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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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We were soldiers (Nous étions soldats)
USA / 2002
17.04.02
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AUX SOURCES DE L'APOCALYPSE
"L'Armée française ? C'est quoi ça ?"
Parmi le déferlement d'oeuvres "patriotiques" et "guerrières" qui nous ont récemment envahies, Nous étions soldats est la plus regardable depuis Saving Private Ryan. Bien sûr techniquement, et notamment en matière de mise en scène, Ridley Scott est un cran au dessus. Mais pour l'ensemble du film, scénario et point de vue inclus, le film de Randall Wallace le surpasse largement.
En démarrant son film en 54, avec les français, il s'octroie un regard sur le passé réel de cette guerre. Formellement on en est dans le même registre que chez Spielberg ou Scott, en pleine guerre hyper-réaliste, ultra-violente. Mais Wallace décide d'aller dans trois directions qui permettent de gagner un peu en profondeur.
D'abord le cinéaste montre les vietnamiens, non pas comme un simple ennemi, mais au contraire comme un adversaire malin, organisé, connaisseur des stratégies militaires. Quel que soit le résultat de la bataille, elle aura un goût amer. La chronologie exacte (à quelques détails près) des événements donne une perspective documentaire à toute la partie "romancée" du film. Cette "fiction-réalité" est un nouveau genre qui plaira beaucoup aux amateurs de jeux de rôles ou de jeux vidéos de stratégie. Ca change des petits soldats de plombs.
La vraie force du film provient de ce qui se passe à 10 000 kilomètres de là, pendant les combats. Il pointe alors sa caméra sur les épouses de ces soldats. Ces femmes solides et fragiles, élevant leurs enfants, s'entraidant dans le besoin, mais pas forcément prêtes à recevoir le télégramme fatidique. Ces futures veuves voisinent les plus chanceuses dans cette loterie de la vie et de la mort qui touche leurs hommes, souvent jeunes. Par le personnage tout en émotion de Madeleine Stowe (hélas avec des lèvres épaissies au collagène, ce qui l'enlaidit), nous nous promenons à travers l'angoisse de celles qui souffriront vraiment de ces morts. Le propos ainsi humanisé rend le film différent, et attachant.
Hélas, tout n'est pas au niveau de ces nuances et de ces subtilités. A l'horreur de la guerre, sauvage et bestiale, Wallace en rajoute une ouche sans la banalité des images, qui rappellent un peu trop souvent Platoon. La religion (ses rites, ses dieux, ses sermons) y est omniprésente et alourdit certaines séquences trop moralisatrices (justifiant le bon côté des américains, comme s'ils en doutaient eux mêmes...). On a le droit à la vision d'une Amérique parfaite : prière avant le dîner, nombreux enfants, sans discrimination...
Cette "putain d'herbe, putain de chaleur, putain de pays" aura tellement fasciné le cinéma américain qu'on semble anesthésié face à cette guerre traumatisante. L'hyper-réalisme "à la mode" ne paraît même pas nécessaire pour mieux la comprendre, pour saisir plus justement son horreur. Le générique de fin, à l'instar de Black Hawk Down, reprend la liste des victimes. Il serait temps en effet de faire le deuil, autrement qu'en utilisant le cinéma comme outil de propagande, plus ou moins bien foutu. vincy
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