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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Les tortues volent aussi (Lakposhtha hâm parvaz mikonand - Turtles can fly too)
/ 2004
23.02.05
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LES MINES, LE DEVIN ET CNN
"- Quoi, tu ne connais pas les USA ? Et Titanic ? Tu ne connais pas Titanic ? Et Washington ? Et San Francisco ? Et Zidane ? "
Grâce à son statut de rare représentant du cinéma kurde, Bahman Ghobadi a su s’imposer, au fil de ses trois longs métrages, à ce jour, sur la scène de nombreux festivals internationaux. Les tortues volent aussi (lauréat du Concha à San Sebastien, Prix Spécial du Jury à Chicago, Prix Spécial du Jury à Tokyo, entre autres) ne témoigne pas pour autant d’une force cinématographique impressionnante. Pourtant, le film fait un récit tragique parmi les plus noirs que le cinéma ai connu. Parallèlement à l’évolution plutôt positive de Kak Satellite, forte tête, animateur et organisateur du village, Ghobadi raconte le dernier parcours d’une petite famille non conventionnelle. Kak croise un jeune adolescent sans le sou et dépourvu des deux bras, manifestement victime d’une mine. Son agilité et son intelligence lui permettent de subvenir aux besoins de sa petite sœur et d’un jeune enfant à peu près aveugle. Le film nous apprendra par la suite que la petite fille, qui fut violée par de probables baasistes, est la mère du bébé. L'affection que Kak lui porte ne l’empêchera pas de passer le reste du film à tenter de se suicider et à atteindre aux jours de l’enfant qu’elle renie. Réussira-t-elle ? Oui et oui. Le flash-forward du début nous l’apprend d’emblée et coupe tout suspens inconvenant. Funeste programme. Pour la représentation de cette région, la stratégie du pire est une voie possible. Néanmoins, le risque éventuel est de rester en dehors, étranger à cette collection d’horreurs en tous genres. Le film aurait peut être gagné en impact avec un palier qui aurait permis au spectateur de se sentir plus proche. De la même manière qu’on ne s’identifie pas aux morts, on s’identifie moins aux morts vivants. Même si l’on sait que ce type de situation existe, l’histoire de cette « famille » semble artificielle, tant l’horreur s’acharne sur eux. Hélas, pour des raisons formelles, le mélodrame humanitaire laisse froid. Du coup, le film ne fait que signaler textuellement l’existence de ces phénomènes, ce qui au fond, est déjà pas mal. Encore faudra-t-il, cependant, que le film soit vu en dehors des festivals.
Les tortues volent aussi a le mérite, par ailleurs, de figurer, avec le naturalisme qui convient, la condition au quotidien des enfants kurdes. Le spectateur occidental découvre leur mode de vie, les mécanismes de défense qu’ils ont été forcé de créer et les innombrables solutions de débrouille, inventées par ses enfants laissés seuls. On pourra regretter pourtant l’ajout de la dimension magique qui tend plutôt à compliquer la compréhension de la situation. En même temps qu’elle se veut fidèle à la représentation autochtone, elle tend à contredire le réalisme social occidental. La dimension poétique, symbolique (les tortues volantes ?) sont en contradiction, presque incompatibles avec la noirceur du sujet. Politique et poésie font en effet rarement bon ménage. axel
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