Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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SherryBaby


USA / 2006

24.06.2009
 



UNE FEMME QU'ON CHERIT





« - J’ai volé de la drogue pour m’acheter de la drogue.»

SherryBaby, comme il y a quelques semaines Wendy & Lucy, se repose sur un formalisme en vogue dans le cinéma indépendant américain et une star hollywoodienne déglamourisée. On installe ainsi une vedette dans un « huis-clos » (un bled américain) pour la confronter à ses angoisses, ses tentations, ses démons. Maggie Gyllenhaal, loin des rôles maquillés, se donnent à fond dans son personnage de camée devenue taularde, libérée en conditionnelle. Les seins (lourds) ballotent dans un tee-shirt sans soutien-gorge. C’est le genre de fille à ne pas cacher son plaisir quand on lui fait un cuni dans la cave. On parle de bible, ça n’empêche pas de baiser. « Je vous suce et vous me donnez le boulot que je veux».

Cette femme prête-à-tout ne se soucie pas des conventions et ne prend pas conscience de cette autodestruction qui l’empêche d’avancer. Chaque partie de son corps, de ses sens est scruté par la caméra. Ses bouts de peau écorchés comme ce médaillon en forme de cœur, exhibée, tandis que la croix est cachée.
L’hypocrisie des gens est flagrante face à un personnage aussi vivant, aussi franc. Ils se taisent ou en profitent. Comme son père qui la pelote, ou sa belle-sœur qui la méprise. Cette ado qui n’a pas grandi est en fait en quête perpétuelle d’affection, ce qui la rend plus attachante qu’allumeuse. Fragile enfant qui cherche à se valoriser et à assumer son rôle de mère.

Mais cette femme embarrasse tout le monde, ce monde qui s’était habitué à son absence. A ce titre, la scène du diner est terriblement cruelle et augmente l’empathie que le spectateur éprouve pour elle, malgré cette histoire où elle a le sale rôle. La mise en scène est sobre. Très réaliste. Sans artifice. On ne cherche pas à magnifier quoique ce soit. La vie n’est pas belle. Surtout quand on doit se réhabiliter. Blonde ou brune, confiante ou instable, « clean » ou prête à replonger, elle semble sans défense. Ses protecteurs, trois hommes, trois anges gardiens – son frère, son amant indien, et son agent de probation – vont chacun à leur manière l’aider. Elle va mettre du temps à l’accepter, à le comprendre.

Ce temps-là parfois s’étire et le film souffre d’un rythme alanguit. C’est d’autant plus regrettable qu’avec une telle famille dysfonctionnelle, un tel rôle féminin, une telle subtilité d’écriture, où jamais un jugement moral n’alourdit le propos, cette spirale infernale aurait pu tendre le spectateur attendri. Sa fuite en avant réveille un scénario qui se perdait dans une errance déjà vue et prévisible. D’autant que la fin, sans être joyeuse, peut amener à un espoir de guérison.
 
vincy

 
 
 
 

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