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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Les Dames de Cornouailles (Ladies in Lavender)
/ 2006
25.01.06
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L'AMOUR PEUT BIEN ATTENDRE LE NOMBRE DES ANNEES
"- Je sais que ce n’est pas très chrétien mais cette fille me déplaît intensément"
Dans l’Arc, de Kim Ki-Duk, un vieillard garde une jeune fille prisonnière sur son bateau de pêche, et attend avec impatience qu’elle ait 17 ans pour la faire sienne.
Dans Les Dames de Cornouailles, une vieille demoiselle voudrait bien pouvoir garder chez elle le jeune homme qu’elle a recueilli avec sa sœur, et qu’il la fasse sienne.
Le thème, la vieillesse éprise de la jeunesse, est le même dans ces deux œuvres. Mais son traitement diffère totalement, tout simplement parce que le sexe du sujet désirant est masculin dans un cas et féminin dans l’autre. Le pêcheur de Kim Ki- Duk est attentionné et aimant, certes, mais c’est surtout un vieux possessif, égoïste et libidineux, qui ne se sépare presque jamais de son arc, symbole de sa virilité agressive. Le réalisateur aborde à sa manière le sujet maintes fois traité de l’homme d’âge mûr, ou carrément sur le déclin, attiré irrésistiblement par la jeune fille en fleur. Charles Dance, lui, ose s’attaquer au tabou qu’est encore aujourd’hui l’amour d’une femme déjà flétrie pour un jeune homme dans la fleur de l’âge. Mais plutôt que d’en faire un film brûlant, il désamorce la bombe et transforme la vieille Ursula en jeune fille vivant ses premiers émois. La vieille et digne dame devient soudain puérile (« c’est moi qui l’ait vu en premier !»), allant même jusqu’à ramasser et garder une mèche de cheveux du bel Andréa. Ici le sujet désirant est complètement inoffensif : d’abord parce qu’il est une femme, ensuite parce qu’il devient presque un enfant et enfin parce que malgré cette jeunesse qu’elle a gardé au fond d’elle, Ursula est physiquement une vieille personne toute ridée, difficilement désirable. A elle deux, Ursula et sa sœur Janet semblent représenter pour Charles Dance la mère, figure rassurante et protectrice, redonnant la vie. Mais c’est aussi là une figure dangereuse, car surprotectrice et possessive. Une troisième figure féminine est donc nécessaire pour empêcher ces demoiselles de devenir ogresses : Olga (Natascha McElhone), une femme jeune et belle, une artiste. C’est elle qui représente pour Andréa l’ouverture sur le monde, et sa posture de femme libérée lui confère une forme de masculinité qui fait d’elle la figure salvatrice de ce couple mères/enfant trop proche de l’inceste.
Ainsi, l’air de rien, Charles Dance retrace d’une manière toute britannique l’histoire d’un amour qui aurait pu être malsain, mais qu’on découvre tout simplement beau et touchant. Une passion de fin de vie, admirablement filmée, baignant dans la douce lumière des Cornouailles. Le tea time agrémenté d’humour british y rythme immanquablement les journées et les deux sœurs Weddington illuminent l’écran, leur petite cuillère à la main. Ce sont elles qui sur leurs frêles épaules portent le film entier, et l’on ressort de la salle les yeux pleins de robes à fleurs, les narines embaumées par des odeurs de pot-pourri à la lavande. C’est doux. Comme le giron d’une grand-mère. Asha
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