Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Il va pleuvoir sur Conakry


Guinée / 2007

30.04.2008
 



LA PLUIE NE FAIT PAS TOUJOURS LE BEAU TEMPS





"- Même le bonheur porte malheur"



Le cinéma africain est aujourd’hui encore un cinéma peu connu à travers le monde, par manque de visibilité, de promotion et de production. Absents des grands festivals, les films sont peu nombreux à pouvoir émerger du continent africain mais certaines petites perles réussissent tout de même à voir le jour. C’est le cas d’Il va pleuvoir sur Conakry, premier long métrage du réalisateur guinéen Cheick Fantamady Camara. Celui-ci dit de son film : « c’est mon regard et mes critiques sur ma propre société ». Le ton est donné. Il va pleuvoir sur Conakry est une peinture, une peinture en mouvement, un portrait vivant d’une société en pleine évolution, subissant et désirant à la fois de multiples mutations.



Cette Guinée d’aujourd’hui a, dans le récit, deux visages. Elle porte deux masques qui s’opposent. Celui de Karamo, imam, est dévoué à son Dieu et guide son peuple. Face à lui se trouve celui de Bangali, dit BB, jeune caricaturiste de presse qui souhaite vivre sa vie comme il l’entend. Fils de l’imam Karamo, Bangali respecte la religion mais ouvre également les yeux sur le monde qui l’entoure et ne désire sacrifier ni son travail ni sa vie amoureuse afin de satisfaire un père qui ne le comprend pas et qu’il ne comprend pas.
A première vue, Il va pleuvoir sur Conakry se fonde sur ces antagonismes, sur le conflit de générations opposant un conservatisme religieux à un modernisme agnostique. Certains plans plaçant face à face le père et le fils mettent en scène cet aspect-ci du film. Néanmoins ce dernier ne s’arrête pas là. Derrière cette guerre entre deux personnes issues de deux générations, c’est toute une société qui transparaît. Le réalisateur cherche alors à briser les tabous et aborde des thèmes tels que la religion mais aussi le fétichisme, la sexualité, la place de la femme au sein de la famille ainsi que dans la société et fait même un petit clin d’œil à l’homosexualité lors d’une scène. Les sujets sont donc nombreux mais traités avec intelligence et finesse, le film évite le piège de ressembler à un fourre-tout dans lequel les idées se succèderaient simplement sans être approfondies.

Cheick Fantamady Camara a choisi le ton de l’engagement. Le discours qui se dégage de son film n’est pas neutre mais le message qu’il souhaite faire passer n’est pas forcément celui que l’on reçoit en premier. Il faut alors creuser un peu afin d’apercevoir sous la surface le véritable message du réalisateur. Le film ne traite pas uniquement d’un conflit de générations mais d’une manière déguisée il évoque le besoin et l’envie de cohabitation de la part de ces deux générations. Sous le regard du cinéaste, modernité et tradition s’affrontent afin de mieux vivre ensemble.

On pourra regretter une mise en scène classique manquant un peu d’originalité, un jeu parfois déconcertant de la part de certains acteurs et une fin apostrophante. Malgré cela, les propos du film restent forts et percutants. Les non-dits n’y trouvent pas leur place et le réalisme qui réussit à s’imprimer sur l’écran ne rend le film que plus convaincant. Il va pleuvoir sur Conakry est une petite fenêtre sur le paysage cinématographique africain comme on aimerait avoir l’occasion d’en ouvrir plus souvent.
 
Morgane

 
 
 
 

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