Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Woman on the beach (Haebyuneui Yeoin)


Corée du Sud / 2006

20.08.2008
 



FEMMES EN MIROIR





"Pourquoi les filles rejetées ici auraient la belle vie là-bas ?"

Quoi de neuf chez Hong Sang-soo ? A vrai dire, pas grand-chose. La réalisateur coréen nous a habitués film après film à décortiquer les variations subtiles des rapports hommes-femmes, et Woman on the beach ne déroge pas à la règle. Une nouvelle fois, il s’attache aux relations complexes d’un trio amoureux, non pas sur un mode universel qui induirait forcément des drames et des passions fulgurantes, mais d’une manière assez anecdotique, quasi triviale, qui n’a strictement rien à voir avec l’irréalisme enchanté de la comédie sentimentale traditionnelle. D’ailleurs, s’il fallait étiqueter les films de Hong Sang-soo, sans doute choisirait-on une appellation du type "étude terre-à-terre des mœurs amoureuses". Pas très glamour, mais ô combien réaliste !

Pourtant, que l’on ne s’y trompe pas, le cinéaste revient toujours aux mêmes obsessions, mais sans omettre de se renouveler formellement. Avec ce nouvel opus (comme dans le suivant, Night and day sorti le mois dernier mais tourné après), il semble en effet se faire plus léger et ludique, comme si, bien conscient de ressasser toujours les mêmes thèmes, il essayait par moments d’adresser au spectateur des clins d’œil complices par le biais de séquences où il semble se caricaturer lui-même. Ainsi cette scène hilarante où la jeune fille convoitée par deux hommes fait le siège de la chambre d’hôtel de celui qu’elle a choisi… et qui vient précisément de la tromper avec une autre. On assiste alors à un glissement de trio amoureux, Moon-sook passant du statut d’objet convoité à celui de sujet convoitant, entrant en rivalité avec une femme qui, en plus, lui ressemble étrangement. Incontestablement, Hong Sang-soo s’amuse, brouille les pistes, multiplie les résonnances entre les scènes et la répétition absurde des situations. Comme si ses personnages étaient pris dans un manège infernal les faisant inlassablement repasser par les mêmes obstacles. Et lui de se repaître de la fluctuation de leurs personnalités, de cette manière qu’a chacun de réagir en prenant en compte les attentes ou les désirs supposés de l’autre.

Car bien sûr, les protagonistes de Woman on the beach ne sont jamais des stéréotypes, qui feraient exactement ce que l’on attend d’eux, mais au contraire des êtres délicieusement inconsistants, qui suivent leurs désirs et leurs émotions, quitte à changer sans cesse d’avis, revenir sur leurs décisions ou tout simplement donner l’impression de ne pas du tout savoir ce qu’ils veulent. Là où les héros traditionnels poursuivent un but défini et primordial dont il leur est impossible de se détourner (qu’il s’agisse de sauver le monde ou de séduire la femme de leur vie), les personnages inventés par le réalisateur coréen suivent (en parallèle ou par alternance) toute une série de petits buts distincts qui varient en fonction des circonstances, voire de leurs interlocuteurs. On pourrait les croire terriblement superficiels, incapables de penser à la même chose plus de dix minutes de suite, mais on les découvre en vérité éminemment contemporains, aux prises avec une société coréenne qui exige de l’individu tout et son contraire : respecter les traditions tout en s’appropriant la modernité, valoriser l’esprit de groupe tout en obéissant aux valeurs individualistes, rompre avec les codes sexués du passé sans rien perdre de sa virilité ou de sa féminité… Hong Sang-soo montre avec un certain humour les effets de cette confusion sur une génération qui ne sait plus vraiment à quel saint se vouer, ni à quelle cause se dévouer, mais ne prend pas le risque de livrer des réponses toutes faites. On comprend toutefois, à la vue de la toute dernière scène, qu’il a encore envers et contre tout quelque respect pour les hommes (et les femmes) de son pays.
 
MpM

 
 
 
 

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