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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Le divorce
USA / 2003
08.10.03
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L’AFFAIRE EST DANS LE SAC
"- You look so french !"
Il y a des choses immuables. Tandis que Demme ou Frankenheimer tentent de donner une image plus cosmopolite, plus noire, plus dure de la Ville Lumière, James Ivory, fidèle à son style muséologique et littéraire, préfère en conserver une image plus classique, pour ne pas dire nostalgique. La chansonnette remplace le funk et le rap : les choix musicaux illustrent ce décalage, puisque ici nous avons le droit aux très consensuels Patrick Bruel (chantant du Trenet) ou Carla Bruni. Paris chic plutôt qu’ethnique, donc. Celui de la Rive Gauche , entre Café de Flore et petites librairies et celui des quartiers snobs, entre Hermès et Chez Georges. Les rapports entre Américains et Français sont tendus mais courtois, diplomatiques mais ouverts, froids mais amicaux. Les Américains y sont opulents et élitistes quand les Français sont issus de vieilles familles riches et conservatrices. Clairement, cela ne peut être la réalité. Nous sommes dans un songe, un fantasme, une rêverie romantique. Cette obsession pour les différents arts, de la mode à la peinture, fil conducteur de son oeuvre, rejoint ainsi les désirs un peu vains d’une aristocratie déchue et pourtant ressuscitée par les productions (très haut de gamme) de Merchant/Ivory.
Tout cela est très raffiné. Eloge de l’art de vivre, il est aussi un manuel de la séduction. Un marivaudage qui se promène dans une Vieille France démodée. Car cette gloire à la culture s’accompagne d’une ode à la féminité et à l’amour. Un peu bavard, Le Divorce palabre entre maris, amants, cocus, et leurs conquêtes. Insolite, les rockers acteurs Melvil Poupaud et Rona Hartner ne font que de la figuration (comique) dans ce casting classe. Le plaisir de revoir Glenn Close atténue le ridicule du personnage de Matthew Modine. De même, la caricature de la fashion victim californienne (pour ne pas dire pouffiasse superficielle) incarnée par l’agaçante Kate Hudson est compensée par la justesse, la sensibilité et le charme de Naomi Watts.
Tout est du meilleur goût, même les sales coups. C’est beau, élégant et presque chiant. Le scénario s’embarque dans plusieurs histoires qui nous indiffèrent, et nous présentent de nombreux visages qu’on oublie. Ivory reste en surface, choisissant le vernis plutôt que le grain. Même quand les âmes se troublent, quand l’émotion semble palpable, nous restons à l’écart. Un peu comme ces flics qui discutent de parfum plutôt que de travailler. Paris c’est la dolce vita. On se la coule douce. La ville semble idéale pour transformer un sac de cuir en objet de convoitise et passer son temps au lit à apprendre le french kiss.
Rien de désagréable. Juste un début d’ennui. Il manque de l’esprit ! Ivory aurait pu sortir des sentiers battus et réussir un peu mieux sa fin, baroque et bancale. Avec deux personnages féminins aussi contrastés et intéressants, on était en droit d’attendre un film plus captivant que ce divertissement léger. Car le comble est bien ce "divorce" : une histoire de fric et pas d’amour dans la ville de l’amour où tout le monde évite de parler d’argent. Un divorce vu à l’américaine, donc. Avec un soupçon de french touch. Un film fin de race qui "look so french", comme dirait les parents débarqués de la Côte Ouest. Ivory a vu Paris, de sa chambre, qui avait, on le voit, une très belle vue. vincy
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