question. On s'interrogeait sur le manque d'intérêt
de la rédactrice en chef du Vogue Paris pour la jeune création parisienne.
Le numéro de décembre du Vogue Paris pourrait, d'ailleurs, être considéré
comme une sorte de déclaration d'adieu, un concentré de son travail et de
son style : un vibrant hommage à Tom Ford, une série trash par Terry
Richardson, le duo Mert Alas & Marcus Piggott pour la couverture, etc... Ne
manquait que Mario Testino, l'autre inséparable des aventures de Carine
Roitfeld.
Une page se tourne pour le Vogue Paris... Le choix d'Emmanuelle Alt pour
lui succéder était naturel. Mais si les griefs contre Carine Roitfeld
étaient légitimes, il est surprenant, de la part de Condé Nast, d'avoir
choisi une des femmes qui incarnait le plus ce système des affinités
électives. Collaboratrice des marques Balmain et Isabelle Marant,
notamment, Emmanuelle Alt a très souvent privilégié dans les pages du
magazine ses "chouchous" qui lui retournaient ses faveurs avec des contrats
de consultante.
A voir, à présent, si la nouvelle rédactrice en chef aura le talent et
l'instinct pour imposer au Vogue Paris de la nouveauté et de la modernité
dans un monde toujours plus rapide et avec des marques omniprésentes et
omnipuissantes.
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