Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Interview


USA / 2007

01.08.2007
 



VALEURS VOLEES





"- C’est bizarre pour un journaliste d’être aussi peu curieux."

Steve Buscemi nous avait laissé sur une route pleine d’espoir pour son Lonesome Jim un peu déprimé. Toujours à l’affût des contradictions humaines et des souffrances individuelles, le voici posant sa caméra dans un gigantesque loft, cadre idéal pour un huis-clos aux apparences de théâtre filmé. Le cadre est ostentatoire et la ville, New York, s’avère cynique et superficielle. Mais, surtout, grâce à quelques habiletés de scénario, malgré cet enfermement, notre attention n’est jamais distraite, égarée. Cela tient sans doute au jeu, à cette éloge du je. Confessions intimes entre deux inconnus, Interview est une partie machiavélique qui ne va s’appeler manipulation (et donc avec un vainqueur et un soumis) qu’aux dernières minutes du film. Jusque là nous croirons tour à tour à rencontre décalée entre deux êtres que tout oppose, à la découverte et la tentation de l’un et de l’autre, à une sorte de relation de substitution et de séduction entre deux êtres un peu perdus. Le journaliste, désabusé, a trop longtemps flirté avec le mensonge et se doit de clamer la vérité pour retrouver sa dignité. La starlette, abusive, ne sait plus ce qu’est la sincérité, au point de se ressourcer dans la drogue et l’alcool, pour continuer la partie, sa vie. Tous les deux n’ont plus de sentiments, mais sont perdus au milieu de la confusion de leurs comportements. Il y a une sensibilité qui effleure. Entre tragique et comédie, caustique et mordante ironie. Le chat et la souris se chasse, mais les motifs, cachés ne sont pas les mêmes. Chacun pourtant manigance dans son coin au détriment de l’autre.

Une histoire finalement perverse, où l’ambiance est tendue, entre dogme danois maîtrisé, respect à l’œuvre originelle de Theo Van Gogh (le fan s’appelle Théo, le camion de déménagement Van Gogh, l’actrice est originaire d’Amsterdam). Elle semble blonde et stupide balançant un candide « Faut pas m’en vouloir, j’ai sûrement le cerveau en silicone. » Sienna Miller est parfaite en chieuse provocatrice, intelligente, et charmeuse. Buscemi a un sens du casting et un don pour l’humour noir qui ravirait n’importe quel cinéphile. Par conséquent, après tant de petits plaisirs presque malsains à les voir s’entredéchirer et s’attirer, on peut regretter que l’ensemble soit un peu convenu dans le fond. On n’échappe à ce binaire gentil/méchant, rédemption/jugement, compassion/trahison. Interview se révèle un joli exercice de style qui fait écho à La Corde (Hitchcock). Il aurait peut-être fallu sortir des schémas habituels en guise de morale, et donner au vaincu le sourire de la sérénité ou au triomphateur le goût de la culpabilité.
 
v.

 
 
 
 

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