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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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The Spirit
USA / 2008
31.12.2008
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QUAND LA VILLE DORT
"Eux, ils n'ont que des fusils et des couteaux. Moi, j'ai la ville entière !"
Fort de son implication, plutôt réussie, dans l’adaptation de son propre roman graphique (Sin city, cosigné avec Roberto Rodriguez), Franck Miller passe la vitesse supérieure en s’attaquant à un classique du genre, The spirit, créé dans les années 40 par Will Eisner. Optant pour un procédé graphique identique à celui de Rodriguez (esthétisme stylisé, noirs et blancs contrastés, taches de couleur saturées, ombres chinoises…), il offre un spectacle visuel particulièrement éblouissant où chaque scène semble une composition unique offerte au regard. Avec ce que cela peut avoir de sublime, mais également d’empesé et d’artificiel. Car à tellement rechercher une écriture cinématographique au plus près de la bande-dessinée (simulation des vignettes par un découpage systématique des séquences, alternance de plans larges et de très gros plans, sursignification expressionniste de l’image au détriment de la mise en scène…), il en retranscrit souvent maladroitement les tics et les dérives.
Ainsi les dialogues, dont l’emphase passe bien à l’écrit, apportant dramatisation et second degré, deviennent ridicules et lénifiants dès lors qu’ils sont prononcés. Les monologues du Spirit sont à ce titre parfaitement insupportables, de même que la plupart des répliques de son ennemi juré, Octopus. Samuel L. Jackson devrait d’ailleurs faire attention à ne pas se laisser enfermer dans ce genre de rôle à fort potentiel de cabotinage, car le voir rouler des yeux en soliloquant a quelque chose de désolant. Seule consolation, tout le casting surjoue, probablement pour recréer à l’écran le souffle épique originel et accentuer le caractère particulier de chacun. Exception regrettable, la ville tant vantée par le Spirit (Central city, son "amour de toujours") que l’on aurait aimé voir prendre plus d’ampleur et devenir un personnage à part entière, se réduit au contraire à quelques éléments impersonnels comme des toits ou des câbles électriques.
Heureusement, le scénario, lui, tient intelligemment la route. Quoique l’intrigue puisse se résumer à un combat entre Spirit et Octopus (le bien contre le mal), la profusion de seconds rôles souvent loufoques (Scarlett Johansonn en institutrice perverse, Paz Vega en danseuse affûtée, Eva Mendès en croqueuse de diamants…) l’empêche de tomber dans le commun ou même de se prendre trop au sérieux. C’est même ce contrepoint humoristique non dénué de cruauté, voire de démence, qui fait tout le sel du film, considérablement moins noir et violent que Sin city. La déception, si déception il y a, est donc plutôt de courte durée…
MpM
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