Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Scandaleusement célèbre (Infamous)


USA / 2007

18.04.2007
 



LE BAISER DE L'HOMME ARAIGNEE





Je peux transformer en art ce qui me blesse

Après un film qui traitait exactement du même sujet (Truman Capote de Bennett Miller), Infamous - oublions tout de suite la traduction française du titre - relance l’intérêt créé par le cinéma autour de l’écrivain Truman Capote.
Truman Capote est un new-yorkais intellectuel et mondain. Ecrivain adulé, homosexuel notoire à l’esprit acéré, il est toujours prêt à tout pour faire un bon mot, entouré de nombreuses femmes qui l’adulent. La rencontre avec les tueurs qui lui inspireront De sang froidchangera à jamais le cours de sa vie. Il écrit son chef-d’œuvre et en ressort transformé à jamais.
Au fur et à mesure qu’il se développe, le film gagne en densité. Ce qui s’annonce comme une comédie de mœurs à la Woody Allen prend lentement un ton plus noir. Le film connaît pourtant quelques maladresses de départ: les interviews qui ponctuent le début du film, quelques scènes un peu forcées et qui s’apesentissent sur le côté excentrique de l’écrivain ainsi qu’une musique un peu trop présente. Infamous ne brille pas tant par ses mouvements de caméra ni par l’originalité de son montage (peu rythmé et linéaire) que par la grande qualité de son scénario et l’aspect littéraire des dialogues. Petit à petit, il gagne en intensité dramatique et finit par emporter le spectateur au moment de la rencontre entre l’écrivain et les tueurs. Les entretiens en prison représentent les moments les plus denses et les plus réussis du film, notamment dans la relation entre Capote et le prisonnier Smith. Ainsi le réalisateur opère un glissement progressif mais définitif de la lumière aux ténèbres, de la comédie à la tragédie. Evolution en accord avec la vie de Capote qui passa du triomphe à la tragédie.
La performance de Toby Jones à l’écran donne au film le sceau de la comédie dramatique. Un acteur anglais discret même si les fans de Harry Potter le connaissent bien puisqu’il prête sa voix à l'elfe Dobby dans le deuxième volet des aventures de l'apprenti sorcier créé par J.K. Rowling. Une grande partie du travail de l’acteur a été de restituer la voix si particulière de Truman Capote ainsi que toutes ses manies. Le film permet ainsi de présenter l’écrivain, son anticonformisme mais aussi sa grande vulnérabilité. Etant moins connu du grand public que Philip Seymour Hoffman (le Truman de Miller), il peut mieux s’effacer derrière le personnage de Capote qui nous apparaît très proche et très réaliste. Toby Jones parvient à merveille à nous faire comprendre l’homme divisé entre son image d’artiste frivole et ce qu’il est vraiment, un être grave et souffrant.
Sur ce plan là, le film dévoile un déchirement humain de toute beauté qui trouve son point culminant dans la relation amoureuse qui se noue entre l’écrivain et le prisonnier. Cette rencontre inattendue vient bouleverser la vie de Capote. Il devra être obligé de jouer « carte sur table », livrer son humanité sans se dissimuler derrière les artifices pour que Smith lui fasse réellement confiance et lui confie ses états d’âme. Par la suite, ni les soirées new yorkaises, ni même l’écriture ne viendront plus combler la détresse de l’homme blessé. En acceptant de lâcher prise et de réellement entrer en relation, l’écrivain renoue avec son humanité propre et des blessures bien enfouies. Parcours pour le moins original où l’auteur réalise qu’il puise dans ses souffrances l’art d’écrire. Je peux transformer en art ce qui me blesse finit-il par confier à Smith.
Le film permet ainsi de montrer l’itinéraire intérieur d’un homme, où sa vie le rejoint et le croisement le contraint à une conversion. Un cinéma qui dévoile ce moment profondément spirituel où la vérité de l’existence, aussi brutale soit-elle, ne peut plus se cacher derrière l’artifice et l’image. Point de basculement à partir duquel Truman Capote aurait pu se redresser et poursuivre une belle carrière d’écrivain. On connaît malheureusement la suite...
 
Pierre

 
 
 
 

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