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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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It's a free world
Royaume Uni / 2007
02.01.2008
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LA BALANCE
« - Je suis un homme, pas un esclave. »
It’s a free world n’a rien des meilleurs Ken Loach, tant dans l’intensité dramatique que dans l’empathie pour le personnage principal. Pourtant, à l’instar de tous les grands cinéastes, le drame social et humain qu’il dépeint s’élève largement au dessus de la plupart des productions similaires. Par sa maîtrise du scénario, la subtilité de son propos, il démontre efficacement les contradictions d’un monde jungle, où la loi du plus fort est toujours d’actualité. Car si les choix de la blonde Angie nous apparaissent comme un refus de la fatalité, et donc un éloge d’un certain déterminisme, ils ne sont dictés que par une morale ou par ses faiblesses. Le fait de ne pas se soumettre à un harcèlement sexuel entraine son licenciement, mais aussi la création de son entreprise. Le fait de compromettre son succès professionnel en prenant des risques avec un client douteux va engranger une série de problèmes qui vont jusqu’à menacer son confort enfin acquis. Chaque cause a sa conséquence, chaque choix n’est pas anodin. Ce film sur l’effet papillon ait de son héroïne une femme sexy, libre, volontariste, courageuse, mais aussi dépassée et dévalorisée. En plaçant la famille et les rapports humains après sa réussite financière, elle se perd et, opportuniste, se retrouve piégée par l’argent. Loach ne l’épargne pas, et du coup, ne nous la rendant pas sympathique sur le dernier tiers du film, nous laisse un peu à l’écart d’une histoire qui perd de son intérêt, puisque son personnage semble moins défendable. La femme honnête ne peut pas être aussi égoïste. Le tournant a lieu quand elle devient dénonciatrice d’immigrants clandestins pour son intérêt personnel. Hélas le script vire au mauvais thriller, peu crédible, et s’achève sur une pise de conscience trop exagérée pour nous faire changer d’avis sur cette œuvre qui s’avère un peu maladroite, mais toujours juste.
Un monde sauvage
En traitant de l’immigration positive, Loach reste ancré dans son temps et en prise directe avec les tourments de notre époque. Profs, infirmiers, médecins dans leurs pays, ils deviennent serveurs avec une paye de misère en Occident. Ce nouveau marché aux esclaves, aux marges des lois, à l’écart des règles sociales minima, ne touche pas seulement les immigrés. Finalement Angie se fait elle aussi virer sans ménagement, sans préavis, sans même pouvoir se défendre, par des cadres bien propres. Le cinéaste explore furtivement la spirale infernale d’une société qui piège ses propres citoyens par les dettes, les crédits, les diplômes bradés. Nous sommes davantage interpellés, convaincus par sa vision de la précarité au sein même des métropoles, et notamment ces bidonvilles insalubres qui abritent les immigrés. Tant de conditions désastreuses qui conduisent à des tensions humaines inéluctables face à un Etat hypocrite et des patrons cupides. Il n’y a plus aucune valeur mais tout est monnayable. Etat des lieux des graines de violence (de vengeance ?) dont les enfants semblent les victimes actuelles, les futur protagonistes. « Bob Dylan avait raison : les temps changent. » En pire. Loach signe encore une fois un film sûrement trop moral mais irréfutablement pessimiste. v.
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