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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Les fautes d'orthographe
France / 2004
03.11.04
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LES PARENTS, LES COPAINS, LES EMMERDES
"- Tu m'exploites depuis la 6ème! Je ne suis plus ton nègre!"
Comme quoi : il y avait des problèmes de surpoids (et de complexe physiques) avant l'ère McDo. Le nouveau film de Zielbermann a cet avantage de flirter davantage avec La Guerre des boutons que du côté des Choristes. C'est à travers le regard d'ados que le cinéaste établit sa vision - critique - d'une France qui n'en finit pas d'avoir la nostalgie de cette époque. En cela, il n'y a rien de complaisant, et la violence muette et sourde des événements ne fait que souligner les torts de cette surdose d'autorité. Ici pas de prof sentimental ou d'enfants sauvés, et pourtant, sans surcharge d'émotion, la fiction parvient à son objectif libérateur.
Drôles et anecdotiques, les actions et autres 400 coups font sourire et nous ravissent. Cruels et mal dans leurs peaux, tous les enfants attirent notre sympathie. Le film oscille entre ces jeux d'enfants et ces tourments d'adolescents, entre l'obsession de transgresser tous les tabous et la fierté de ne pas avouer ses failles. C'est toujours juste, parfois touchant, jamais ennuyeux, et finalement, sur la longueur, ça paraît même moins démagogique et plus intéressant que le hit avec Jugnot. Certes, cinématographiquement, le film de Christian Barbier est beaucoup plus soigné que celui de Zilbermann, approximatif dans son cadre.
Dans cette prison - on ne peut décemment pas parler d'école - on ne cache pas la baffe derrière une porte. On gifle les gamins en pleine face. Car si le gang de copains a la moralité douteuse mais la malice profitable, les adultes ne sont pas épargnés et encore moins excusés : cela fait du bien de voir des enseignants réalistes (sale tronche, pédagogie catastrophique). C'est bien le regard injuste, ingrat et subjectif d'un élève qui peut les voir comme ça. Tout comme le dirlo est un tyran bête et méchant (parfait Gourmet) et sa femme, un fantasme vivant (Bouquet chaleureuse, belle, toute en nuances). Ici il n'y a rien d'angélique : pas de top modèles, pas de premier de la classe, des chiottes à la turc plein de merde. Tout le monde est croqué au vitriol, du surveillant prétentieux et bellâtre, à l'élève anarchiste et fumiste. Un seul est rescapé : le jeune juif, très vite meilleur ami du jeune Massu - Damien Jouillerot mérite un A (sauf en orthographe si l'on en croit sa phrase "jane été au pin sek") - collé de naissance pour être le rejeton de Gourmet et Bouquet.
L'histoire nous promène agréablement jusqu'au final collectif. Le match ultime. Bon scénario qui s'inscrit logiquement dans la filmographie du cinéaste, entre parcours biographique, regard sur son passé, analyse de son pays et de ses clivages, entre communisme et judaïsme. Le scénario compense intelligemment cette série d'humiliations et de corrections avec une idée magnifique : la coopérative. Car la révolte n'est rien si elle ne se fonde pas sur un projet.
C'est une jolie morale, toute simple. Tandis que Les Choristes sacralisaient l'individu, un peut sauver les dégâts de tous, Les fautes d'orthographe font confiance à un groupe solidaire face à la répression. Au final la copie a quelques fautes de style, mais la lecture fut bien plus que plaisante et surtout la composition est cohérente. Pas de quoi regretter le passé, mais au contraire, de quoi croire en l'Homme.
vincy
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