LOUIS DE FUNES

IL ÉTAIT UNE FOIS SERGIO LEONE




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 (c) Ecran Noir 96 - 24


Mars 2012

TIM BURTON, L'EXPOSITION
Monstres & Cie

Exposition du 7 mars 2012 au 5 août 2012
La cinémathèque française, Paris 12e
Livres : Le catalogue de l'exposition (64 pages, 14,9€) ; L'art de Tim Burton (430 pages, 249 €)
Rétrospective : du 7 mars au 23 mai, intégrale des films de Tim Burton et carte blanche au cinéaste
Conférences : 12 mars (L'art des morts), 16 mars (Effets spéciaux des origines à Tim Burton), 26 mars (La géographie imaginaire des films de Tim Burton)
Colloque : Tim Burton, horreurs enfantines le 5 avril

Tim Burton est sans aucun doute l’un des cinéastes les plus cultes de ces trente dernières années, avec un univers singulier et une imagination prolifique. L’exposition qui lui est dédiée a été initiée par le Museum of Modern Art de New York il y a deux ans. Au croisement entre art pictural et création cinématographique, entre animation et science-fiction, l’œuvre de Burton méritait incontestablement un tel hommage.

On reprochera, hélas, que l’exposition soit un peu à l’étroit, sur un seul étage de la Cinémathèque française. Certains accrochages sont si haut que l’on risque le torticolis. Cette impression de grenier, certes organisé, débordant de trésors cachés, nous fait même tourner la tête. Sans compter les éclairages qui se reflètent dans les œuvres. On s’interroge finalement sur la capacité de cette scénographie (moins audacieuse que celles de Kubrick ou d’Almodovar) à pouvoir accueillir des centaines de visiteurs à la même heure. D’autant que l’étiquetage est parfois difficile à lire, sous un écran, par exemple.

Car l’exposition est promise au succès. En trois parties, inégales - le Burtonarium, L’écurie Disney et Burton cinéaste - on suit un parcours thématique et vaguement chronologique où l’on part de ses sources d’inspiration pour arriver à l’aboutissement cinématographique.

Manège enchanté

Immersion dans le noir et beau choc visuel avec un carrousel fluorescent. L’exposition débute sous le signe des monstres et des créatures. C’est la partie la plus foisonnante. L’hybridité est rapidement le mot qui définit le mieux son monde à la fois pop art et gothique, peuplé d’individus et d’animaux hors du commun, des « anti héros d’une divine comédie » ou d’une délicieuse tragédie. Les marginaux deviennent attachants, les enfants étranges, les robots loufoques. « J’aime les personnages extrêmes mais qui n’ont pas conscience de leur étrangeté » explique Burton.
A coup sûr, ça l’inspire : tableaux, ébauches, dessins, croquis, BD, écrits (de lycée), brouillons, … l’exposition montre que Tim Burton dessine partout, sur n’importe quoi, même des petites serviettes carrées. « Peu importe que je sache dessiner ou pas, l’important c’est que j’aime ça » confesse l’artiste, qui avoue y trouver une grande liberté. Ce qui étonne peut-être c’est la grande variété de styles de son coup de crayon.
De sculptures en objets, de publicités en web fictions (Stainboy), de courts métrages d’adolescents en costumes de films, l’univers de Burton se décline sous toutes les formes.

Le désenchantement Disney

Mais après la grande galerie fantastique de freaks, clowns, cadavres, animaux et autres humains remodelés par son regard, on pouvait s’attendre à une salle aussi fascinante pour sa partie cinématographique. Son passage chez Disney est celle où l’on voudrait s’attarder le plus longtemps : courts-métrages, esquisses de projets,, on découvre déjà ce qui hante Burton. Vincent (en hommage à Vincent Price), Hans et Gretel, Trick or Treat, True Love, Frankenweenie révèlent déjà son talent et sa vision du monde. Yeux exorbités, hallucinés, crevés, cousus : les personnages de Tim Burton ne voient pas le monde de la même façon que le commun des mortels. Le plus intéressant est sans aucun doute la lettre d’un cadre de Disney à propos de sa BD The Giant Zig : «trop dérivée de Dr. Seuss pour être mise sur le marché», « l’artistique est bon».

Le Royaume des ombres dans la lumière

Reste alors la partie finale, qu’on imaginait être l’apothéose : le cinéma. Et c’est une cruelle déception qui s’abat sur nous. Hormis l’art topiaire grandeur nature qui rappelle Edward aux mains d’argent, le visiteur sortira frustré de ce dédale autour des films de Burton. D’une part l’animation prend l’ascendant sur les autres films. Corpse Bride et L’étrange Noël de Monsieur Jack sont sur-représentés (même si on apprécie la mise en scène des petites têtes de Jack). Ainsi Ed Wood se résume à un pull rose, Dark Shadows et Alice à quelques petits dessins encadrés, Edward aux mains d’argent à sa main, sous vitrine. Mars attacks ! dispose, comme Batman, d’un peu plus de place. Mais rarement la cinémathèque n’a autant étouffé l’œuvre cinématographique d’un cinéaste dans une de ses expositions. On peut aussi s’asseoir pour voir des extraits de chacun de ses films : pourquoi ne pas avoir opté pour un montage original renvoyant les films les uns aux autres ?

Ce sentiment de rendez-vous bâclé s’achève dans une boutique minuscule, où Mugs, Tragic Toys, Magnets, Stickers, Jeux de cartes, Livres (dont L’art de Tim Burton à 249 euros), Cartes postales, T-Shirts viennent tenter votre carte de crédit. On aurait préféré sans doute qu’un Beetlejuice vienne nous faire visiter les enfers ou qu’un chevalier sans tête déboule de nulle part.

Reste que pour les fans de Tim Burton, cette exposition permet d’explorer toute sa créativité et, paradoxalement d’oublier le cinéaste, en valorisant avant tout son œuvre artistique, celle qui remplit ses nuits et sa tête chevelue.

- aristo-fan    


Tim Burton sur Ecran Noir  - Site internet de l'exposition