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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Production : Horizon Pictures, Columbia
Réalisation : David Lean Scénario : Roger Bolt, Michael Wilson, d'après les écrits de T.E. Lawrence Montage : Anne V.Coates Photo : Freddie Young
Musique : Maurice Jarre Durée : 202 mn
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Peter O'Toole : T.E. Lawrence
Alec Guiness : Prince Fayçal
Anthony Quinn : Auda Abu Tayi
Jack Hawkins : Général Allenby
Omar Sharif : Sherif Ali Ibn El Kharish
José Ferrer : Turc Bey
Anthony Quayle : Colonel Harry Brighton
Claude Rains : M. Dryden
Arthur Kennedy : Jackson Bentley
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Lawrence of Arabia (Laurence d'Arabie)
Royaume Uni / 1962
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Le contexte historique
Il n'y eut jamais de monde arabe unifié. Mais depuis 1516, les Ottomans arrivent à conquérir la péninsule arabique, l'Iraq, la Turquie, et de l'Egypte à l'Algérie.
L'histoire de Lawrence d'Arabie traverse l'Egypte, l'Arabie Saoudite, la Syrie et surtout la Jordanie. Durant la première guerre mondiale, le Colonel Lawrence arrive à soulever différentes tribus arabes contre les Turcs (Ottomans). Il est politiquement aidé par Hussein Ibn Ali et son fils Fayçal, au coeur de l'indépendance arabe durant la première moitié du siècle. Il prend le port d'Aqaba (Jordanie), par les terres, après avoir traversé tout le désert depuis Médine (Arabie Saoudite). En octobre 1918, il emporte Damas (Syrie), après d'innombrables attaques de chemins de fer coupant les voies d'accès aux ennemis. Fayçal deviendra d'abord Roi de Syrie avant d'être chassé par les français et 'être élu Roi d'Iraq plus tard.
A l'époque, Anglais et Français se disputent les mandats et territoires à gérer. De même, les Américains cherchaient l'exploitation du sol arabe pour le pétrole. C'est aussi la fin de l'Empire Ottoman; sa faiblesse le conduisit à massacrer le peuple Arménien. Les Turcs avaient contre eux la Russie, la France, la Grande Bretagne et l'Italie! En moins de 10 ans, la Turquie perd l'Arabie, la Syrie, la Palestine, Chypre et l'Iraq. Les différentes tribus prennent le pouvoir dans chacun des territoires.
L'empire Ottoman était étendu sur plus de 4.5 millions de kilomètres carrés, et peuplé de 42 millions d'habitants. Sans compter les territoires vassaux.
C'est ainsi que sonne la fin d'un monde qui s'est construit depuis la prise de Constantinople en 1453 d'où est née la Renaissance.
Le tout coïncide avec la première Guerre Mondiale qui détruit l'Europe Occidentale.
Le véritable Lawrence d'Arabie.
"A mes yeux, il est l'un des êtres les plus extraordinaires de notre temps. Je ne vois personne qui lui arriverait à la cheville. Son nom survivra dans la littérature anglaise ; dans les légendes d'Arabie." (Winston Churchill).
Le film de David Lean commence avec la fin certaine d'une légende ambiguë. Une route de la campagne anglaise. Un épris de vitesse sur sa moto. Le soleil de mai 1935. Au bout de la route, la mort pour T.E. Lawrence, plus connu sous le nom de Lawrence d'Arabie. Tout fut raconté autour de cet accident, d'un rendez-vous avec Hitler à un complot improbable...
Lawrence, qui se faisait appelé Shaw, avait été désenrôlé de la Royal Air Force. Ce corps sans importance fut transporté dans un banal hôpital militaire.
C'est la veuve du romancier, Mme Thomas Hardy, qui le reconnu. Le futur premier ministre Churchill et le peintre John firent de même. Il fut finalement traité par les chirurgiens et médecins personnels du Roi d'Angleterre.
Mais le 20 mais, le London Times titra : "Lawrence d'Arabie est mort".
Shaw était un pseudonyme pour échapper à sa renommée, au harcèlement médiatique et aussi oublier son passé tourmenté. Mais c'est sous son vrai nom - Thomas Edward Lawrence - qu'il fut connu à travers le monde. Fils illégitime d'un baronnet irlandais (Thomas Chapman), éduqué à Oxford, homosexuel notoire, britannique mal dans sa peau blanche, érudit, cultivé, arabophile, il deviendra le libérateur de Damas, le héros d'Aqaba, l'un des premiers décolonisateurs (du côté des colonisés), il fut roi d'un pays sans frontières, roi sans couronne, faiseur de rois, et surtout, bizarrement instrument de son pays malgré lui.
Sa personnalité était aussi explosive que les attaques qu'il guidait. Les bédouins et autres tribus arabes l'appelaient El Aurens. Il mangeait comme eux, s'habillait comme eux, prônaient l'égalité des peuples, se fâchait contre les rites coincés des anglais.
Si bien que les Arabes ont le souvenir d'un frère d'armes qui permirent aux Arabes de reconquérir leurs terres; tandis que les anglais préfèrent retenir la Légende en soi. Au mythique se rajouta le romanesque, puis sa propre version dans le best seller "Les sept piliers de la sagesse."
Le personnage était un mélange d'égocentrisme - et presque de narcissisme - et d'altruisme humaniste, de besoin de notoriété et de désir d'être tranquille, de philosophe et de chef de guerre. Flamboyant et dur, sarcastique et séduisant, sado-maso et doux, discret et rebelle, cette personnalité contrastée et paradoxale ne l'ont pas aidé à effacer les bains de sang dont il fut responsable dans des moments de folie irrationnelle.
Tout cela se retrouve dans le film, dans ce portrait dressé par le producteur, le réalisateur, le scénariste et l'acteur...
Bizarrement, tout le monde reconnu une chose : que personne ne le connaissait vraiment. Pourtant, la légende prit une ampleur considérable après sa mort. Churchill était son ami. Il espérait lui donner un rôle à sa mesure à la menace de la guerre qui s'approchait. Son savoir sur l'Arabie était inestimable.
A ces louanges politiques et populaires, il y eut aussi les échos négatifs. Il fut l'objet de scandales sensationnels, d'insultes (charlatan), ... son paradoxe s'épaissit, l'énigme fut encore moins facile à expliquer. La controverse ne fit qu'augmenter sa popularité.
Même son livre, Les sept piliers de la sagesse, n'explique rien. Son récit de sa campagne dans le désert avait été écrit péniblement, et lui a causé de nombreux soucis.
Après une première édition intime qui l'endetta prodigieusement, il fut obliger de publier une version "courte", Révolte dans le Désert, qui devint un best-seller.
Une fois sa dette remboursée, il retira de la vente son livre, offrit le reste des recettes à des ¦uvres caritatives, et dénigra son livre. Les 7 piliers de la sagesse ne furent publiés en grand nombre qu'après sa mort.
C'est étrange quand on sait que Shaw, Wells et Foster chérissaient l'Homme, et adoraient le livre.
Ce sera aussi le pilier du film. Le livre se construit autour de l'action, ses différents faits guerriers, mais erre au milieu de réflexions philosophiques, de contemplations poétiques. Après le massacre de Damas, et donc son apogée, il décida de quitter l'Arabie. Il ne serait jamais arabe. Il avait de plus en plus de sang sur les mains. Ses victoires ne lui servaient à rien, si ce n'est offrir l'Arabie à l'Empire britannique. Il souhaitait l'anonymat le plus total à son retour, s'inscrivit à la RAF. Sa renommée était telle que la RAF dut le renvoyer une première fois. Grâce à ses amis influents et un pseudonyme, il fut réintégré avec un grade étonnamment bas.
Lawrence d'Arabie gênait. Il dérangeait les Anglais avec sa volonté d'unir les tribus arabes. Il était l'ennemi des Turcs. Les moralisateurs, médias compris, le rendaient responsable de certains bains de sang.
"Avec le temps, le besoin de nous battre pour cet idéal s'est transformé en soif de pouvoir, écrasant au passage ce qui nous restait de scrupules. (...) Nous en sommes devenus esclaves. Pas notre faute, nous nous sommes vidés de toute moralité." (T.E. Lawrence)
Tous les traits de son caractère rejaillissaient dans son attitude; du brillant militaire anglais intellectuel, il est passé au stade du charismatique leader de troupes armées. Là où son peuple et ses rites l'oppressaient et l'empêchaient de s'épanouir, le monde Arabe avait une véritable confiance, reconnaissance envers ce sauveur. S'il était écouté des plus grands chefs arabes, il était totalement manipulé par les politiciens, diplomates et généraux anglais. Nul n'est prophète en son pays. Lawrence maîtrisait plus facilement l'action que les négociations.
Il se révéla donc sadique, cruel, assassin, déterminé, parfois inconscient. Il ne s'excusa jamais alors que ses crimes le tourmentaient. Il aimait ce sadisme ; en témoigne ses souvenirs de la séance de torture qu'il a subie à Deraa. Il préférait paralyser plutôt que tuer. Chaque mort l'accablait. Il admirait la jeunesse, la beauté, son corps... et détestait cette peau blanche qui lui collait aux os.
Les problèmes psychologiques s'enchaînèrent à travers différents événements : des proches qui étaient morts, une folie meurtrière inexpliquée, une tortureŠ Il commençait à en avoir assez du désert. Ce n'était pas son peuple, pas ses vêtements, pas sa religion ni sa langue.
L'idéaliste se mua en cynique. Le côté obscur se réveilla. Certain de son statut, il s'entoura de mercenaires comme gardes du corps. Dans sa haine du Désert, dans ce rôle de Roi non proclamé mais obéit, il déclencha le massacre de Tafas. Une nuit d'horreur.
Les Turcs chassés de Damas et d'Aqaba, les Anglais convoitant le Proche Orient, les Américains draguant le pétrole arabe, les Arabes se disputant de nouveau, "Laurens" quitta le désert.
Il participa à la Conférence de Paix de Versailles, sorte de séparation de territoires entre les Français et les Anglais. Ce fut sa dernière apparition publique, préférant la verdoyante Angleterre et l'anonymat.
Né en 1888, il mourut à l'âge de 47 ans. Les 7 Piliers de la Sagesse furent éditées une première fois en 1926. 10 ans plus tard, La Matrice, un autre de ses romans, fut sous impression. Ce romancier fut tout de même assistant d'un égyptologue, membre de l'Intelligence Service, commandant de guérilleros arabes, responsable des affaires arabes au Foreign Office, mécanicien à la RAF. Et héros (oscarisé) de cinéma.
Les coulisses du film
Le producteur Sam Spiegel et le réalisateur couronné d'Oscars David Lean sortent du triomphe mondial du Pont de la Rivière Kwaï. Les deux cherchent un sujet équivalent : des paysages épiques, un itinéraire individuel héroïque mais complexe, un thème universel confrontant l'Histoire avec un homme incarnant tout un conflit.
Ils voulaient donc faire mieux, explorer encore plus cette nouvelle manière d'aborder le cinéma.
La première idée fut de faire un film sur Gandhi, tout juste décédé. L'aspect récent de sa disparition, l'absence de recul historique, la figure emblématique et religieuse du personnage l'en dissuadèrent. Attenborough s'en chargera 30 ans plus tard...
D'autant qu'il ne s'agit pas de retranscrire l'Histoire, mais bien de simplifier, créer des ellipses, bref dramatiser. C'est donc en Inde que Spiegel et Lean furent d'accord pour adapter Les sept piliers de la Sagesse et donc la vie de Lawrence d'Arabie. Il fallait nettoyer les thèmes, aborder la psychologie, rester simple avec le récit historique. Plusieurs films étaient possibles : il ne fallait pas oublier sa controverse, ses penchants amoureux... tout en respectant les codes moraux de l'époque. Nous sommes au début des années 60, un quart de siècle après la mort du mythique Lawrence.
Dans cette adaptation, il fallait tenir compte de tous les ouvrages autour du personnage, la plupart réglant leur compte avec le Colonel. Le scénariste Roger Bolt se joignit à eux, et ils s'accordèrent à la vision que devait dégager le film.
Restait le quatrième élément : l'acteur principal. Il n'était pas un rôle typique pour tel genre de comédiens ou tel style d'acteurs. Lean songea à Albert Finney. Sous les conseils de Katharine Hepburn, on choisit donc un nouveau venu, les yeux bleus perçants. Peter O'Toole était une star irlandaise du Royal Shakespeare Theatre. On l'entoura de stars pour la viabilité économique du projet : Alec Guiness (qui avait incarné Lawrence dans la pièce de théâtre de Rattigan), Anthony Quinn, Jack Hawkins, Claude Rains, Jose Ferrer, Arthur Kennedy... Un autre jeune premier fit son apparition avec ce film : Omar Sharif. Ce film a la particularité d'être 100 % masculin dans ses personnages parlant.
Le tournage fut épique. Avec son directeur artistique John Box, Lean partit en Jordanie, sur les lieux même des exploits de Lawrence d'Arabie. Des carcasses de trains jonchaient encore des parties de désert inexplorées depuis que le Colonel Lawrence les avait détruits.
Malgré la chaleur, les contraintes géographiques, l'absence de communications, le producteur et son cinéaste reçurent l'appui inespéré du jeune Roi Hussein de Jordanie, descendant d'Hussein de La Mecque, père de Fayçal, qui avait été à l'origine des combats de Lawrence. On leur joignit la Desert Patrol, les meilleurs chameliers, et des centaines de bédouins purent participer au tournage.
Pour exemple, l'un des lieux de tournage, Jebel Tubeiq, à des centaines de kilomètres de la capitale, à 240 kms du plus proche point d'eau, dans une région dépeuplée, avait été découvert lors d'un vol de reconnaissance. L'endroit était inexistant pour les cartographes. Cela faisait 1300 ans que plus personne n'habitait cette région. Lawrence d'Arabie avait sans doute était un des premiers blancs à découvrir les merveilleuses sculptures sur roche de la région.
C'est à Aqaba, le lieu pris par surprise par Lawrence, que l'équipe s'implanta. Aqaba est le port de la Jordanie, et fait face à l'Arabie, l'Egypte et Israël. Tout l'équipement et les techniciens venaient de Londres par bateau. Il restait parfois 500 kms jusqu'aux lieux de tournage. On construisit des routes, il fallait prévoir une lourde logistique, et il fallait parfois des chenilles pour remorquer des camions ensablés. Sans parler des records de chaleur. Le tournage dura des mois. La motivation resta intacte vue l'ambition du projet. On participait à une sorte de "revival" d'une légende. Il y avait aussi une fascination à filmer ces décors naturels somptueux.
Parmi les autres soucis de la production : l'impossibilité de photographier ou de filmer les femmes bédouins. Il fallu engager des femmes d'une secte chrétienne... De plus, Le Caire, Jérusalem, Damas étaient déjà trop modernisées pour servir de décors. Tout fut tourné à Séville, où les bâtiments mauresques rappelait l'architecture encore existante à l'époque de Lawrence. L'attaque du chemin de fer fut aussi reconstituée en Espagne, ainsi que le port d'Aqaba.
Enfin, le Roi Hassan II du Maroc fournit les cavaliers, les membre du Camel Corps et les fantassins - un total de 1000 hommes et animaux - pour tourner l'impressionnante bataille précédant la prise de Damas. L'enterrement de T.E. Lawrence fut filmé à la Cathédrale St Paul de Londres.
Cette production c'était la confrontation entre une super production hollywoodienne et des nomades dont les traditions dataient des temps bibliques. Cette authenticité documentaire et cette expérience spectaculaire ont permis au film d'être un succès incroyable.
Sorti à Noël 62, avec une avant-première mondiale à Londres, le film coûta 12 millions de $ (à l'époque, contre 44 millions pour Cléopâtre la même année).
Sur 10 nominations aux Oscars, il en remporta 7, dont celle de meilleur Film et meilleur Réalisateur. Le scénario, l'acteur et le second rôle masculin lui éhcappèrent. Aux British Awards, Peter O'Toole eut l'un des quatres prix. 4 Golden Globes, le Donatello du meilleur film étranger, etc... le film fut sacré à peu près au même niveau que Le Pont de la Rivière Kwaï.
Au total trois versions en salles circulèrenet, entre 202 et 222 minutes, selon. Une version restaurée fut même sortie à la fin des années 80, avant la sortie d'un DVD exceptionnel en 2001, comprenant notamment l'interview d'un fan de toujours, Steven Spielberg.
vincy
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