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Écran Noir vous présente cet ouvrage qui ne doit pas être considéré comme un simple accompagnement du documentaire de Serge Bromberg et Éric Lange, Le voyage extraordinaire. Réalisé par Séverine Wemaere, déléguée générale de la Fondation Technicolor, et Gilles Duval, délégué général de la Fondation Groupama Gan, La couleur retrouvée du Voyage dans la lune de Georges Méliès vaut vraiment le détour !
L’ouvrage, édité à un tirage limité, ne se concentre pas exclusivement sur Le voyage dans la lune et sa restauration. Il revient tout d’abord sur la vie et carrière de Georges Méliès, abordant ses succès et son infortune. Le difficile virage des années 1910, avec la création des salles de cinéma et un public de plus en plus présent qui réclame de la diversité. Une production qui s’intensifie et un Méliès, artiste indépendant, qui peine à faire un film par semaine, et qui ne veut pas s’éloigner de ses fééries et de son théâtre filmé. Cela le conduira à la faillite. Forcé de vendre ses studios, Méliès tient dans les années 20 un stand de jouets dans la gare Montparnasse. Heureusement, la création, au début des années 30, de la Cinémathèque française le ressort de l’ombre et il reçoit enfin les honneurs qu’il mérite.
Le livre ne cesse de replacer le cinéma de Méliès dans le contexte de l’époque. Et il décrit avec précision les différentes étapes des tournages du cinéaste : création des décors, casting, horaires de tournage en fonction de la lumière naturelle, studio construit sur mesure, distribution, etc. On peut littéralement s’immiscer dans l’intimité de Georges Méliès et découvrir à quel point, non seulement, il devait faire face à une concurrence impitoyable mais aussi, les techniques et les innovations dont il usait pour améliorer ses œuvres et être plus performant.
Toutes ces informations sont accompagnées d’une documentation riche et inédite. En effet, à l’occasion de la restauration du Voyage dans la lune, des recherches ont été effectuées dans des archives aux quatre coins du monde et de nombreux documents ont été retrouvés. Ils donnent une image plus nette de l’artiste qu’était Méliès. Il était davantage un artisan, un travailleur infatigable pour qui la technique ne devait être qu’au service de l’imaginaire. Sa précision et son perfectionnisme n’étaient là que pour concrétiser ses rêves sur pellicule. On peut notamment remarquer que dans une de ses lettres, il fait la liste des qualités du cinématographe. Des plans, des photographies montrent ses studios de Montreuil, où il peint ses décors posés à plat sur le sol. D’autres photographies représentent des images en couleur du Voyage dans la lune, d’autres sont des programmes, des textes de Méliès ou encore des photos de son stand de jouets gare Montparnasse. Une interview du groupe Air et des lettres de grands du 7e art (Martin Scorsese, George Lucas et Terry Gilliam) complètent admirablement ce beau livre.
Grâce à cet ouvrage, Sandrine Wemaere et Gilles Duval rendent parfaitement hommage à Georges Méliès dont les films font la transition entre l’art du XIXème siècle et celui, naissant, du XXème siècle dont Griffith sera davantage le représentant. La couleur retrouvée du Voyage dans la lune de Georges Méliès est ainsi un ouvrage qui permet de résumer à la fois la restauration du film et l’incroyable carrière du premier grand cinéaste de l’Histoire du cinéma.
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