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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Before Night Falls (Avant la nuit)
USA / 2000
13.06.01
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L'ETRANGER EN SON PAYS
"- Et maintenant nous allons découvrir une partie de la Havane que vous ne connaissez pas…"
Julian Schnabel nous avait déjà fait connaître la vie de Basquiat il y a quelques années, il nous revient avec un nouveau portrait d'homme en quête d'aboslu de liberté, également artiste, mais dans un contexte cette fois ci beaucoup plus marqué historiquement. Si Avant la nuit est une réussite, le film n'en comporte pas moins la rigidité inhérente au format de la biographie. Formater la vie d'un homme en l'espace d'un peu plus de deux heures implique un peu trop nécessairement de recourir au parcours balisé de la chronologie. Il y a toujours dans ce type d'exercice, cette impression de feuilleter un livre d'histoire, dont on ne retient que les dates les plus marquantes. Le résultat peut fréquemment aboutir à un récit quelquepeu romancé, voir carrément mécanique. Schnabel parvient cependant à aller beaucoup plus loin.
Le réalisateur peintre et sculpteur new yorkais a su capter beaucoup d'éléments de l'histoire et de la vie de Cuba et les retranscrire avec une grande sensibilité sur l'écran. Mélange de nonchalance, d'humour contraint face à l'adversité, autant de sentiments qui donne une âme aux événements, aux lieux et aux personnages cubains. Il a su éviter de trop s'enliser dans la reconstitution historique en carton pâte, que certains réalisateurs recherchent assidûment pour obtenir le cachet de véracité de leur fresque. Les cadres sont habilement choisis et leur pouvoir d'évocation sont grands.
L'autre travers commun aux biographies cinématographiques est l'interprétation du personnage central. Exercice casse-gueule, certains acteurs se sont souvent retrouvés en situation de singer l'illustre personnage dans la peau duquel ils entraient, plus qu'ils ne l'habitaient vraiment (Hopkins dans Picasso). Javier Bardem exécute à ce titre une prouesse. Il nous avait habitué précedemment à des rôles carrés (Macho, Jamon Jamon), voir parfois simplistes (Perdita Durango). Le film doit beaucoup à sa prestation. En équilibre entre une vulnérabilité poignante et une détermination incompressible, entre désillusion et dérision salvatrice, seul un acteur d'une grande humilité et doté d'un bon instinct pouvait nous faire croire au personnage de l'écrivain homosexuel sans tomber dans la caricature.
Johnny Depp nous offre lui aussi une prestation d'une toute autre nature à travers son double cameo de travesti dévoué à la bonne cause et d'officier tortionnaire. On éprouvera un peu de lassitude devant ses performances qui se limitent au grimage et manquent un peu de profondeur de jeu…
Le cinéma latino américain a donc beaucoup à raconter de son histoire, à témoigner de ses troubles, même si les entreprises demeurent trop peu nombreuses. Après La Vierge des tueurs de Barbet Shroeder, c'est encore un cinéaste nord américain qui nous livre une œuvre ambitieuse de référence. Pour mémoire, Fraise et chocolat, film cubain libertaire qui bousculait déjà les conventions du régime castriste homophobe, avait déjà su attirer l'attention sur la situation de son pays, il y a déjà quelquetemps. Concernant Avant la nuit, on regrettera juste que la structure trop appliquée et linéaire du film de Schnabel ammenuise un peu la force du message délivré. Cette rencontre avec Reinaldo Arenas restera tout de même marquante et s'imposera comme un bel hommage à l'écrivain et à son pays. petsss
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