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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Mr. & Mrs. Smith
USA / 2005
27.07.05
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DEUX OSS DANS LA NOCE
« Bon maintenant que tu nous as entendus, ma petite femme et moi, discuter de nos problèmes conjugaux, c’est regrettable. Mais si tu crois que c’est un signe de faiblesse, tu fais une monumentale erreur petit. Alors crache le morceau !!
Angelina Jolie et Brad Pitt en ménage, tel sera l’argument de vente majeur de cette nouvelle affiche qui s’inscrit dans la longue tradition, perpétuée par les studios hollywoodiens des mariages arrangés de leurs plus prestigieuses stars. Au civil tout comme à l’écran. La confusion engendrée autour du couple par les chasseurs de scoop aura d’ailleurs brouillé les pistes à bon escient, alimentant les fantasmes de chacun.
A l’arrivée, Mr & Mrs Smith sera heureusement bien plus qu’une simple union de circonstance consentie sous le signe du népotisme de la A List et destinée à fourguer un script déjà tourné mille fois. Et pourtant les malins auteurs de cette lune de miel musclée ponctuée de faux semblants ne se priveront pas de récupérer tous les codes fédérateurs de l’entertainment classique, ici le thriller d’espionnage, pour ne décevoir personne et surtout pas le plus grand nombre. Mais suivant les traces d’un Soderbergh, Doug Liman et son scénariste Simon Kinberg brandissent les détournements et les accessoires disproportionnés pour mieux dynamiter les genres à travers une parodie semi revendiquée qui n’est pas sans rappeler la démarche du flegmatique Ocean’s 12 et de ses people à la fumisterie subversive. En absence de gredins identifiables susceptibles de piquer la vedette, le respect des règles n’est pas de mise et l’évidence s’impose dés l’apparition du gars et de la fille cherchant à recoller les morceaux de leur romance chez le conseiller conjugal: il n’y en aura que pour les deux tourtereaux et leurs grandioses turpitudes nombrilistes (la couleur des rideaux!), le reste se cantonnant au faire valoir. Tout juste l’excellent Vince Vaughn parviendra t-il à grappiller quelques miettes en collègue confident peu avisé.
Autant dire qu’avec une telle exposition, il était préférable de ne pas trop se planter sur le casting des deux époux pour prétendre réitérer une Guerre des Roses de bonne tenue. Sous peine de ruiner la tragicomédie sentimentale, le tandem avait pour dure mission d’entretenir une alchimie irréprochable propre à ensorceler le spectateur sans lui imposer de distances avec des personnages trop artificiellement idéalisés. Dans le registre charme et humour qui tuent, Brad Pitt, le sex symbol nonchalant qui adore casser son image, ne semblait pouvoir souffrir d’aucune contestation au regard de ses affectations passées. Le choix d’Angelina Jolie prêtait plus à réflexion, au-delà de son magnétisme sidérant, tant ses récentes interprétations tendaient vers l’assèchement le plus total. A tort, l’actrice, parfaitement à l’aise en femme forte à double vie, nuance l’intensité de son jeu jusqu’à faire oublier l’inexpressivité de ses interprétations successives de Lara Croft. Si les deux comédiens sont particulièrement bien servis par un lot conséquent de situations cocasses, ils ne s’appuieront pas tant sur les rebondissements providentiels de l’intrigue que sur leur aptitude hors norme à jouer de leur image iconique, leur charme naturel leur accordant tous les droits, à commencer par celui de se moquer pleinement de leur superficialité fictionnelle. Enjôleuse sarabande schizophrénique sur l’art du mensonge, Brad Pitt et Angelina nourriront en effet leur performance en confrontant les identités multiples qu’ils projettent avec maîtrise dans l’inconscient collectif: stars médiatiques, héros de composition ou même simples citoyens américains témoins de leur époque. Car le film s’autorise avant tout dans son étude sociologique de la vie domestique des ses protagonistes à refléter une vraie réalité moderne. Lui, installé dans ses pantoufles confortable de mâle parvenu fuyant les contraintes des conventions et traquant la quiétude d’un foyer équilibré; elle, carriériste, tentant de donner le change à la parité des deux sexes sans trop de concessions et se réfugiant dans une rationalisation de sa vie privée. Les rôles et les caractéristiques se confondent à l’encontre des idées reçues. La partie masculine cherche le dialogue et mène les investigations pour répondre aux doutes quand le pendant féminin prend la tangente, masque ses émotions par peur d’altérer son intégrité. La force du film reste définitivement de nous révéler insidieusement mais avec pertinence les dernières évolutions comportementales du couple occidental là où était attendu un énième sauvetage du monde.
D’ébats en débats, de fracas en dégâts, Mr & Mrs Smith survole les lois des séries et trouve une légèreté et une liberté de ton qui échappaient à des références approchantes telles que True Lies ou The Incredibles par trop formatés. Le blockbuster peut encore surprendre…
PETSSSsss-
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