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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Un coeur simple
France / 2008
26.03.2008
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LES FEMMES DU CALVAIRE
"- Tu m'aimes bien un peu, non? Et pour le reste ça viendra avec le temps."
Un coeur simple est un film flottant. Il se perd comme les regards paumés, flous et silencieux de Sandrine Bonnaire. Il y a un ailleurs. Indéfinissable, il est au coeur de la belle âme de cette servante, dans les rêves de chacun : un amour, un continent lointain, une vie meilleure. Si l'oeuvre ne perce pas ce mystère d'un monde étranger aux êtres, elle parvient à trouver corps et coeurs dans ces deux femmes subissant un destin qui s'acharne, prêtent à se noyer dans l'extase dès qu'un plaisir les envahit. Coeur simple et désirs simples, Bonnaire, lumineuse, dépassée par tout, presque mutique, trouve ici son plus beau rôle depuis des lustres. Toute en douleur. Foïs renvoie une belle lumière, et dans ses dernières scènes, elle semble tout autant égarée que sa bonne. L'une est constamment abandonnée, l'autre fait tout pour être abandonnée, ce qui les rend complices. Les deux femmes fusionnent alors dans une amitié presque irréelle. Il n'y a rien de lesbien. L'attirance mélange l'instinct et le besoin. L'affection universelle et humaine. Une brave fille et une femme trop corsetée qui s'abandonnent à leur fièvre frustrée. La dureté revêche de Foïs face à l'animalité suave de Bonnaire créent un duel / duo qui fascine. En arrière plan, se dresse le portrait d'enfants plus proches de la bonne que de la maman, du neveu préférant la tante à la mère. Femme courage. Ce paradoxe accentuera la sanctification de l'héroïne, emplie de sa souffrance féminine (un homme qui l'a laissée choir) et physique (elle boîte). Elle porte les stigmates de sa vie cruelle.
Pour son premier film, Marion Laine impose son style. Flaubert aide un peu à parsemer de l'humour dans ce drame ("- Il neige. - ce sont les pétale des pruniers. C'est le printemps, Mathilde. - Ma lessive!"). Mais la réalisatrice propose avant tout une fiction naturaliste, féministe et romantique. Véritables tableaux, sa Normandie est magnifiée par une photo plus proche de Lady Chatterley que des Maupassant de France 2. Un pari risqué tant l'époque semblait ennuyeuse. Mais en jouant sur le symbolisme, du perroquet au taureau, en tentant d'illustrer la confusion mentale des sentiments de cette amitié si particulière, Laine essaie de transcender une simple fable. Le film aurait pu s'adonner davantage à cette folie des femmes. Il préfère nous laisser voguer au fil des séquences, des émois de chacune, de plus en plus meurtries, de plus en plus éparses. Epousant trop les errements psychologiques, son rythme se ralentit sans forcément maintenir le spectateur en alerte. Mais il reste de ce coeur simple, un battement palpitant où deux actrices ont redonné goût à ces dames de la côte. v.
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