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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Paupières bleues (Párpados Azules)
Mexique / 2006
14.11.2007
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ULTRA MODERNE SOLITUDE
“- Qui est avec toi ?
- Personne. C’est la radio.”
Deux coeurs esseulés, une rencontre favorisée par le hasard, un providentiel voyage de rêve… Tous les ingrédients étaient réunis pour nous concocter une nouvelle soupe sentimentale, une de plus. Mais l’amour n’est pas le sujet de ce long métrage. La magie des rencontres inopinées non plus. Aussi est-il exempt de toute mièvrerie. Le film parle de la solitude, cette solitude très contemporaine des habitants de métropoles. Celle qui s’accommode de n’avoir pour compagnie que le murmure de la radio ou de la télévision. Celle qui enferme les êtres dans un no (wo)man’s land relationnel sans retour et qui est ici filmée au plus près de son intimité. Il y a quelque chose de Lost in translation dans cette histoire, à la différence notable qu’aucune étincelle ne viendra élever l’existence de ces deux âmes noyées dans un univers trop grand et trop lourd pour elles. Socialement invisibles et donc inexistants, Marina et Victor incarnent l’un pour l’autre l’appel de la dernière chance. De bonheur, de vie à deux, de communication. On nous les montre dans un parallélisme constant opérer les actions de leur morne quotidien et sans écho. Un corridor de scènes pathétiques mais non dénuées d’humour, portées par deux comédiens extraordinaires, Cecilia Suarez et Enrique Arreala, qui parviennent – et c’est un tour de force – à être à la fois insipides et touchants. Ils se cherchent et se fuient dans le même mouvement. Façonnés par leur trop longue solitude, ils sont comme happés par une incommunicabilité très tchékhovienne. Elle, marche voûtée, comme une petite fille complexée, et répète les mêmes banalités d’usage ; lui, comble son absence de conversation en évoquant sans cesse un passé plus glorieux que son présent, peuplé d’anciens camarades d’école dont il demeure sans nouvelle. Incapables d’inventer leur relation, ils en sont réduits à la fantasmer à partir d’un film et à se heurter à la dure réalité : l’alchimie ne se fabrique pas. Ils n’ont rien à se dire. Ce qui les amènera à l’unique moment où l’échange se crée enfin. Ils enlèvent leur masque et s’avouent que leur seule raison de rester ensemble réside dans ce désespoir qu’ils subissent, leur unique point commun. Puis continuent à (sur)vivre ainsi, ballottés entre la douce agonie de leurs illusions et l’espoir, symbolisés par ces oiseaux exotiques que l’on choisit de laisser s’envoler ou de maintenir en cage. Karine
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