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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Bee Movie - drôle d'abeille
USA / 2007
12.12.2007
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LE MIEL PEUT ATTENDRE
"- Pilonnez ces pétunias, suçoires à rayures!"
Heureuse surprise qui nous trouerait presque le dard. Bee Movie, sans être catégorie A, surprend le spectateur gavé de dessins animés, quelque soit sa dimension. DreamWorks est même parvenu, en dehors de sa franchise Shrek, a ne pas nous servir un plat vite fait (Madagascar) ou réchauffé (Shark Tale). On se rapproche davantage de Fourmiz, notamment dans l'intention. Il n'est pas question, ici, de faire dans la niaiserie à la Maya l'abeille. Certaines séquences flirtent plus avec l'esprit de Monstres & cie. Les producteurs ont voulu, à travers une histoire irréelle, sensibiliser le public aux fragiles équilibres de l'écosystème mais aussi aux vertus du travail, aux valeurs du collectif. Car lorsque les abeilles, insectes sociaux par définition, ne foutent plus rien, se la coulent douce dans une société opulente, remplie de loisirs, le monde s'écroule, la végétation meurt et la menace écologique plane.
Bee Movie ne réhabilite pas forcément les abeilles, mais leur donne un rôle vertueux dans nos cycles de vie. Il y a deux univers. Le premier est improbable, celui des abeilles ; elles sont humanisées (comme dans Fourmiz), régies par leur propre société (aux limites de la dictature communiste aux cadences fordistes). "3 jours d'école, 3 jours de lycée, 3 jours de fac. J'étais content de mon année sabbatique." Une ruche design aux allures surréalistes où l'on se taille le dard comme une mine de crayon à papier. Chacun a sa fonction, sa tâche. Le personnage principal est plus un Outsider qu'une vedette de Bal de promo : rebelle, refusant la fatalité, pas très sexy, malin, rêveur, aventurier... Plutôt du genre à emballer avec sa tchatche qu'avec son physique. Et plutôt du style à remettre en cause l'ordre établi qu'à se plier aux règles. Cet univers mielleux est séduisant et insolite.
Evidemment, l'autre univers, parallèle, celui des humains, est plus classique, déjà vus. Par ailleurs, le choix de New York en toile de fond n'apporte rien à l'histoire. Cependant, l'idée de ce dialogue entre la jeune fleuriste et l'abeille, et surtout la relation qui se noue entre eux, créé les conditions pour sortir le film de son délire apidé. Sans être source de gags absurdes comme souvent, ce duo préfère tisser un lien entre l'Homme et l'Abeille, symbolisant la Nature. Le film se moque davantage des humains terrifiés par cette petite bestiole, ou de ces mâles un peu bêtas. Si bien que la satire socio-politique vire vers la comédie à la Capra, avec un procès proche de l'Extravagant Monsieur Deeds. Bien sûr, cela dévie le scénario vers quelque chose de plus hollywoodien. L'absurdité cumulée du système judiciaire et de la situation fictive (les hommes spolient la production de miel aux abeilles pour la vendre dans de supermarchés) permet aux auteurs de se moquer ouvertement du marketing, du consumérisme, des OGM... "Elles butinent" et aux humains "le butin" (Honey / Money en vo). Mais en donnant gain de cause aux insectes, ils ouvrent aussi la voie à un cauchemar biologique.
C'est là que Bee Movie dépasse son statut de divertissement, un très bon divertissement, faut-il le préciser? Qu parfois part en vrille (Sting - "Dard" en anglais - convoqué à la barre pour avoir changé son nom, Winnie the Pooh accusé de voler le miel). Le final s'apparente plus au film catastrophe en obligeant le spectateur à s'interroger sur la coexistence entre l'Homme et des "bestioles", et leur utilité dans la chaîne naturelle. D'ailleurs le genre catastrophe n'est pas un hasard quand on voit cette hallucinante séquence digne de Y-a-t'il un pilote dans l'avion? où un jet doit atterrir sans pilote...
Mais, surtout et avant tout, Bee Movie montre les limites de l'absolutisme. La justice n'est pas simplement donner raison aux victimes. C'est aussi protéger les uns des excès des autres, faire attention que la victoire d'un camp ne compromet pas l'existence de l'autre. Morale subtile où le romantisme, finalement, n'a pas beaucoup de place. Il ne s'agit pas de faire un Happy end avec une ribambelle de nouveaux nés en perspective. Il n'y a pas de Plan Bee. Le cartoon préfère s'attacher à la poésie de son propos. Une fable que La Fontaine aurait pu écrire. v.
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