Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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L'Oeil du mal (Eagle Eye)


USA / 2008

24.12.2008
 



LES FUGITIFS La désertion n’est pas une option»





C’est presque regrettable. Si le troisième acte n’avait pas été si prévisible, si « mécanique » dans son écriture (avec un happy end évitable), L’œil du mal aurait figuré dans les thrillers les plus marquants de ces dernières années. Flirtant ouvertement sur Hitchcock – La mort aux trousses pour le personnage masculin, L’homme qui en savait trop pour le personnage féminin – le film surfe sur la vague anti Patriot Act, entre parano et technophilie. Classique ? Pas tant que ça, puisque le méchant est un HAL en puissance, une des (in)dignes variations de Big Brother, capable d’épier le moindre grain de sable à l’autre bout du monde, et pire si des faucons belliqueux s’en emparent. Téléphones, jeux vidéos, Ipods, Blackberrys, vidéosurveillance… tout la planète est localisée, vue, entendue, enregistrée…

De là, les scénaristes ont tissé un piège fatal où deux êtres radicalement différents sont manipulés en vue d’un acte terroriste extrême. Ici pas d’arabes, pas de traîtres. Juste une machine. Derrière ce jeu de piste, il y a un discours sur les libertés fondamentales : « je pense au jour où je viendrai à la maison sans me sentir étranger ». Car il n’y a pas de liberté si notre destin est sous l’emprise d’un autre.
Rien de très innovant donc, mais avouons que l’exercice est palpitant. Les poursuites s’enchaînent, les conflits relationnels se succèdent, la menace est longtemps fantôme, puis confuse avant d’être élucidée. Même si l’ennemi d’Etat est facilement identifiable au deuxième acte, son machiavélisme permet au script d’étirer le suspens sur une bonne heure et demi.

La réalisation de Caruso est frénétique, parfois trop pour comprendre l’action dans l’espace et dans le temps. Mais en s’amusant avec son jeu de massacre (on voit rarement les innombrables morts collatéraux), il oublie parfois de donner la profondeur nécessaire pour que sa conclusion ne soit pas un simple soulagement mais bien une véritable réflexion sur l’interprétation trop rigoriste des lois et la déconsidération de l’individu en tant que citoyen. Bien nommée l’opération Guillotine inspire du coup plus de terreur qu’un bug de l’an 2000. Si le chapitre final est convenu, hormis cette stupéfiante image où l’on tue la bête comme on doit mutiler le cyclope, L’œil du mal, dans sa deuxième partie, utilise tous les artifices nécessaires pour ne pas nous ennuyer, jusqu’à cette séquence dans les circuits à bagages d’un aéroport. L’illustration parfaite d’un grand huit de parc d’attractions. Hélas, au final, en misant davantage sur nos peurs irrationnelles que sur nos capacités à arrêter la spirale infernale, le film tombe dans son propre piège : se noyer dans la puissance irréelle des images au détriment d’un sens à donner à ces deux citoyens, victimes mais déterminés.
 
vincy

 
 
 
 

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