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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Memory of love
/ 2009
19.08.2009
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L'IMPORTANT C'EST D'AIMER
"Moi je peux oublier l’histoire d’amour que tu as eue avec Chen Mo, mais toi, tu dois t’en souvenir."
A quoi tient une histoire d’amour ? Alchimie mystérieuse ou inexorable mécanique qui mène toujours les êtres au même endroit, de la passion au désamour ? Sur une situation de départ bien plus intéressante qu’il n’y paraît, Wang Chao sonde les élans du cœur et ces histoires dont chacun sait qu’elles "finissent mal, en général". Il explore notamment la thèse de la seconde chance, mais aussi la question du pardon et du sacrifice.
Pour ce faire, il gomme tout ce qui parasiterait son point de vue (cris, jalousie, colère, éclats) pour ne garder que des scènes sèches et épurées qui vont droit à l’essentiel. Seuls les regards trahissent l’intériorité torturée des personnages, magnifiquement interprétés par des acteurs confondants de spontanéité et de sensibilité. On croit à l’intelligence intuitive de ce mari qui met à profit sa douleur pour construire une nouvelle vie ainsi qu’à l’indéfectible amitié de ces deux hommes qui unissent leur force pour aider la femme qu’ils ont autrefois aimée, et qui les a trahis tous les deux. Restent des détails, tantôt hyperréalistes (l’hôpital), tantôt symboliques (un bracelet, une robe), qui parsèment le récit comme autant de pièces d’un puzzle tentant d’appréhender les contours d’une relation amoureuse.
On pourrait croire la tâche ardue, mais Wang Chao n’est pas un donneur des leçons. On sent bien qu’il est beaucoup plus intéressé par le fait de dessiner ces contours, aussi flous soient-ils, que par le croquis final. Lui qui s’est fait connaître en observant les bouleversements de la société chinoise contemporaine du point de vue des plus faibles (Voiture de luxe, Jour et nuit, L’orphelin d’Anyang), a juste déplacé son centre d’intérêt. Les Chinois aisés auxquels il s’attache cette fois-ci souffrent du même mal-être que ses personnages précédents. Celui-ci se manifeste juste différemment.
D’où la fuite en avant amoureuse du personnage féminin principal, qui souffre de la solitude et de l’éloignement de son mari. D’où aussi cette prise de consciente subite qui ravage tout sur son passage, comme un retour soudain à ce qui fait l’essence de l’existence. Etre riche rend peut-être même les choses plus compliquées (et absurdes) puisqu’il devient encore plus difficile de savoir ce qui est vraiment important. Une fois le matériel assuré, que reste-t-il ? Ce n’est pas un nouveau téléphone portable, ou un appartement richement décoré, comme une jolie cage à oiseaux, qui comblent les sentiments de vacuité ou d’impuissance qui hantent les protagonistes. Par miracle, ce constat social n’enlève rien à la magie ténue de Memory of love. Mieux, son histoire d’amour presque féerique n’en semble que plus profonde et symbolique. Et s’il suffisait de transcender ses pulsions primaires pour faire le bonheur à la fois des autres, mais aussi de soi-même ?
MpM
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