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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Lemony Snicket's A series of Unfortunate Events (Les désastreuses aventures des orphelins Baudelaire d'après Lemony Snicket)
USA / 2004
22.12.04
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LES METAMORPHOSES DU VAMPIRE
"- C'est le Comte dans son jet privé!
- J'ignorais qu'il avait un tel budget."
Horreur sympathique ou invitation au voyage? Cette série d'événements malheureux ne fait pas que des heureux. Mais il n'y a pas désastre à bord. La formule n'est pas compliquée : vous prenez le Grinch, vous le transformez en Beetlejuice, vous dosez avec des décors à la Burton, des personnages à la Harry Potter, des situations à la Sonnenfeld et même un début plagiant ouvertement Shrek. Bref, rien de nouveau à l'Ouest (ici Boston et environs). Burton devrait juste réclamer quelques droits d'auteur.
Le manque d'imagination nous permet de soupçonner un manque de sincérité dans cette entreprise de préemption d'héritage (cinématographique) : faire des recettes sur des recettes éprouvées. Hollywood a un sérieux problème à se renouveler et pire, à transposer la magie littéraire sur le grand écran. Pourtant nous sommes prévenus. Avec un ton censément complice, la voix off, représentant l'auteur, ombre chinoise incarnée par l'omniscient Jude Law, apporte le véritable humour du film : regard distant et dérisoire, commentaires ironiques, ... Hélas, Les désastreuses aventures.... ne dépasse pas cette écriture parlée et l'image n'en est alors que l'illustration graphique. C'est assez agréable, rarement ennuyeux, mais jamais envoûtant. Trop artificiel et trop déjà vu. Le comble pour un ouvrage qui se veut déplaisant, cauchemardesque, remplie de sangsues dévorantes et de serpents domestiques. Le problème est double : J.M. Barrie a été bien plus intéressant pour traiter de la cruauté et de l'imaginaire des enfants; et les productions hollywoodiennes sus mentionnées ont banalisé complètement l'aspect visuel de cette "fable".
Le cinéma, impuissant à traduire le sentiment de perte, d'abandon, de mort? Il faut le croire. Puisque c'est dit. Par pudeur, la caméra s'éloigne et observe la scène à distance, plutôt que d'échouer à nous faire ressentir la moindre trace d'émotion. Cruel aveu de faiblesse. Aussi ces aventures demeurent divertissantes, mais n'atteignent aucune intensité, car elles ne sont jamais poignantes. Juste une série de petites histoires malencontreuses où l'intelligence, l'ingéniosité, la culture des gamins éclairés (c'est le bon côté des choses) triomphent de la cupidité et de la vanité du comte Olaf, sorte de Vampire assoiffé d'argent.
Notons que c'est un bébé qui vole la vedette à l'ensemble du casting, plutôt bien choisi. Cela fait plaisir de voir Meryl Streep dans un rôle "désintellectualisé" (quoique, elle serait bonne pour la dictée de Pivot) ou même Jim Carrey s'essayer à égaler Peter Sellers dans un rôle polymorphe, passant de Robin Williams (Popeye) à Christopher Lloyd (Qui veut la peau de Roger Rabbit?). Le Mask n'est jamais très loin. On le paye pour ça : excentrique, égocentrique, il se la pète. Et même s'il encaisse un "Vous êtes trop nul comme acteur", reconnaissons qu'il fait très bien l'oiseau préhistorique. On le préfère en amoureux ou en candide dans des films plus dramatiques. Même si la nature diabolique de son personnage, ici, lui permet de sortir de son costume habituelle. De toute façon, Prunelle l'emporte toujours avec ses remarques sarcastiques. "Navré je ne parle pas ouistiti", lui annonce son adoptant. Le spectateur lui aura le droit à la traduction, souvent hilarante. On se demande qui a 18 mois d'âge mental entre Jim Carrey, sa troupe de dégénérés et elle.
Pour le reste, les gags fonctionnent sur le principe du "double take". A retardement. On les voit venir - souvent - comme on anticipe - hélas - le dénouement des scènes dotées de suspens (la caméra expose ostensiblement les solutions avant même que le problème ne survienne). Monté comme un album de vignettes, le film ne sort pas des sentiers battus du genre. La mort des parents est sujet à divers fantasmes et songeries terrifiantes pour des gamins baladés de familles d'accueil en familles d'accueil. 5 enfants et moi, Harry et cie ne sont jamais que des cousins de ces orphelins Baudelaire.
Les décors et les effets spéciaux ne sont pas à jeter aux sangsues. Le message et la morale de l'histoire sont un peu flous, et le film ne parvient pas à nous expliquer vraiment sa légitimité. Entre arsenic light et dentelles de synthèse, Les désastreuses aventures... flirte avec les contes d'Halloween ou l'étrange Noël de Monsieur Jack, sans la magie et la poésie des uns et des autres. Cette production à sketches promeut la science et la lecture, ce qui n'est déjà pas si mal.
A force de lire des choses horribles, les choses horribles arrivent. Tout se veut irrationnel, défiant la gravité (et les lois de la gravité). Finalement, ce n'est qu'un "pestacle" qui comblera les petits sans ennuyer les grands. La fin, convenue, n'élève pas l'ensemble vers autre chose que ce qu'il est ; un grand guignol, avec ses marionnettes. Loin d'être une gravure fantastique, hélas.
vincy
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