Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Smart People


USA / 2009

17.06.2009
 



L'EXPRESSION DIFFICILE DES SENTIMENTS





«- Comment avez-vous eu un bébé avec moi ?
- Parce que vous ne savez pas comment utiliser correctement un préservatif.
»

Smart People<.u> est une chronique familiale. De celle qui sent bon le décalage de circonstance à même de raconter, non sans humour ni gravité, les travers d’une famille d’intello confrontée à ses propres turpitudes. Tout le monde y passe, sans effet de hiérarchisation ou de passage obligé du type discours moralisateur des uns vis-à-vis des autres. Le ton, souvent impertinent, s’égare le temps de quelques digressions redondantes, mais façonne des caractères meurtris en soulignant avec clarté l’enjeu principal : comment briser la glace de l’incommunicabilité entre les membres d’une famille arque boutée sur des principes reniant, semble t-il, toute affection ou autres faiblesses de ce genre.

Si le long-métrage de Noam Murro tient la distance niveau « relation familiale décortiquée aux petits oignons », il ruine cette approche par la romance convenue, pour ne pas dire chiante, entre Lawrence (le père taciturne incarné sobrement par un Dennis Quaid investit dans le rôle) et Janet (ancienne élève de Lawrence devenue médecin urgentiste portée par une Sarah Jessica Parker totalement effacée). Vivre une telle histoire pour un homme dans la position sociale de Lawrence n’est pas anormale et, dans le contexte du film, plutôt crédible. A part deux ou trois scènes bien écrites (scènes du restaurant, de la voiture et du réveillon de Noël) le traitement tourne en rond, enfonce des portes ouvertes et plonge le film dans un faux rythme très vite en décalage avec les questions initiales. Mais peut-être était-ce prévu par le réalisateur ? Dans ce cas, pourquoi construire à tout prix une relation inhabituelle et fragile afin de « coller » au caractère grincheux et irascible de Lawrence ? Cette démonstration n’était sans doute pas nécessaire et s’avère être, au final, un coup dans l’eau.

Non, s’il faut retenir quelque chose de ce Smart People, c’est au travers des relations conflictuelles qu’entretiennent les membres de cette famille un brin décalés mais suffisamment réalistes pour susciter l’attention. Dans les nombreux allers-retours ou « mano a mano » existentiel (doute, certitude, semblant de vérité, rôle inversé père/fille, rôle inopérant père/fils, confiance, stéréotype etc.) du film, nous retiendrons le rapprochement improbable entre le frère de Lawrence, Chuck (excellent Thomas Haden Church) et la cadette de la famille, Vanessa (Ellen Page plus vraie que nature). Drôle et tendre à la fois, cette relation synthétise ce besoin de normalité par la confrontation de deux caractères que tout oppose. Là où le film ne marche pas entre Lawrence et Janet, il fonctionne à merveille entre Chuck et Vanessa. Les deux vont apprendre à se connaître, se parler, se chercher et même développer un malentendu affectif de circonstance qui bouleversera le train-train quotidien d’une famille engluée dans le déni. A ce petit jeu nous préférons également la façon dont le cinéaste nous décrit l’ordinaire d’un grand professeur de littérature Victorienne blasé.

Smart People est une chronique. Noam Murro ne termine donc rien, soulève des questions et nous évite le mauvais happy end. Il est toujours difficile d’assumer pleinement ce que l’on est, d’oser changer ce qui nous dérange et d’accepter la différence d’où qu’elle vienne. Le film sans le personnage de Janet y parvenait très bien.
 
geoffroy

 
 
 
 

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