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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Production : Masayuki Mori, Takio Yoshida
Réalisation : Takeshi Kitano Scénario : Takeshi Kitano Montage : Takeshi Kitano Photo : Katsumi Yanagijima
Musique : Joe Hisaishi
Costumes : Yohji Yamamoto Directeur artistique : Norihiro Isoda
Durée : 113 mn
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Miho Kanno : Sawako
Hidehito Nishijima : Matsumoto
Tatsuya Mihashi : Hiro
Chieko Matsubara : la femme du parc
Kyoko Kukada : Haruna
Tsutomu Takeshige : Nukui
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Dolls
Japon / 2002
30.04.03
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«Merry Chritmas, Mr Laurence …». Ainsi découvrions-nous pour la première fois, la larme facile, le visage angélique et poupon de Kitano Takeshi, chef de camp japonais condamné à être exécuté, à la toute fin de Furyo de Nagisa Oshima en 1982.
Deux décennies se sont écoulées.
Deux décennies durant mises à profit pour devenir le plus grand cinéaste et comédien japonais vivant, et l’un des plus grands cinéastes tout court… Peu des occidentaux que nous sommes est à même de concevoir à quel point Kitano-san (« san » pour « Monsieur ») est une icône dans son Empire. Du Soleil Levant comme dans celui du 7ème art.
Que l’auteur et comédien sensible de Hana-bi puisse se balader déguisé en lapin ou carrément à poil dans les rues de Tokyo pour NHK. Que le yakusa ringard et attendrissant de L’été de Kikujiro est aussi, au Japon, l’animateur (généralement saoul) d’un jeu télévisé proche de Fear Factor, en plus volontairement crétin, qui ferait passer Lagaf’ pour un intellectuel mormon (si ça existe…).
Peintre, romancier, essayiste, commentateur sportif, joueur de base-ball ou clown, Takeshi Kitano transforme en yens et en poésie tout ce qu’il touche. Et en beauté surréaliste de même.
L’inconscience consciente, et l’inverse, au stade ultime du sublime. L’enfant lynchien de Coluche et d’Orson Welles…
Le paysage cinématographique de Takeshi Kitano est à l’image de son visage. Déformé, meurtri, magnifique et contradictoire s’il n’était aussi complémentaire, depuis un accident de scooter survenu une nuit d’août 1994, sans casque et complètement bourré.
« Un suicide raté », comme il se gausse silencieusement à définir aujourd’hui… Une tronche entre Buster Keaton et une Madone de Picasso, pour avoir perdu toute expression musculaire du côté droit tandis que le gauche est constamment secoué de tics… allant jusqu’à faire croire, au sortir du coma, qu’ils ne reconnaissait pas ses producteurs.
Comme ça, juste pour faire chier… ou être libre.
L’univers de Kitano est bercé de mafieux nippons qu’il interprète la plu part du temps. Qu’il aide un enfant à retrouver sa mère (L’été de Kikujiro), qu’il déglingue à tout va ceux qui l’ont trahi (Sonatine) ou dont la dernière exécution est celle, poétique, drôle et amoureuse, de sa femme malade (Hana-bi)… avant de se coller une balle dans la tête…
La violence et l’amour sont indissociables, tous les dieux l’ont décidé ainsi…
Sa propre violence d’enfant battu par père, mère et copains par exemple, et l’amour de l’autre avant tout. Thématique extrême et caricaturale s’il ne la sublimait constamment dans la forme, à l’instar d’une plume emportée par le vent (ironie de l’auteur de ses lignes pour illustrer la frontière entre poésie et lourdeur poétique!).
Dès lors, il n’y a plus à être psychanalyste pour saisir l’interêt de Kitano lorsqu’il découvre Monzaemon Chikamatsu – qui est au Japon ce que Shakespeare est à l’occident - auteur de 110 pièces de Bunraku et 30 de Kabuki, et dont l’une des œuvres maîtresses s’intitule …"Les Amants Ensanglantés". Jeune témoin d’une histoire semblable alors qu’il n’était encore qu’aspirant comédien à Asakusa (quartier de Tokyo), Kitano développe et entremêle, dans l’esprit de Chikamatsu, deux récits supplémentaires et complémentaires à son intrigue principale, qu’il introduit au travers le Bunraku : théâtre de marionnettes avec récitant qui remonte au XVIe siècle et dont sa grand-mère maniait « la guitare ».
Au loisir d’écouter l’artiste, prêtons lui la parole : «On m’a dit que mes films avaient tendance à avoir une teinte bleuâtre. Je me suis dit « Bon sang, je fais des films en couleur ». Alors j’ai pensé que ça vaudrait le coup de tenter de réaliser un film avec une grande variété de couleurs, celles-là même que j’avais toujours évitées dans mes films précédents. Puisque le film devait se tourner au Japon, il était évident pour moi que je devais filmer les quatre saisons. Au printemps, les cerisiers sont en fleurs, en été la mer est très lumineuse, en automne les feuilles sont très rouges et nous avons la neige en hiver. Ces paysages sont peut-être un peu clichés, mais j’ai osé les filmer et en faire la ligne conductrice de Dolls" .
C’est cela, oui….
Et d’ajouter "Si vous regardez Dolls en vous disant « Oh, les belles images ! », je serai content. Ceci dit, ça ne me dérange pas du tout si on recherche une symbolique dans les cerisiers en fleurs, dans la mer d’été ou dans les feuilles rouges à l’automne".
Tu te fous de notre gueule et c’est juste de l’amour qu’on sent dans ton pantalon ?…
Passons. La portée locale, puis internationale, de Kitano-san, lui offre l’opportunité d’être contacté par des fans prestigieux, tant au niveau des costumes (Yamamoto, quand même… Médaille d’Honneur de France au Prix de couturier de l’année ) que de l’actora : Tasuya Mihashi, comédien chez Ichikawa et Kurosawa, ou l’égérie moderne et idole de la pop, Kyoko Fukada, découverte dans Ring 2 de l’inspiré Hideo Nakata (voir Dark Water sur ce site).
Et maintenant ? Après une escapade hollywoodienne en 2000 pour une synthèse de ces thèmes avec Aniki, mon frère - gros échec public et critique des deux côtés du Pacifique – il s’apprête à retrouver un vieil ami. Un ami qui lui est personnel pour l’avoir originellement interprété, et de nous, cinéphiles et amateurs de série B asiatiques : Zatoichi, samouraï aveugle et mystique…
Ca nous rappelle quelqu’un…
Sauf que celui-ci a les yeux grands ouverts…
arnaud
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