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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Antwone Fisher
USA / 2002
16.04.03
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DES ORDRES
"- Vous ne m’avez pas cassé !"
Qu’un acteur, qui plus est connu et reconnu, passe derrière la caméra n’a plus rien d’étonnant. Nous attendons alors de ce comédien qu’il nous fasse découvrir un univers plus personnel, un mystère inaperçu à travers ses rôles. Ce ne sera pas le cas avec Denzel Washington. Il a joué des prêtres dans les ordres et des soldats aux ordres. Nous voici dans une atmosphère de prières et de patriotisme (belle pub pour la Navy). Avec un zest de psy, pour les conseils paternalistes. Définitivement, le film n’a rien de spécifique avec ce style formaté. Par ses thèmes, son traitement, Antwone Fisher prouve bien la fascination de Washington, tant l’acteur que le réalisateur, pour les deux socles de la civilisation Américaine : Dieu et le drapeau.
Derrière ce film conservateur, se cache pourtant un joyau : une histoire vraie, et attachante. La réalité de ce Fisher est cruelle, sa vie étant un parcours du combattant émotif - de la pédophilie à la solitude. Psychologiquement, parce que tout est basé sur du vécu, le personnage est crédible, et par conséquent ses malheurs apparaissent d’autant plus touchants qu’ils en sont réalistes. A cela s’ajoute, son incarnation par Derek Luke, véritable révélation qui ne doit pas son charisme à une quelconque virilité mais au contraire une adorable innocence doublée d’une sensibilité palpable. Clairement, ce poupon sexy n’est pas fait pour l’armée.
On ne peut pas dire qu’on soit renversé par si peu d’originalité. Le conflit avec le psy a été mieux exploré dans Good Will Hunting. Mais lorsqu’Antwone nous raconte ses souvenirs atroces ou nous fait ses aveux intimes, on ne peut s’empêcher d’apprécier le portrait d’anti-héros, de victime marginalisée. Fisher est puceau, romantique et apprend le Japonais. De quoi en faire un mec à part, un de ces gosses qui ne cherchent qu’une seule chose : se faire aimer. De là, Washington essaie de tisser un fil entre deux histoires contradictoires (celle du jeune militaire et celle du psy sans enfant) pour parler de transmission, d’héritage, d’éducation, de solidarité. Cette visite à l’intérieur de la communauté afro-américaine - puisque le caucasien ou l’asiatique est relativement absent du film - nous emmène des HLM miséreux aux villas cossues, à travers les différentes strates sociales de cette minorité historiquement baffouée.
Malgré toutes ces maladresses et la timidité à affronter un tel sujet (comment massacrer le mental d’un enfant en 10 leçons), Denzel Washington nous tient jusqu’au bout de son film, grâce à un habile découpage qui joue sur la surenchère. La fin s’étire un peu et s’égare dans une recherche identitaire laborieuse.
Simple et moraliste, Antwone Fisher n’a d’exceptionnel que la vie extraordinaire de son protagoniste. Pour la forme, le réalisateur Washington prouve que les choix de l’acteur sont fidèles à son image publique. On aurait aimé être plus surpris... vincy
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