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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Bridget Jones 2 : The Edge of Reason (Bridget Jones : l'âge de raison - Bridget Jones 2)
Royaume Uni / 2004
08.12.04
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LA CONFIANCE NE REGNE PAS
"- Je ne vois pas où atterrir en douceur!
- Peut-être sur son cul..."
On prend les mêmes et on recommence. Après tout, lorsqu'on apprécie une recette, on en redemande, sinon ça fait mal élevé. Bridget Jones nous en ressert une bonne louche et une bonne couche avec musiques années 70-80 (de Carly Simon à Madonna), réception familiale bis repetitae, complexes taille XXL, potes de mauvaise foi dans un pub et autres zoom sur gros pétards pour le petit écran... Jusque dans la bagarre nullissime entre les deux bellâtres, à poings nus et devant des témoins ébahis (dont une caméra, mais a priori la délation n'aura lieu que dans le DVD). Tout est donc dupliqué, amplifié, plagié, "énormisé".
Alors dans ce cas pourquoi déraisonner une fois de plus cette pauvre Bridget? Hormis les raisons financières (cachets des stars, enrichissement des producteurs, ...), on ne voit pas. Le film n'apporte rien de plus, rien de moins. Il opère juste dans la surenchère. Et cela n'a plus rien à voir avec un journal intime. Nous sommes ici plus proche du pur délire voire de la parodie du premier épisode. Ce renvoi d'image n'est d'ailleurs pas inintéressant. Car il permet à son héroïne de (se) réfléchir devant son propre miroir. Entre la tentation de l'infidélité (avec ce diable d'Hugh Grant) et la perversité d'une possessivité inavouée, Jones pose les questions intérieures de toute femme amoureuse et sentimentalement insécure.
Mais cela reste une comédie. Et s'il y a 60 ans, Hollywood aurait choisi Grant comme compagnon idéal à une Hepburn, dans les années 2000, il faut savoir se ranger et accepter de faire l'amour à un conservateur... Car le plus étonnant est bien la personnalité de BJ. Sa maladresse, ses angoisses, ses obsessions la rendent comique, aux frontières du grotesque façon Laurel et Hardy, délirant et chantant dans une prison Thaï à la manière d'un Mel Brooks. Ce second épisode la révèle encore plus excentrique, mais aussi plus humaine et plus touchante. C'est peut-être ici que réside le mobile de la sequel : notre attachement à une telle femme, si loin des canons de beauté usuels, et si drôle (involontairement). Véritable tornade, chacun de ses gestes aussi délicats soient-ils se transforment en catastrophe naturelle. Le personnage ne serait rien sans l'interprétation ciselée de Zellweger, ironiquement texanne, brune et filiforme, métamorphosée en anglaise, blonde et en chair. Jamais le moindre mépris, toujours digne dans sa cocasserie. Pour notre plus grand bonheur, elle est gauchiste, fumeuse, et prête à tâter du cochon. Elle apprend à s'aimer (et aussi à aimer), et le film lui donnera l'occasion de montrer à quel point elle est inculte et ignare (sauf en "people"), peu à l'aise en allemand et heureuse dans ses malheurs, comparés à ceux des femmes thaïlandaises. Un rôle féminin tellement fort qu'on tombe sous le charme. Elle apprend à relativiser!
Alors nous aussi nous relativisons : dans ce magma de comédies moyennes et de personnages stéréotypés, celle-ci n'est pas indigne ni déshonorante. On se fera la remarque que Hugh les bons tuyaux vieillit, semble trop statique et joue ad minima les invités vedette - on sent que son personnage n'a que peu d'utilité si ce n'est pour quelques répliques : "Je sais à quel point j'aime les femmes de Monsieur d'Arcy." Forcément. Et à propos de l'actuelle Madame d'Arcy? "- Tu as été élue meilleur coup de ma vie. - Le meilleur? - A part Simon, en Seconde..." Apologie d'une sexualité assumée et sous toutes ses formes, BJ est un film de son époque.
Quelques séquences absurdes marquent les esprits : séance d'habillage en pleine rue, le personnage de Rebecca, l'assistante plus que sexy et plus que parfaite, la réception chez les ténors du barreau, retour rythmé et mouvementé après un séjour en prison. De situations embarrassantes en questions existentielles et superficielles, le film nous accompagne pour un bon moment. Car Bridget est franche, intelligente et naïve. Ce triptyque est un catalyseur de gags dans un monde hypocrite, pavlovien et manipulateur. Pourtant le film ne juge et ne sanctionne personne. De même il ne choquera jamais et restera sage et consensuel, bref grand public, malgré les frasques dépeintes.
Quelques jolis plans très numériques, de beaux extérieurs exotiques et des dialogues assez durs et cruels parachèvent une sequel à la hauteur de l'original. Après tout, "on mérite tous une seconde chance. A part Hitler." To be Bridget or not to be Jones, that's the (final) question! vincy
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