Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Mars  



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Le couperet


France / 2004

02.03.05
 



LA FIN JUSTIFIE LE FRANÇAIS MOYEN





« Il n’y en avait que cinq qui, diplôme, carrière et surtout expérience, me paraissaient sinon meilleurs mais aussi bons que moi. Une idée vertigineuse m’est venue… »

Conte amoral. Costa-Gavras et son co-scénariste Jean-Claude Grumberg s’expliquent : « Voltaire et Diderot racontaient une situation amorale pour faire ressurgire en nous le sens moral. En gros, à la question est-ce que demain on veut vivre dans une société pareille ? la réponse est non bien sûr. ». Heureusement que la fiction , les histoires sont là pour représenter les plus sombres pulsions des hommes. Grâce au cinéma, les âmes les plus pures, également, comprennent, encouragent intérieurement, vont jusqu’à souhaiter que les actes les plus abjects et criminels puissent se réaliser. Faut bien se l’avouer, la part bestiale des anthropopithèques attend ça et en a besoin. C’est une des fonction des histoires. Du reste, il n’a pas fallu attendre Costa-Gavras pour s’en rendre compte.
Depuis Chaplin (à peu près officiellement) et son M. Verdou, des dizaines d’ordures sympathiques ont parcouru les écrans noirs de nos nuits blanches. Avec une réussite inégale, ces bourreaux, scélérats, détrousseurs, assassins ont su tirer sourires en coin, mines réjouies, rires bonhommes embarrassés et empathie affirmée aux plus braves gens. Parfois, indigné, quelque peine-à-jouir se dresse, la morale en bandoulière, et déplore la décadence terminale du cinéma, de ces choses que l’on ne saurait voir. D’une manière générale, le cinéma est un jeu moral. Un jeu avec ses enjeux. Dans tout film, classique aussi, le spectateur s’identifie parfois au méchant, parfois au bon. Fluctuant, selon le point de vue et la situation. Au méchant fomentant un quelconque crime, ne voulant pas qu’il soit prit, comme les enfants devant Guignol, on voudrait crier « regarde derrière toi ! ». Costa-Gavras se plait à faire aimer son salaud de Bruno Davert. En dehors de son petit penchant pour la dégomme sanguinolente de confrères, le garçon à tout d’un chic type. Bon père, conciliant, intelligent, gentiment maladroit, même magnanime lorsqu’une cible potentielle semble tombée plus bas que lui. Le film vaut d’être vu ne serait-ce que pour cette scène de la cabine d’essayage. Un couteau énorme caché derrière le dos mais entouré de miroirs, Bruno à l’intention d’éliminer Hutchinson qui lui fait essayer un costume. Le suspens tangible est contaminé par le pathétisme certain de l’ancien cadre et sa litanie dépressive. Alors Davert l’épargne et, comble du raffinement cinématographique, cela semble alors un geste d’une profonde humanité. D’assassinats en suppressions, Davert parvient à se frayer un chemin. Amoral pour amoral, en plus d’être aimable, il parvient laborieusement mais sûrement à ses fins. Bien sûr, à terme, le malaise du spectateur est inté gral. Comment ai-je pu soutenir, encourager, quasiment collaborer avec cette glaciale ordure ?
Le clin d’œil à la société est manifeste. Individualistes, complices de la mise au banc des plus faibles, ce film vous accable. La critique, hélas, n’est pas tellement fine et définie. C’est à cause du système, nous dit-elle. Nous voilà bien avancés. En fond d’écran, les paysages du film sont jonchés de panneaux publicitaires. Femmes inexpressives en lingerie lascive, grosses berlines, signes extérieurs de confort bourgeois sont les appâts, les pousses au crime du chômeur de longue durée. Ce discours sur la société de consommation est un peu suranné. Cependant, Costa-Gavras montre avec élégance les limites de son cinéma. Fait d’intelligence et d’humanité, il ne cherche pas à dissimuler la simplicité notoire de son propos.
Comme d’autres histoires dans le drame, Le Couperet sombre doucement dans la comédie. Hésitante et bancale, l’entreprise absurde du tueur en série amuse. Un traitement sérieux pour un tel sujet est impensable. Les monomaniaques, les gens prêts à tout sont pathétiques et drôles par nature. Prête à tout, le film de Gus Van Sant avait la même drôlerie grinçante. Dans ce registre, José Garcia est idéalement choisi. Même s’il semble moins à l’aise dans les scènes domestiques, en particulier face à Karin Viard, il multiplie les inventions expressives, sans en faire trop. Sans en faire trop non plus, sans être un choc, Le Couperet, pour toutes ces raisons, retient donc l’attention.
 
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