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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Filatures (Gun Chung) (Eye in the Sky)
Chine / 2008
02.01.2008
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SURVEILLANCE RAPPROCHEE
Scénariste de formation ayant collaboré avec les maîtres de Honk Kong Johnnie To (qui officie ici en tant que producteur) et Wai Ka Fai, Yau Nai Hoi réalise avec Filatures son premier long métrage. D’un classicisme d’école qui renvoie au passé d’écriture du cinéaste, ce polar urbain acéré est un essai en « immersion » osant développer les notions d’espace-temps et de confinement. Chassé-croisé entre flics et voyous dans un jeu de regards multidimensionnels (œil et caméra de vidéosurveillance), Filatures structure sa mise en scène verticale en proposant un décor tout en volume, découpant des espaces tampon par association de métriques variées. Ce qui donne assez justement le titre Eye in the Sky pour les territoires anglos... Pourtant cette géographie spatiale ne se retrouve pas dans le traitement beaucoup trop linéaire d’une filature qui propose essentiellement un montage en « va-et-vient » fait de regards et de mouvements de position.
Si le film n’arrive pas à développer des enjeux inversement proportionnel à la thématique soulevée, la tension néanmoins suscitée provient certainement d’une lecture différenciée qui confine l’enquête au cœur d’une métrique humaine, celle du quartier, de la rue, du parcours. Une telle utilisation implique inévitablement un resserrement de l’espace, créant ce sentiment visuel « du contact physique » et devient alors l’antithèse d’un film comme Ennemi d’Etat. Le rapport au visuel, à la physionomie, à la reconnaissance même du terrain, prend le pas sur le « Big Eye » et son contrôle quasi divin. Minutieuse, la mise en scène s’essouffle pourtant à trouver des ruptures de rythme qui sortiraient le film de la simple « filature » policière. Cette inclination à demeurer dans un jeu d’esquive, de planque, voir de contact, confine le métrage dans une claustrophobie certes habile mais répétitive et manquant cruellement de personnalité.
Autre qualité ayant pour corollaire ce qui vient d’être énoncé. Filatures à la bonne idée de nous plonger dans le vif du sujet dès les premiers plans sans jamais en dévier d’une virgule, ni nous en faire ressortir. C’est sans doute l’aspect le plus spécifique, le plus travaillé et le plus stimulant d’un film qui, par ce parti pris scénaristique, nous offre quelques moments forts d’une enquête un peu trop simpliste. Assez bien maîtrisé au sens dynamique des plans, il reste néanmoins trop convenu et surtout condamne dans l’oeuf la moindre velléité d’un regard critique d’une époque aussi « surveillée », « traquée » et « contrôlée » que la nôtre.
Si tel n’est pas le propos d’un réalisateur désireux d’offrir avant tout un spectacle dans la pure tradition du polar urbain Hongkongais, celui-ci enferme ses personnages (et avec lui le spectateur) dans une traque qui tourne un peu en rond. Si le casting reste parfait, tout comme l’utilisation de la ville, leur imbrication ne produit pas l’étincelle qui aurait fait de Filatures un grand polar cybernétique du XXIe siècle.
geoffroy
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