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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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(c) Metropolitan Filmexport
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The New World (Le Nouveau monde)
USA / 2005
15.02.2006
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TERRE DE MYTHES
Bien que la nature du cinéma – un faisceau de lumière, des sons, aucun lieu précis de l'œuvre... – en fasse une expérience des plus abstraites et fantomatique, il semble que certains films aient un poids, une présence physique inexplicables. The New World fait partie de ces oeuvres impossibles à cerner qui, à la faveur d'une totale maîtrise de ses effets, s'adresse à l'ensemble de la personne qui les "voit". Lorsque la plupart des films, même lorsqu'ils ne sont pas de genre, cherchent à titiller soit les zygomatiques, soit l'intelligence, les yeux, la conscience politique, les pulsions, etc., Terrence Malick ambitionne, non pas de tout compiler, mais - grâce à de la lumière et quelques sons - d'agire sur le corps entier de son spectateur. Autrement dit, comme certains poètes, musiciens ou rares cinéastes, il parle à l'être tout entier.
Toujours se frayant un chemin par delà l'immatérialité nébuleuse des moyens cinématographiques, le cinéaste américain impose le sentiment d'une réalité naturelle, d'une pesanteur (au sens propre). C'est à partir de cette qualité insolite que chaque situation, chaque mot prononcé, le moindre rayon de soleil trouve la vividité, l'impacte lyrique que l'on connaît à Malick. Cette force quasi animiste, le cinéaste la met au service des grands mouvements thématiques qui traversent son cinéma : l'Histoire, l'Amérique, la nature et une forme de religiosité jamais ostensible. Malick, accessoirement philosophe religieux, ne met jamais en avant les éléments contingents, particuliers, donc non universels de ses croyances. A travers le récit de ces colons de tradition pourtant éminemment prédicatrice, le film ne fait jamais preuve de moralisme ni, à fortiori, de quelque prêche que ce soit.
D'autre part, si The New World fait la peinture méticuleuse d'une légende américaine fondatrice, s'il tente de reproduire une réalité historique, c'est toujours à travers le prisme (non déformant) de sa fascination calme pour la planète sur la quelle nous sommes, sa révolution quotidienne et les paisibles évolutions qui s'y trament. C'est avec ce naturalisme lyrique que l'histoire de Pocahontas et de John Smith nous est contée avec une évidente attirance pour la gentillesse. Malgré le surgissement sporadique d'une violence terrible des combats (toujours aussi percutants depuis Thin Red Line) et des sentiments, c'est encore la douceur et la lenteur de la pousse de l'herbe qui prend l'avantage, en dernière instance, sur les choses du monde.
Surtout ne pas se fier à la cruelle bande annonce, qui non contente de ne pas rendre justice au film, tenterait de le faire passer pour un énième avatar des productions costumées grandiloquentes (type Alexandre) ou pour un action movie dans lequel plastronnerait un Colin Farrell au top de son attitude de bad boy à minettes. Non pas que le ténébreux irlandais se révèle ici soudainement comme un grand acteur mais la direction élé(a)gante nous dispense de la frime qui, il faut bien le dire, caractérise parfois son jeu. Techniquement The New World est une merveille à voir défiler. A défaut d'être un grand inventeur de formes, Malick démontre encore une fois la virtuosité palpitante de son cinéma, dans un exercice lyrique où, pourtant, il est désormais attendu. De la pertinence des jump-cuts (dont il n'abuse pas) à la mise en lumière naturelle éblouissante d'Emmanuel Lubezki, on ne garde, en fin de compte, que la fluidité du découpage.
Tout contribue donc à la mythification troublante et profonde d'une histoire par la présence irréductible de la nature. En cela, The New World évoque parfois La Nuit du chasseur, de Laughton. On y a affaire à des hommes et femmes comme détachés de leur consciences, rendu à l'état originel, même pour les plus "civilisés" d'entre eux.
Axel
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