Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Queen Size Bed (Los dos lados de la cama)


Espagne / 2005

31.10.2007
 



LE DECLIN DE L'EMPIRE MASCULIN





"- Ne me quitte pas pour un strip-teaser, c'est que du muscle.
- Pas comme toi.
"

Le cinéma espagnol continue d'explorer la confusion des genres, et de jouer avec les frontières invisibles de l'intime. Sa particularité est toujours de mêler aussi les genres cinématographiques, comme si le flou des sentiments et des sexualités ne pouvait se traiter qu'avec une forme variée et chaotique. On mixe ainsi allègrement le mélodrame, le vaudeville, la comédie musicale, la noirceur psychologique et même un zeste de thriller. Le cinéma espagnol nous délivre donc des films aux sujets graves ou dans l'air du temps avec un style qui s'enracine dans les premiers Almodovar. Sorte de nostalgie de la movida pour des cinéastes en quête d'émancipation mais aussi ex-croissance d'un système d'écriture qui se décline sous tous ses ressors, de 20 centimètres à Reinas en passant par Azul. L'Espagne s'interroge finalement peu sur son évolution très rapide des moeurs, réplique instantanée à la chape de plomb franquiste. Elle préfère s'attacher à comprendre comment ces Espagnols post-dictature appréhendent cette liberté offerte, alors que les traditions sont encore persistantes. Queen Size Bed est une parfaite synthèse de ces sujets. Entre les inadaptés et les progressistes, les hommes paumés et les femmes dubitatives mais fonceuses, le film oscille sur les oppositions et contradictions des deux sexe, en y insérant des nuances qui font sortir le match de la caricature habituelle.

Portes ouvertes et placards à ouvrir
Le film parvient à nous divertir de bout en bout. Une démonstration impeccable d'un scénario qui ne s'encombre pas de temps morts tout en abordant toutes les possibilités de son idée de départ. La mise en scène, sans être exceptionnelle, est suffisamment maîtrisée dans les séquences "à effets" pour ménager quelques surprises. Et la chorégraphie est plus proche du savoir faire anglo-saxon que du bricolage à la française. Cependant, Queen Size Bed défoule le spectateur, jubilant, en mal de soleil et de bonne humeur frâce à ses comédiens. Le quatuor s'orchestre avec précision : de leur gueule à leurs fringues, leur personnage est cohérent, et l'on comprend vite quel caractère les anime. La partition ne serait pas aussi bonne s'ils n'avaient pas les seconds rôles. Tous apportent une autre vision du couple, de l'identité sexuelle comme de la difficulté à dialoguer entre les sexes. Au coeur de tout cela, une femme, souvent ivre, pétillante, seule et séduisante, mature et dépressive, jouissive et généreuse. Elle irradie les scènes. Elle incarne le spectateur qui pose les questions en connaissant les réponses, elle guide chacun des mâles vers la vérité, vers de nouveaux horizons. Elle est l'ange, le déclencheur de rires ou d'émotions, celle qui réconcilie ou en tout cas qui brise les tabous, qui scie les barreaux. Elle n'a rien des affreux, cruels, méchants et infidèles qui peuplent l'entourage de ces couples en perdition, rongé par la jalousie et la suspicion. Ode à l'amitié et à l'amour sans compromis possible, l'inconscient, se révèle, comme souvent, par des chansons, autant de tubes en puissance dansés dans des décors routiniers et urbains. Le peps que ces intermèdes donnent ne fait quand même pas oublier que les hommes sont d'irrésistibles crétins sentimentaux et obsédés quand les femmes jouent aux tentantes garces idéalistes et indépendantes.

Parce que les personnages sont bien plus riches qu'à l'accoutumée, parce qu'ils ne reposent pas sur de simples stéréotypes, le cinéaste les fait évoluer, et nous fait tenir jusqu'à la fin avec quatre individus face à leur destin amoureux. Les possibilités sont multiples. N'essayez pas de les devinez. Le happy end n'existe pas dans le réel. Cela n'empêche pas de sortir heureux : sans doute, parce que les personnages ont achevé leur mue, partant d'une aspiration fantasmatique du couple bourgeois vers une connaissance de soi plus égocentrique mais forcément plus épanouissante.
 
v.

 
 
 
 

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